Et bien voilà, Barlow chez Iced Earth acte II, c'est déjà fini. Bilan des opérations: un album en demi-teinte, des projets avortés (le réenregistrement de Framing Armaggedon pour le coffret spécial Something Wicked) et surtout de longues plages d'inactivité, comme en témoigne le DVD Festivals Of The Wicked qui s'appuie sur des shows de 2008, le groupe n'en ayant pas donné beaucoup depuis. C'était bien la peine de dégager Ripper comme un malpropre… Mais bon, là n'est pas la question, concentrons-nous plutôt sur les nouvelles aventures d'Iced Earth.
Encore que, pour associer l'adjectif « nouveau » à Dystopia, il ne faut vraiment douter de rien. Dès la fin de l'intro martiale, lorsque le riff à la "Prophecy" retentit et que l'on retrouve ce jeu de batterie si typique, avec la double pédale à fond et la caisse claire calée sur la guitare, comme si Schaffer n'avait toujours pas tourné la page Something Wicked, on se dit que l'on est en terrain connu. Et cette impression, elle nous va pas nous lâcher tout au long de l'album, à mesure que s'égrènent les (nombreuses) références au passé du groupe : le gimmick de la cloche sur "Boiling Point", déjà utilisé jadis sur "Burning Times", même si le morceau ressemble davantage à "Stand Alone" ; "Anguish Of Youth" ensuite, qui s'avère être une véritable resucée de "Melancholy" ; le riff d'intro de "Dark City", son de guitare compris, qui nous fait le coup de "Slave To The Dark" – le retour ; le très court (2 minutes 15) et nerveux "Days Of Rage", qui rappelle "Violate" dans l'esprit ; la ballade acoustique "End Of Innocence", qui ressemble quand même pas mal à "Hollow Man" en moins larmoyant ; enfin, le glorieux et épique "Tragedy And Triumph", avec là encore un riff dans la veine de la trilogie originelle Something Wicked (en l'occurrence "The Coming Curse"). A ce point-là, on n'en est même plus au stade du groupe qui veut réaffirmer son identité, on en est carrément à celui du groupe qui n'a plus aucune imagination…
Même l'arrivée de Stu Block, dont on aurait pu penser qu'elle ferait souffler un petit vent de fraîcheur, n'apporte finalement rien de bien neuf dans la marmite. Alors que son expérience dans le death progressif laissait augurer une palette assez large, le chanteur canadien peine à se démarquer de Barlow, dont il reprend certains tics vocaux comme les intonations agressives en fin de phrase (flagrant sur "Dystopia" notamment). Son timbre est de toute façon assez proche de celui du rouquin, l'exemple le plus frappant étant "Anguish Of Youth". Et quand il balance des screamings, là, difficile de ne pas penser à Ripper. Ainsi, le refrain de "Boiling Point" sonne comme un duo entre les deux derniers vocalistes d'Iced Earth ! Son apport est donc assez minime, et il faudra attendre la suite pour le voir apposer sa patte sur l'œuvre du groupe. Bon, jusque là, vous devez trouver le tableau assez noir ; disons plutôt qu'il est gris. Iced Earth utilisant des recettes qui ont déjà fait leurs preuves, on trouve tout de même quelques morceaux de bonne facture, même s'ils ne sont pas de toute première fraîcheur. On appréciera la capacité du groupe à sortir le refrain épique qui tue, comme sur "Dystopia" et surtout "Tragedy And Triumph" ; dans un registre plus posé, "Anthem fait également son petit effet ; enfin, avec "Dark City", Iced Earth montre qu'il est encore capable de proposer du riff qui sent la poudre.
Au final, avis très mitigé. Dystopia est un album moyen, comme l'était Horror Show en son temps, mais de manière différente : Horror Show, c'était de vrais morceaux de bravoure espacés par de gros passages à vide ; ici, on a plutôt 10 titres homogènes (hormis peut-être "V", un peu lourdingue, et "Days Of Rage" qui manque un peu de consistance), mais qui ne décollent jamais vraiment, en plus de laisser un arrière-goût de réchauffé. Avec aussi peu d'ambition artistique, Dystopia sonne un peu alimentaire et ressemble à un album de transition avant de repartir vers quelque chose de plus ambitieux une fois Stu Block bien intégré (du moins on l'espère… s'il ne se fait pas virer d'ici là, on ne sait jamais avec le père Schaffer).