Drudkh -
Blood In Our Wells (réédition)
2010, l’heure pour Drudkh de rééditer son Blood In Our Wells (le titre original est en ukrainien et donc en cyrillique illisible) sorti alors en 2006 et l’occasion pour les retardataires de se rattraper. Dans la plus pure veine pagan/folk qui sévit dans les contrées de l’Est, cet album fait aussi partie des plus appréciés du genre. Et il est probablement le sommet de la carrière de Drudkh à l’heure actuelle. Pour cette réédition 2010, pas grand chose de nouveau en fait, si ce n’est un changement de label pour passer de The End Records à Season Of Mist.
Voilà ce qu’il faut savoir pour les petites histoires. Pour la grande histoire de la musique, il en est tout autre. Drudkh est un groupe maintenant établi avec sa cohorte de fans qui attendent impatiemment chaque nouvelle sortie. S’il a pu en arriver à ce niveau de reconnaissance, c’est grâce à des albums de la trempe de ce Blood In Our Wells. Tout débute par un acoustique délicat, presque discret, qui vous amène dans les lieux de la contemplation. Drudkh a été comparé à un Burzum ukrainien, c’est à tort désormais, car Burzum n’a jamais proposé autant d’interventions d’instruments plus classiques, folk. D’ailleurs, Drudkh ne prétend pas avoir la folie de ce maître ni sa rage extrême. Drudkh est plutôt du genre à prendre son temps et développer ses idées comme bon lui semble. Ce n’est pas pour rien que les chansons s’étendent allègrement sur 8-12 minutes.
Au vu de l’orientation musicale de la bande, c’est tout à fait logique. Cela permet aux compositions de respirer un maximum et de caler ci et là des soli non démonstratifs, mais bel et bien mélancoliques. Cette lumière automnale qui sévit constamment sur les réalisations du groupe est bien présente et tout concorde à la faire vibrer plus encore. Les autres caractéristiques de cette musique très ancrée dans la culture ukrainienne (Roman Sayenko reprend des poèmes ukrainiens comme paroles des fois) sont ce côté lancinant et cette absence de violence malgré un chant typé black et quelques roulement de double pédale. Drudkh n’est pas du genre à enfoncer sous l’avalanche de blast, loin de là. Le but est toujours de prendre son temps, de contempler, d’admirer ces paysages orangés qui nous entourent. Seules exceptions, les débuts de "Solitude" et "Eternity", plus énergiques.
C’est pour ça que de cette musique, nous ne retenons pas forcément des riffs en particulier. Il s’agit d’un ensemble qui vise à créer une atmosphère et pas forcément d’attraper la lucidité de son auditeur sur des passages accrocheurs. Bien sûr, un petit break acoustique comme celui présent sur "When the Flame Turns to Ashes" sait saisir l’oreille et rester en mémoire, mais ce n’est clairement pas la vocation première de cet album qui doit s’apprécier dans son entièreté avant tout, et avec patience. L’amateur d’immédiateté devra passer son chemin car il n’y trouvera probablement rien. Celui qui aime les démonstrations de dextérité ou de violence s’en ira aussi. Il faut vraiment vouloir s’imprégner d’un monde, d’une forêt (qui est la traduction de Drudkh dans notre belle langue d’ailleurs) plus que d’écouter de la musique.
Blood In Our Wells est un album beau, contemplatif et avant tout atmosphérique. Pagan par son approche textuelle, folk par l’utilisation d’éléments acoustiques et presque tribal via les menues interventions de percussions, il représente un voyage qu’il faut savoir apprécier et accepter. L’ennui poindra chez ceux qui y sont imperméables, et même un petit peu chez ceux qui s’y retrouvent, car il reste long, mais il mérite de passer outre. Il s’agit d’une formidable peinture musicale.
P.S. : cette réédition est en tout point identique à l’originale, donc considérez cette note comme une note d’album. Pour la réédition, il vaut mieux y voir un 0/20, puisque totalement inutile aux déjà possesseurs.