La modernité affichée par Destruction sur ses deux précédents opus n’a pas été du goût de tout le monde, notamment des fans old school les plus grincheux. Et à l’aube de ce nouvel album, on dirait que Destruction a décidé de tenir compte de leur avis. Du coup, tous les premiers signaux semblent indiquer un net retour en arrière…
Abonnés aux studios Abyss depuis la reformation, les Allemands ont cette fois déserté la Scandinavie pour s’installer en Suisse. Ils ont également choisi de s’installer aux manettes avec un ingé-son soudainement promu coproducteur. La direction retenue est très claire, résumée à elle seule par cette phrase extraite du livret : « This album features only real sounds ! No fake shit, no computers, no Pro Tools, no triggers ! Real metal ! ». Voilà qui annonce la couleur, il ne faut pas s’étonner d’avoir affaire à une production très brute ! Niveau personnel, du changement également : le tandem Schmier/Mike reste inamovible, mais à la batterie, exit Sven Vormann, place à Marc Reign. Ce dernier possède un jeu beaucoup plus old school que son prédécesseur (à vrai dire, on saisit mal pourquoi il remercie Neil Peart ou Virgil Donati) qui cadre parfaitement avec l’orientation musicale de l’album.
Car niveau compo, là aussi, le repli est marquant. Back to the 80’s, dans le style thrash allemand le plus pur. Et il faut avouer que cette tendance semble réussir aux Allemands. En ouverture, "The Ravenous Beast" lamine tout sur son passage avec son riff simple mais efficace et son refrain synonyme d’accélération dévastatrice. Bis repetita avec "Metal Discharge", construit sur le même schéma avec comme petit plus, un refrain encore plus catchy qui devrait faire des malheurs en live. Un vrai hit thrash en puissance. On serait presque surpris de voir débouler dès la troisième piste un mid tempo avec "Rippin’ the Flesh Apart", surtout que pour une fois, celui-ci est une vraie réussite. Les plans relativement complexes s’enchaînent parfaitement les uns aux autres, et seul le refrain hurlé constitue une légère fausse note… que Schmier va réitérer sur TOUS les morceaux.
Ceux qui ont suivi attentivement jusque là se seront peut-être étonné de l’incohérence entre ce début élogieux et la note franchement moyenne : ils comprendront si ils jettent un jour une oreille sur ce Metal Discharge. J’avais parlé d’un bis repetita au sujet du morceau titre ? Et bien il y a aussi un ter, et toute la suite que mes connaissances limitées en latin ne me permettent pas de détailler. C’est bien simple : vous avez vu Mes doubles, ma femme et moi, ce film avec Mickael Keaton dont les clones sont de plus en plus dégénérés ? Et bien cet album, c’est la même chose. On a l’impression que la suite n’est qu’un vulgaire copier/coller de plus en plus médiocre, sûrement dû à la lassitude d’entendre la même chanson indéfiniment. Les mauvaises langues diront que c’est toujours comme ça avec le thrash, mais ici, le phénomène est vraiment poussé à son paroxysme. Tous les refrains sont construits de la même façon, à savoir le hurlement traînant d’une seule phrase qui constitue le titre. Du coup, sans être un chef d’ouvre, la sympathique "Historical Force Feed" sort aisément du lot avec son tempo plus lent et son gimmick de guitare mélodique sur le refrain. Et même quand une amorce de variation semble se dessiner, comme sur le début Panteresque de "Made To Be Broken", le groupe retombe immédiatement dans ses travers.
L’extrême linéarité de cet album, notamment due à la prestation poussive de Schmier au chant, ne joue pas en sa faveur. Et pourtant, vous pourrez trouver ci et là des avis très positifs sur cet album, émanant généralement de vieux fans ravis de ce retour aux sources. Mais si ce n’est pas votre cas, ou que vous n’êtes pas accro au thrash allemand le plus basique, il y a très peu de chances pour que vous y trouviez votre bonheur.