Savatage -
The Dungeons Are Calling (EP)
Issu des mêmes sessions d’enregistrement que Sirens, The Dungeons Are Calling est d’abord sorti de manière indépendante, en tant qu’EP, une année après son prédécesseur. Deux rééditions, en 1994 puis en 2002, l’ont vu affublé de 2 titres bonus (dont un live), puis 3 autres, pour se voir réuni en une seule galette avec Sirens. C’est la réédition de 1994 qui sera chroniquée ici, avec 2 titres bonus donc, pour ceux qui suivent. Et qui dit session d’enregistrement commune à deux albums, dit plein de choses…
Même line-up déjà. On retrouve donc toujours notre bon Jon, encore svelte à l’époque, et sa voix râpeuse et volubile au micro, ainsi que son frangin Criss à la guitare. Ces deux là constituent la charnière indispensable du groupe et proposent avec leurs compositions un style qui s’affirme indéniablement : un heavy metal selon des traditions assez européennes affublé d’une touche de noirceur que ne renieraient pas les plus grandes marques de café. L’album commence d’ailleurs de manière assez caractéristique, avec cette guitare acoustique et ces accords faussement majeurs dans un brouillard de chuchotements, le tout survolé par la voix de Jon, pour déboucher sur un riff bien heavy. Bref, on est de suite installés au fin fond des ténèbres. Surtout que le son poisseux et cradingue d’époque n’aide pas. La basse est très en avant, dommage lorsqu’on a un son tout pourri, et on est déjà content d’entendre tous les instruments sans trop savoir pourquoi tant le tout ne parait pas franchement limpide. Quelques touches de synthé sont également disséminées ci et là, mais pas forcément utilisé avec la parcimonie caractéristique qui fera les grandes heures du ‘Tage quelques années plus tard.
Mais ce qu’il faut retenir du Savatage du milieu des années 80, c’est tout d’abord un sens du mid-tempo irréprochable. "By the Grace of the Witch" en est un bel exemple : court, droit au but, sans fioritures, tout ce que l’on aime. Les soli de Criss sont déjà bien affutés et c’est un plaisir à chaque fois d’atteindre la partie des compositions qui lui est consacrée. Mais malgré un début d’album réussi, Savatage ne s’exempte pas de fautes de goût avec un "Visions" dispensable et son riff pas franchement inspiré sur un tempo accéléré mais pas trop… On sera donc heureux de revenir sur "Midas Knight" à une recette plus connue mais qui a fait ses preuves, toujours avec ces soli bien torchés. Quelques touches de synthé plus tard, on revient à des ambiances plus sombres avec le riff pachydermique de "City Beneath the Surface" qui déboule sur un cri d’outre tombe de Jon que ne renierait pas un certain Tom Araya… puis re-faute de goût avec la dispensable "The Whip". Nous voilà donc déjà dans les bonus tracks, avec la mielleuse "Fighting For Your Rock" dont le son est tellement crade qu’il en devient trop éprouvant d’essayer d’apprécier l’exercice, et la version live de "Sirens" qui, aussi bon le titre soit-il, subit un traitement sonore du même tonneau.
Un EP qui vaut donc pour quelques titres de bonne facture, pour les amateurs non rassasiés par la première offrande du combo et qui voudraient donc prendre une seconde louche d’un heavy metal qui vole déjà bien haut, suffisamment pour déjà se positionner au dessus de la masse de combos de cette époque. Les autres devront patienter quelques années un peu houleuses avant de retrouver le grand Savatage.