Il arrive parfois que des groupes dont on n’attend plus grand-chose ressurgissent comme par miracle, porteurs d’un nouvel album flamboyant. Ou d’un bon album, ce qui n’est déjà pas si mal. Candlemass, en groupe culte qui se respecte, n’a pas manqué de jouer ce coup tordu à ses fans en lâchant en 2005 un album éponyme plein de promesses et marqué notamment par la reformation du line-up mythique, celui de la période 1987-1989 (de Nightfall à Tales of Creation). Ces dispositions, ainsi que le retour annoncé aux fondamentaux, laissaient espérer que les années d’errance et d’expérimentation qui avaient quelque peu entamé la légende du groupe – de Chapter VI à From the 13th Sun – allaient enfin trouver leur terme.
Je ne connais pas un fan de Candlemass sur terre qui n’ait remercié les dieux du retour de Messiah Marcolin dans le groupe qui fit sa gloire (parce que Memento Mori, franchement …). Mais que ce fut long avant d’en profiter ! Entre 2002, année de la reformation et 2005, celle de la sortie de Candlemass, la presse spécialisée a noirci bien des pages à essayer de démêler les déclarations de Marcolin et d’Edling qui se reprochaient … ben vous savez quoi, les trucs habituels quand deux grosses personnalités vont au clash ! Entre l’annonce d’un nouveau split en 2004, suivie de celle d’une deuxième reformation – toujours sur fond de règlement de comptes - il était difficile d’imaginer que nos suédois parviendraient un jour à remettre le pied à l’étrier. Et pourtant. Les bienheureux qui avaient eu la chance d’assister aux concerts de 2002-2003 en ont été pour leur frais : ils ne seraient pas les derniers au monde à avoir vu le line-up (quasi) originel œuvrer sur scène.
Car ce qui devait arriver arriva. Candlemass déboula dans les bacs, et ce fut une bien belle surprise, reconnaissons le. Il faut dire que le management du groupe a su y mettre les formes, en associant à ce simple nom de Candlemass une pochette pour le moins dépouillée. Autant de symboles que l’on interprétera comme la volonté du taulier Edling et de ses gars de revenir – sans faire de vagues – à l’essence même de la formation : le heavy/doom puissant et mélodique de leurs jeunes années. A entendre "Black Dwarf" pourtant, on se demanderait presque si l’on a bien affaire aux géniteurs de "Dark Are The Veils of Death", parmi un milliard d’autres titres en bronze massif. Que penser en effet d’une introduction aussi … véloce ? Que du bien, car après tout c’est toujours de heavy/doom qu’il s’agit, le doom n’étant pas lié à la seule notion de lenteur, mais aussi à celle de lourdeur. Et de la lourdeur, de la puissance, ce morceau n’en manque pas ! Le mélange (avec le tempo enjoué) est même particulièrement saisissant !
A l’inverse, des titres comme le très beau "Seven Silver Keys" – où Marcolin fait étalage de sa grande maîtrise vocale – et d’autres plus sombres à l’image de "Copernicus" et de "Spellbreaker" vous feront naviguer dans des eaux moins troubles, plus conformes à ce qui a été fait par le passé. Si la carte de la vélocité sera abattue une dernière fois tout de même (avec moins de réussite) sur "Born in a Tank", "Witches", "The Day and the Night" et "Seven Silver Keys" vous replongeront avec délice dans les ambiances solennelles et empreintes de lyrisme que le groupe distille désormais avec un savoir-faire consommé. Le tout est intelligemment relevé par les soli de Johansson, qui impressionnent toujours autant par leur musicalité et par leur efficacité. Cela étant, Candlemass n’échappe pas à quelques petits ratés comme "Born in a Tank" – on l’a dit – et d’autres compositions qui peinent à soutenir la comparaison avec les meilleurs titres de l’album. "Copernicus" par exemple a un mal fou à dérouler ses 7 minutes sans impatienter l’auditeur (même si le riff de fin et le solo sont bien bons), et l’instrumental "The Man Who Fell from the Sky" n’a tout simplement aucun intérêt passé la première écoute.
Pour un album censé marquer la renaissance d’un groupe légendaire, Candlemass fait très bien son boulot. Malheureusement, il souffre des mêmes défauts qui avaient accablé Tales of Creation et Ancient Dreams 16-17 ans plus tôt, à savoir l’alternance de morceaux vraiment imparables et d’autres beaucoup plus quelconques. Sur un album de 9 titres, il est certain que cela ne peut pas passer inaperçu. Cela étant, Candlemass reste tout à fait sympathique et fait office de brouillon pour la copie quasi-parfaite qui sera rendue deux ans plus tard avec King of The Grey Islands.