Histoire de calmer un peu les fans sur les nerfs, Blind Guardian nous livre six mois avant le successeur de A Night At The Opera ce maxi-CD, révélateur du nouveau tournant pris par le groupe. L'une des forces du combo est de parvenir à se remettre en question sans dénaturer son identité, et Fly le prouve une nouvelle fois. La chanson-titre s'inscrit dans la continuité de morceaux comme "Under The Ice" ou "Sadly Sings Destiny", cumulant dans un grand patchwork diverses idées et atmosphères, difficiles à décrire. Comme à l'accoutumée, les détails et la logique inhérente à la compo se révèlent avec les écoutes, mais il est assez clair que Blind Guardian a cherché à suprendre son auditoire, avec un son de guitare crushy - notamment en rythmique -, et des claviers saugrenus (au sein d'un break qui ne l'est pas moins.) Complexe, imprévisible, mais finalement assez accessible, "Fly" sera sans doute l'un des highlights de l'album.
"Skalds And Shadows", en revanche, donne dans l'ultra-classique pour nos bardes, puisqu'il s'agit d'une ballade médiévale - acoustique ici, mais vraisemblablement plus orchestrée sur l'album - dans la lignée de "The Bard's Song" et "A Past And Future Secret". La simplicité a également du bon, puisqu'en quelques accords et une mélodie de flûte, Blind Guardian nous livre l'une de ses plus jolies pièces, ode ici aux mythes scandinaves et nordiques. Hansi Kürsch semble privilégier, lui aussi, une certaine spontanéité dans son travail, ne doublant pas systématiquement sur trois octaves la moindre de ses pistes vocales. Ce qui n'empêche pas les choeurs et les backings d'être fignolés à la perfection. Un héritage de la démarche de Demons & Wizards peut-être? La reprise plutôt inattendue d'Iron Butterfly, "In A Gadda Da Vida", speed-metal comme au bon vieux temps, n'aurait en tout cas pas dépareillé sur Touched By The Crimson King. Un choix curieux donc, mais qui a le mérite de démontrer que la mécanique métallique aux fûts du petit nouveau Frederik Ehmke n'a rien à envier à celle de son prédecesseur Thomen Stauch.
Un seul petit regret: ce maxi-CD est trop court! Fly est d'abord un soulagement bien sûr, puisque l'album s'annonce plutôt bien, mais l'attente risque d'être longue. Une piste multimédia, par exemple, n'aurait pas été de trop. Tant pis, nous nous ferons violence. Rendez-vous en automne.