Dans les années 1980, une armada de groupes fut formée dans le seul but de faire comme Slayer, vu que Reign in Blood avait mis tout le monde par terre. Les bad boys et les concerts furieux avaient forgé la légende. Puis Kreator et Dark Angel ont suivi, armés de leurs premiers albums. Celui dont il est question, Darkness Descends, reste le disque le plus emblématique de cette époque. Marquant le début de la collaboration fructueuse avec Gene Hoglan, les sept titres montrent aussi combien Hell Awaits est resté dans les mémoires (même si Rick Rubin n'était pas d'accord avec l'interprétation de Slayer basée sur le pifomètre).
Car sur plusieurs aspects, de forme mais aussi de fond (un peu moins, mais on va y venir), Dark Angel ne faisait presque que faire comme Slayer. Regarder la structure de l'album est déjà largement suffisant pour s'en convaincre : sept titres, avec le morceau éponyme au début, puis quelques speederies absolument ébouriffantes avec, vers la fin, un morceau long pour un meilleur équilibre. Un morceau éponyme qui, d'ailleurs, démarre tout en lourdeur (batterie pesante et menaçante chez Slayer, rouleau compresseur chez l'ange sombre, merci Hoglan.), avant que plus rien ne puisse l'arrêter. Les riffs sont rapides et violents, et Eric Meyer déploie la même hystérie lors des solos. Enfin, la production est encore moins propre que sur le second album de leurs idoles, plus proche des débuts (Show no Mercy et son son crade et incisif). Heureusement, tout cela reste écoutable et la basse se fait même bien entendre, comme sur... Hell Awaits aussi. De toutes façons, disons-le : Dark Angel était peu original sur la forme, puisque "Hunger of the Undead" et "Black Prophecies" rappellent beaucoup Slayer sur "Crypts of Eternity" ou encore "Altar of Sacrifice". Brutal, costaud et cherchant à chambouler le plus possible, Darkness Descends reste inférieur à l'impitoyable Reign in Blood car celui-ci est carré et plus audible encore (malgré le fait que la basse est moins perfectible), et surtout plus malsain. Il faut encore un indice ? Pas de problème : le chant.
En effet, n'est pas Tom Araya qui veut, et Don Doty peut se monter assez énervant avec les cris suraigus qui, repris par d'autres, feront presque cliché. Mais ceci, comme tout le reste, reste excellent sur la forme. Car sur le fond, Dark Angel reste encore capable de faire ses riffs. Bien qu'ils aient donné de bonnes idées (Armoros) ou de mauvaises (Merciless Death et tout ce carnaval du revival thrash) à plein de groupes en manque d'inspiration, cela passait en 1986. Très bien, même. Car Gene Hoglan place tout de même la barre très haute. Déjà, "Merciless Death" servait de repère pour montrer combien Jon Schwartz, à côté, était un bleu. C'est simple : cette fois, le refrain est à tomber par terre !! Les impitoyables "Burning of Sodom" et surtout "Death is Cetain (Life is Not)" sont d'ailleurs là pour témoigner d'une rythmique impitoyable. Et c'est à ce moment là que le point fort du disque intervient : les refrains sont tout bonnement entrainants (mention spéciale à "Darkness Descends" et la montrée du chanteur, et bien sûr "Death is Certain"). Toutefois, si "Black Prophecies" semble digne de "Crypts of Eternity", il n'en n'a ni les riffs vicieux, ni l'ambiance renforcée par Tom Araya. Heureusement que "Perish in Flames" remonte la pente. Car c'est là que réside le problème de Darkness Descends : il oscille entre la succession honorable et la caricature de Slayer. À se demander comment Dark Angel a pu réussir à passer de ce brouillon de Hell Awaits à Leave Scars, reconnu comme leur meilleur album (non parce que Time Does Not Heal est bouffé par les paroles, semble-t-il).
Alors, album over-culte, ce Darkness Descends ? Pas autant que certains le disent, en vérité. Même si Gene Hoglan y a joué, le statut culte n'est mérité qu'à moitié. Depuis, bien de l'eau a coulé sous les ponts, reléguant Dark Angel au rang de second couteau, loin derrière Metallica, Slayer, Megadeth ou encore Coroner pour être plus confidentiel. Mais quel tranchant dans les lames, mesdames et messieurs ! Aux côtés du bourrin et presque death Pleasure to Kill de Kreator et Bonded by blood de Exodus, Darkness Descends est devenu une sorte de limite du thrash brutal, au-delà de laquelle toute reprise pour faire pire paraitraît vaine. Et puis après tout, la tête des liste des groupes influencés Slayer vaut mieux que les innombrables copies carbones.