CHRONIQUE PAR ...
Winter
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
16/20
LINE UP
-Ronald "Ron Rinehart" Hilbus
(chant)
-James "Jim" Durkin
(guitare+chœurs)
-Eric Meyer
(guitare+chœurs)
-Michael "Mike" Gonzalez
(basse+chœurs)
-Eugene "Gene" Victor Hoglan II
(batterie+chœurs)
Guest :
-Ron Daniel Eriksen
(chœurs sur "The Promise of Agony")
TRACKLIST
1) The Death of Innocence
2) Never to Rise Again
3) No One Answers
4) Cauterization
5) Immigrant Song
6) Older Than Time Itself
7) Worms
8) The Promise of Agony
9) Leave Scars
DISCOGRAPHIE
Trois ans, c’est plus de mille jours, c’est long. Imaginez par exemple un fan de thrash metal des années 80 séquestré par des fondamentalistes d’une religion quelconque - capitalisme, communisme, … la religion que vous voulez - entre 1986 et 1989. Au moment où il se fait kidnapper, Dark Angel vient de frapper très fort avec Darkness Descends. Il tient bon pendant ces trois années en chantant "Merciless Death" à tue-tête, au grand dam de ses ravisseurs, qui, de guerre lasse, le relâchent, ne supportant plus les « ouin ouin ouin merciless ! » que l’otage récalcitrant leur hurle aux oreilles toute la saint journée, et ce malgré l’emploi d’innombrables tortures pour le faire taire.
Enfin libéré, notre bon thrasher se précipite, fort logiquement, chez son disquaire – on est dans les 80's – et demande des nouvelles de son groupe préféré. Le disquaire, honoré de la présence dans son établissement d’un héros de la guerre contre les terroristes, lui offre Leave Scars. L’ex-otage se précipite chez lui, s’enferme à double tour et écoute, fiévreux, le troisième opus de Gene Hoglan et ses copains, ses anciens copains et ses nouveaux copains. Et Gene réussit en cinq minutes là où les putains de preneurs d’otage ont échoué en trois ans – plus de mille jours. Rick – c’est le nom de notre thrasher – devient fou. Il n’a pas supporté tous les changements survenus entre les deux albums. Et on le comprend. Franchement, qu’est-ce que représentent trois ans emprisonné dans une cellule de deux mètres sur deux à manger des croûtons de pains moisis et boire de l’urine de chacal en comparaison d’un tel bouleversement au sein de son groupe préféré - lineup, orientation textuelle et musicale ? Hein ? Non, parce que le père Gene n’a pas fait semblant de changer les choses. Peut-être inspiré par l’apparition d’un ange – on en doute tout de même, il se défait de son bassiste et remplace la redoutable sorcière hurlante Don Doty par Ron Rinehart, un chanteur au timbre plus gras et plus classique, sorte de Steve Souza en moins nasal – heureusement.
Côté compo : exit le côté Slayer sous amphétamines noires, bonjour le thrash monolithique et abrasif où seules quelques plaintes de guitares apportent une très légère touche mélodique ("Cauterization", "The Promise of Agony" ou l’improbable reprise de "The Immigrant Song" à faire s’évanouir les fans de Plant et Page). On vire également le diable à grand coups de pieds dans le cul et on aborde des sujets plus en prise directe avec la society. Rien que ça… Le résultat des courses ? Un album qui fera fuir tout thrasher tenant absolument aux invocations du démon et/ou adepte de musique un tant soit peu évoluée. Les amateurs de riffs ultra abrasifs et de section rythmique ultra carrée devraient rester, eux, même s’ils déploreront une prod faiblarde – notamment côté batterie, le comble ! "Never To Rise Again" est bestial, "No One Answers" ultra brutal, "The Promise of Agony" possède un final heavy torturé aux petits oignons, et "Cauterization" est certainement l’instrumental le plus lourd de tous les temps, et l’un des plus jouissifs aussi. Côté bof : le reste des titres, rappelant du mauvais Exodus, mauvaises vocalises incluses. Si "The Death of Innocence" fait quand même le job, "Older than Time Itself" et "Leave Scars" sont très, très dispensables.
Avec Leave Scars, le Dark Angel démoniaque et slayerien fait place au Dark Angel social, monolithique et antimélodique. La forme d’agression est différente mais le résultat est globalement très bon, certains morceaux continuent à défoncer les mammouths plus de vingt-cinq ans après leur sortie. La doublette Darkness Descends / Leave Scars constitue l’apogée de la courte carrière du groupe, le quatrième et dernier album de la formation étant d’une qualité beaucoup plus douteuse.