Chronique : Moonspell Sin/Pecado (1998)

CHRONIQUE PAR ...

Wotan
Cette chronique a été mise en ligne le 07 décembre 2024

Sa note : 17/20

LINE UP

-Fernando Miguel Santos Ribeiro
(chant)

-Ricardo Amorim
(guitare)

-Pedro Paixão
(claviers)

-Miguel Teixeira Gaspar
(batterie)

A participé à l'enregistrement :

-Birgit Zacher
(chant sur 5)

TRACKLIST

1) Slow Down!
2) handmadeGod
3) 2econd Skin
4) Abysmo
5) Fleshold
6) Magdalene
7) V.C. (Gloria Domini)
8) EuroticA
9) Mute
10) Dekadance
11) Let the Children Cum to Me …
12) The Hanged Man
13) 13!

DISCOGRAPHIE

Wolfheart (1995)
Irreligious (1996)
Sin/Pecado (1998)
The Butterfly Effect (1999)
Night Eternal (2008)
Alpha Noir (2012)
Omega White (2012)
Extinct (2015)
1755 (2017)
Hermitage (2021)
From Down Below - Live 80 Meters Deep (2022)

Moonspell - Sin/Pecado

(1998) - gothique - Label : Century Media

En voilà un titre d’album intéressant. Sin est le péché en anglais, tandis que Pecado a le même sens en Portugais. Cependant, en Espagnol, Sin Pecado veut dire “sans péché”. Que comprendre ? Pécheur ou non pécheur ? Connaissant les Portugais, probablement la seconde option. Les gothiques de Lisbonne aiment explorer les franges sombres et malsaines de la psyché humaine, ils flirtent (peut-être moins sur leurs albums les plus récents) souvent avec des thématiques glauques, touchant aux sept péchés capitaux.

La transition amorcée sur Irreligious est terminée, Moonspell est devenu complètement gothique, à un point tel que l’appartenance de Sin/Pecado au metal peut légitimement être questionnée. "2econd Skin", le single, contient juste le minimum syndical de saturation. Sous ce vernis métallique, se cache une composition de rock gothique mêlée de darkwave. L’enfant caché d’Andrew Eldritch et de Dave Gahan, en quelque sorte. Avec Peter Steele se masturbant en spectateur. Sensualité, sexualité du chant et des paroles imprègnent l’album. Les guitares infusent une ambiance chaude et décadente, tandis que les beats électroniques jettent une lumière froide sur la scène. "2econd Skin", "Abysmo", "Magdalene" et "Eurotica" sont tous des cross-overs entre les Sisters of Mercy et Depeche Mode. Refrains mémorables (sauf peut être celui de "Magdalene") et ambiances érotico-industrielles font un pas de deux autour de textures musicales. Le riffing est très peu utilisé, c’est l'atmosphère et la rythmique électronique qui font avancer les compositions. Aucune de ces chansons n’est vraiment faible, toutes laissent un effet fort et sont entraînantes, même si très noires. Avec le recul, Sin/Pecado est clairement un précurseur à l'expérimental et complètement industriel The Butterfly effect.

Sin/Pecado n’est pas dénué d'expérimentations d’ailleurs. Les Portugais voulaient semble-t-il mettre une touche orientale sur l’album, avec l’interlude atmosphérique "Fleshold" servant d'introduction à "Magdalene" qui lui aussi utilise des sonorités orientales pour l’ambiance, sans être folk. Ce mysticisme est quelquefois oriental comme les exemples cités précédemment, quelquefois plus catholique comme sur "Let the Children Cum to Me", un excellent titre, mélodique, avec une certaine force. "The Hanged Man" est une autre forme d'expérimentation, Ribeiro y est très suave, encore plus que sur le reste de l’album, les guitares claires trament des accords légèrement folk mais deviennent subtilement de plus en plus aériennes pour aller flirter avec le rock progressif. Après avoir goûté à ce Moonspell envoûtant et romantique, quand il revient un peu vers le style d’Irreligious (sans les grognements), il s’affaiblit ("Dekadance"). Il faut aussi noter l'évolution de la production et le mix de Waldemar Sorychta, qui réalise un sans faute et se démarque du son daté de Irreligious.

Sin/Pecado suinte l'érotisme et le mysticisme. Quelques passages un peu plus faibles ne suffisent pas à ternir la force de grands morceaux comme "Magdalene" ou "Let The Children Cum to Me", témoins des énormes progrès de Ribeiro pour mettre des émotions et de la sensualité dans sa voix. Débarrassé de ses influences black et folk metal, Moonspell livre un album majestueux et classieux, entièrement rock gothique, très inspiré de Depeche Mode avec des touches expérimentales flirtant avec l’industriel. Indispensable.