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CHRONIQUE PAR ...

15
Flower King
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note : 15/20

LINE UP

-Russell Mael
(chant)

-Earle Mankey
(guitare)

-Ron Mael
(claviers)

-Jim Mankey
(basse)

-Harley Feinstein
(batterie)

TRACKLIST

1)Wonder Girl
2)Fa La Fa Lee
3)Roger
4)High C
5)Fletcher Honorama
6)Simple Ballet
7)Slowboat
8)Biology 2
9)Saccharin and the War
10)Big Bands
11)(No More) Mr. Nice Guys

DISCOGRAPHIE


Sparks - Sparks
(1971) - pop - Label : Bearsville



Ils ont eu un single disque d’or en France. Ils ont enregistré des titres avec les Rita Mitsouko. Vos parents les ont peut-être aperçus dans l’émission dominicale de Guy Lux. Le jeune éphèbe à la voix de crécelle, et le claviériste à la moustache impayable… pourquoi ce silence radio sur les Sparks ? Pourquoi ne parle-t-on pas plus de ce groupe qui, une paire d’années durant, a peut-être été le plus fabuleux groupe pop de son temps ? À force de s’être revendiqués comme marginaux, doivent-ils en payer le prix par l’indifférence ? Il n’est pas trop tard pour (re)découvrir l’œuvre de cette fratrie remarquable, et nous allons nous y atteler dès maintenant.


Ron et Russell Mael. Deux frères. Deux enfants de Californie. Ils ont grandi au son de l’Amérique, et finissent par ne plus le supporter. Ce qui les intéresse, c’est ce qui se passe de l’autre côté de l’Atlantique : l’excentricité de la fin des années 60, les arrangements de travers, la mordante ironie des textes, et le goût de l’absurde… oui, on pouvait enfin raconter n’importe quoi dans une chanson pop. Faire chanter le dieu des Enfers, prêter son vélo à la fille qu’on aime, se moquer des couples qui se prennent en photo pour se prouver qu’ils s’aiment, c’était désormais possible. Mais excepté Zappa dans un registre plus « adulte », personne d’autre que les Sparks n’aura mis tant d’acharnement à ne raconter QUE des histoires tordues durant toute sa carrière. Et ce sous le couvert d’une musique, à l'inverse de Frank, somme toute très accessible… sauf en ce qui concerne leurs débuts.

Entendons-nous bien : les frères Mael, en quarante ans de carrière, ont pondu un nombre impressionnant de mélodies aussi immédiates qu’éternelles, toujours à l’affût du twist révélateur, de l’arrangement idéal, de la ligne vocale imparable ; et cette patte mélodique, on la retrouve déjà en 1971, sur ce premier disque. Mais elle n’est pas aussi immaculée que quelques années plus tard, un poil moins évidente… parce que le groupe est un peu plus fou. Parce qu’il veut tout de suite affirmer sa différence : en choisissant un premier nom complètement débile (Halfnelson, abandonné de justesse), en s’associant avec des musiciens au look dangereux (les frères Mankey, magnifiques sur la pochette du disque), proche du glam qui était sur le point d’exploser ; et en adoptant un son fort particulier pour l’époque. En quoi, me demanderez-vous?

Ron Mael est claviériste. Ron Mael a écrit la plupart des morceaux. Ron Mael aimerait donc bien que son instrument soit au premier plan dans le mix, sans trop étouffer les guitares bien sûr mais… quand même. Simplement, à l’époque, les claviers en avant, c’était OK pour les groupes de prog symphonique et les prémices de l’électronique, mais pas pour une bande de popeux déguisés en Alice Cooper Band à moustache. Et si vous ajoutez à cela la production de monsieur Todd « je m’éclate avec la stéréo » Rundgren, au son un peu crapoteux et riche en bidouillages rigolos, vous obtenez une mixture qui a dû surprendre à l’époque, et qui continue à faire son effet aujourd’hui. Synthés délicieusement cheap ("Fa La Fa Lee"), bandes accélérées ("Roger"), piano un coup à droite un coup à gauche ("Saccharin and the War"), c’est sûr, on n’est pas chez Kimono My House.

Pour certains, passer ce cap « lo-fi » ne sera pas chose facile, mais pour d’autres il confèrera un charme supplémentaire à des compositions qui ont largement de quoi se défendre. "Wonder Girl" ? Premier morceau des Sparks, première ligne vocale tuante. "Fa La Fa Lee" ? Deuxième morceau des Sparks, parle de l’inceste frère/sœur sous fond de surf music de série B. "Roger" ? Troisième morceau des Sparks, premier coup de génie avec ces bandes accélérées qui jouent la mélodie… on ne va pas faire tout le disque, vous voyez le topo. Quoique, il ne faudrait pas passer sous silence la lugubre "Fletcher Honorama", son break extraordinaire au piano haché et son final à X voix qui pose Russell en maître des harmonies. Et que dire de cette valse délicieuse, cet exemple de musiciens à l’unisson qu’est "Simple Ballet", qui raconte la merveilleuse histoire d'une danse devenue un phénomène de mode via une production hollywoodienne… oui, bon, vous avez compris qu’ils ne font rien comme tout le monde.

Mais parfois, quand même, il leur arrive de faire un morceau « normal », avec une thématique un peu plus raisonnable, juste histoire de changer un peu. Ici, c’est une chanson d’amour, ça s’appelle "Slowboat"… et c’est tout simplement un de leurs cinq plus grands titres. Dès l’intro on sent que quelque chose d’étrange se passe, un frisson de curiosité nous parcourt lorsque Russell prend le micro… et quand le refrain arrive on est à genoux, tant il nous semble que cette mélodie devait être composée un jour. Et ça repart : la progression du titre est hallucinante, de plus en plus passionnée jusqu’à son final bouleversant – et ce n’est pas souvent que j’emploierai ce terme avec eux – qui prouve que Russell savait vraiment faire des miracles avec sa voix haut perchée. Earle Mankey boucle la boucle avec un solo aussi économique que précieux… et nous voilà tout chamboulés. Dans un monde idéal, "Slowboat" serait sorti en single, aurait été la meilleure vente de l’année 1971 et passerait encore une fois par jour minimum sur Nostalgie. À la place, elle repose dans un scandaleux oubli. Il y a vraiment des claques qui se perdent.

Dommage que le reste de la face B ne suive pas vraiment. Elle ne manque pas d’idées, mais ces dernières semblent moins bien exploitées. "Biology 2", composition du guitariste, est peut-être la première chanson écrite du point de vue d’un geek, mais si son jeu de ping-pong constant entre les instruments amuse au départ, il lasse sur la longueur. "Saccharin and the War" démarre avec le meilleur riff du disque, mais le reste ne suit pas et le tout finit par se casser la figure. Quant à "(No More) Mr. Nice Guys", il est sans aucun doute le plus rock&roll du lot, mais cela se fait au détriment d’une mélodie marquante, et les frères Mael ne sont pas très doués pour habiller un rock&roll… reste "Big Bands" qui présente bien les caractéristiques typiques du morceau Sparkien réussi : refrain à tomber, arrangements au poil et thème saugrenu (ici, un type qui possède tous les disques de jazz big band juste pour pouvoir emballer). Avec en prime une fin complètement débile, ce qui est souvent un plus avec eux.




Et voilà. Sparks, première réussite d’une longue série, qui évidemment passera complètement inaperçue, et ne sera réeditée correctement en CD qu’en 2006. Vous êtes cordialement invités à tenter l’expérience, mais soyez prévenus : ils ne font rien comme tout le monde, ces gaillards. Et on n’avait encore rien vu…


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