Ce Live At The Grand Olympic Auditorium constitue le testament d'un groupe qui aura, en l'espace de trois albums et huit ans de carrière, marqué d'une empreinte indélébile le milieu du metal de années 1990. Rage Against The Machine a inventé un nouveau style, le "rap-metal", toujours copié, jamais égalé (suivez mon regard!)... Le groupe, c'est certain, s'est démarqué par un style détonnant, mené, avant tout, par un guitariste hors pair, Tom Morello (ses effets slidés, groovy et ses rythmiques réellement fascinantes resteront dans les mémoires) et surtout, par un chanteur engagé jusqu'au bout des ongles. Zach de la Rocha et son flow rappé aura réussi un tour de force, en mêlant brûlots rageurs (l'engagement politique était toujours sous-jacent) et lignes de chant démentielles.
Rage Against The Machine aura marqué les esprits, bien que l'on regrette (de loin, maintenant, dans les faits, mais de près quand on en voit les successeurs) le split d'un groupe qui a toujours su se renouveler. Ce live (amputé de quelques morceaux pour l'occasion) devait sortir en novembre 2000, mais après la séparation, les éditeurs se déchirant l'avenir posthume du groupe, ont finalement décidé de ne pas mener l'aventure jusqu'au bout. Il aura suffi d'un coup du sort pour que la galette sorte, pourtant; la formation d'Audioslave avec trois des quatre membres de Rage Against The Machine n'étant pas une vaine excuse... Au menu de ce live, enregistré en septembre 2000, figure une liste assez exhaustive des meilleurs morceaux du groupe, qui, il faut le dire, a accumulé les hymnes... Qui ne se souvient pas de "Killing In The Name" («F**k you, i won't do what you tell me»), qui reste sans aucun doute LE morceau fédérateur de Rage Against The Machine, de "Bullet In The Head", de "People Of The Sun" et sa guitare slidée, de "Know Your Enemy", éclatant et inspiré, de "Bombtrack" ? Et la liste est encore longue!
Autant dire que le tracklisting de ce disque est légendaire, même, et c'est là son premier défaut, s'il est entaché par la présence de deux reprises ("I'm Housin" et "Kick Out The Jams") plutôt malvenues, bien que purement dans le style de La Rocha. L'âme pensante et protestante du groupe n'est ici pas véritablement à son aise... On regrettera aussi un autre gros défaut de ce disque: un mixage qui met en avant le chant, mais bien trop aigu et criard (qui soufflote quelque peu), et finalement brouillon dans l'ensemble. Parfois, on dirait une démo très bien produite, mais une démo tout de même. Bon, ce live commence à dater (quatre ans), mais je pense que l'enregistrement et la finition du disque n'ont pas été la priorité à l'époque...
En résulte un sentiment mitigé, eu égard de tout ceci: en soi, c'est un produit intéressant (un live posthume et best-of par la même occasion), proposant le meilleur d'un groupe qui était décidément hors-normes, hors-conventions, inventif et engagé avant tout; mais l'enrobage étant très moyen, il vaut mieux se ruer sur le premier album éponyme, devenu un classique du genre et tout autant sur ses suiveurs, la qualité de l'enregistrement studio rendant là hommage au travail très pointu du groupe. Au fait, soit dit en passant, on attend toujours des nouvelles du projet solo de La Rocha...