Les brailleurs de Finlande sont enfin de retour, après le surprenant mini-album Trashed, Lost And Strungout, sorti il y a déjà près d'un an. C'est à dire que les hivers sont longs en Finlande, très longs même et que pour l'inspiration, c'est pas trop ça. M'enfin, Alexi Laiho et ses sbires reviennent, en forme pour tout vous dire, avec ce Are You Dead Yet? à la dénomination déjà controversée (l'ont-ils honteusement pompé, ce titre ou non?), mais habilement détournée d'une pirouette stylistique par Laiho (« j'ai failli mourir, mais je suis toujours vivant, donc... »).
Ceux qui connaissent Hate Crew Deathroll par coeur peuvent se recoucher tranquille, rien de bien nouveau sous le ciel du Lac Bodom. Juste un très bon album, enlevé et entraînant, avec quelques petites pointes de nouveauté ça et là, bien disséminées tout le long d'un album qui ne brille cependant pas par sa durée (trente-sept petites minutes, c'est court). Le groupe évolue par petites touches stylistiques: d'un speed black sur Hatebreeder, l'auditeur se retrouve avec un heavy speed black mélodique. Vous allez me dire, qu'est-ce que ça change? Les sonorités black ont légèrement laissé la place à un son plus heavy, in your face, dopé par une production bien meilleure que sur les derniers albums des Finlandais (les instruments sont d'une clarté exceptionnelle). "Are You Dead Yet?", la chanson éponyme, est à ce titre très lourde, enrobée de claviers tout en finesse et d'accords de guitare très, très puissants, comme le témoigne son solo court, mais exemplaire.
Are You Dead Yet? contient d'ailleurs quelques perles à ranger définitivement dans le best of the best du groupe: "If You Want Peace... Prepare For War", très classique dans sa construction, développe une attaque speed et un monstrueux solo de guitare, illuminé par les claviers de Janne Warman, à ranger dans la catégorie poids lourds. J'ai d'ailleurs rarement entendu de si bons claviers dans un style, qui, ma foi, se complaît dans sa propre bulle. Originaux, instinctifs, ces claviers-là ne laissent pas indifférent ("Next In Line", sublimée par une fine nappe sonore). "Next In Line" et "Bastards Of Bodom" possèdent d'ailleurs ce son caractéristique du groupe, à savoir une verve extrême (chant quasi black, gros riffs et batterie au diapason), lissée par des arrangements très mélodiques et un refrain une nouvelle fois entêtant. "Trashed, Lost And Strungout" abaisse fortement la tête pour nous envoyer dans le mur, grâce à une mélodie plus agressive que ses prédecesseurs, des riffs de guitare thrashy et un chant écorché, à la limite de la saturation sonore. Chant qui, sur ce disque, n'a jamais été aussi bon et personnel. Laiho a fait des efforts certains pour varier sa tessiture de voix et c'est tant mieux, tant son growl, très organique, parfois perçant, commençait à nous les briser menu.
Les Finlandais de Children Of Bodom nous démontrent une nouvelle fois que l'on ne peut faire court sans être précis. La précision de cet album très entraînant, aux rythmiques hallucinantes (mauvaises pour les cervicales, soit dit en passant) est tout à l'honneur du groupe, qui a fait un réel effort de ne pas dénaturer l'approche si unique de sa musique, tout en proposant quelques subtilités toutes nouvelles. Mélodie et agressivité vont de paire sur cet album réussi, dont on aurait pu cependant attendre plus de franche nouveauté; en effet, Laiho et sa bande commencent à tourner un peu en rond parfois ("Punch Me I Bleed", au refrain complètement raté et "We're Not Gonna Fall" sont un peu convenus pour du Bodom désormais). Cet album est à ranger tranquillement avec Hatebreeder et Follow The Reaper, bien calé entre ces deux monstres du genre. Bien foutu, pas foncièrement original, mais diable, que c'est bon!