CHRONIQUE PAR ...
Ragnarok
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
16/20
LINE UP
-Randy Blythe
(chant)
-Mark Morton
(guitare)
-Willie Adler
(guitare)
-John Campbell
(basse)
-Chris Adler
(batterie)
TRACKLIST
1) Straight for the Sun
2) Desolation
3) Ghost Walking
4) Guilty
5) The Undertow
6) The Number Six
7) Barbaraosa
8) Invictus
9) Cheated
10) Insurrection
11) Terminally Unique
12) To The End
13) Visitation
14) King Me
DISCOGRAPHIE
Prenez quatorze parpaings bien épais made in USA. Badigeonnez-les d’une brutalité encore jamais dégustée chez Lamb of God. Assurez-vous de la solidité de l’édifice. Assaisonnez-le de refrains efficaces et de rythmiques à décorner un troupeau de zébus. N’oubliez pas d’y incorporer les quelques nouveautés : un peu de sludge ("Straight for the Sun"), mais gardez la main légère ; une pincée de prog à saupoudrer avec parcimonie ("King Me") ; une touche de nuances, un peu de chant clair et un soupçon de math metal ("Insurrection"). Passez le tout au bon vieux lecteur CD. 55 minutes de cuisson. Vous n’avez plus qu’à apprécier la dégustation. Qui a dit que le gratin de parpaings était indigeste ? Réjouissez-vous ! Vous venez de prendre du même coup une plâtrée de bonnes baffes, et une excellente résolution.
Approchez et regardez attentivement l’artwork de cet album, puis prenez le temps d’écouter l’un après l’autre les titres qui le composent : vous aurez la preuve qu’une musique inspirée peut naître sur le sol le plus aride qui soit. Les gars de LOG semblent en effet avoir pris plusieurs bonnes résolutions, à commencer par l’interlude instrumental "Barbaraosa", placé stratégiquement en milieu de parcours. S’il n’a rien de particulièrement mémorable, il a le mérite d’apporter une accalmie salutaire après le déferlement de violence des six premiers titres. Le son des bonshommes a également un peu changé : il semble plus ouvert que sur les albums précédents, moins compressé ; peut-être est-ce dû à la légère reverb qu’on décèle sur certains titres, qui leur donne aussi plus de profondeur que les morceaux des albums précédents. "Straight for the Sun", qui ouvre ce bal de charcutiers, est une autre de ces bonnes résolutions ; on ne connaissait pas vraiment Lamb of God dans cette veine lourde et brutale, et on se surprend à sursauter à la première écoute.
On peut toutefois être vite lassé par cet opening, malgré son format court. N’ayez crainte, "Desolation" viendra convaincre les sceptiques : un morceau sans aucune faiblesse, inspiré, et tout bonnement parfait pour ouvrir un album. Enthousiaste, on se demande d’ailleurs, avec "Ghost Walking", si le quintet de Richmond n’est pas en train de réaliser un sans faute. A ce titre, la ligne de guitare descendante, juste avant le refrain, est un petit bijou. Seul le solo de gratte peut venir légèrement ternir l’ensemble, non pas d’un point de vue technique (Morton est de toute façon une grosse brute), mais sur le plan mélodique. On a parfois du mal à sentir le mouvement des phrases, à savoir dans quelle direction s’engage le solo. Pour continuer sur la pente des défauts que l’on peut trouver à cet opus, certaines chansons ont parfois du mal à décoller : "Cheated" n’a rien de particulièrement marquant, en ce qu’elle ne propose rien de vraiment nouveau et ne recèle pas vraiment de riffs ravageurs capables de sauver l’ensemble. La majeure partie de "The Undertow" souffre du même problème, à l’exception de refrain qui est bien ficelé.
Malgré ces légers bémols, le groupe délivre ici sa meilleure performance : plus carré et groovy que jamais, avec une batterie toujours là où il faut, assurant et soulignant le groove avec une fluidité irréprochable (prenez "Guilty", entre autres) ; une basse au son-énorme-metol-sur-enclume (fil de basse incroyable après le premier refrain de "The Number Six") ; un chant ultra violent et des guitares qui alternent entre des riffs mémorables (le refrain de "Visitation") et des lignes sinueuses et complexes doublées par la basse. Cette façon qu’ont les cordes de jouer ensemble la même ligne dégage beaucoup de puissance et une sorte de fluidité épaisse qui vous englobe et vous met au beau milieu de cette déferlante sonore de près de soixante minutes. Ce schéma était déjà présent sur Wrath et c’est avec plaisir qu’on le redécouvre ici. Si certains autres schémas se retrouvent sur Resolution, l’amélioration majeure présente sur cet opus est le souci d’efficacité : les compositions sont en même temps plus riches, et ce n’est pas "Desolation" qui en sera le contre-exemple. Les refrains de "The Undertow", "The Number Six" et "Visitation", ainsi que le couplet d’"Insurrection" sont parmi les passages susceptibles de vous rester en tête instantanément. Si les musiciens en sont assurément pour quelque chose, ce sont les lignes de chant de Blythe qui portent vraiment cette efficacité.
On peut toutefois, dans cet album d’une excellente qualité et porteur d’émotion, déplorer une certaine uniformité dans le choix des tempi et une difficulté (toute relative selon ce que vous avez l’habitude d’écouter) à digérer l’ensemble en une seule écoute, malgré la présence de "Barbaraosa ". Resolution, on le sent pourtant, est un album dont les titres doivent faire des ravages en live, tant ils font preuve d’un groove impeccable, d’une grande richesse musicale et d’une brutalité incroyable. On sera frappés par ce combo violence/groove qui fait décidément le génie de Lamb of God, et par le chant de Blythe qui sait preuve d’une variété surprenante. On ne pourra que saluer des passages tels que le couplet d’ "Insurrection" ou le pont de "The Number Six" à partir de 2 :13, preuves que le quintet sait faire bouger les contours du genre dans lequel ils évoluent. N’hésitez plus, venez déguster !