J’ai toujours été de ceux qui appréciaient Blaze Bayley, entre autre pour la noirceur qu’il a su développer avec Iron Maiden sur The X Factor, album au combien décrié mais qui figure pour moi dans le Top 5 des albums de la Vierge de Fer. Agressif, en colère et déprimé, le monsieur l’était en 95. En 2010, tout pareil. On ne change pas sa nature profonde. Sauf que là, il a perdu sa femme et son père, après s’être fait foutre dehors par son label pour cause de mauvaises ventes. La haine.
La peopolisation me pousse à parler de ça. De sa vie privée, en tant que Bayley Cooke, avant de parler de sa musique cuvée 2010. Pourquoi ? Parce que comme de nombreux artistes, Bayley utilise ses tripes pour dépeindre le monde. Les tragédies sont toujours plus intéressantes que les comédies, on aime voir les gens souffrir et les regarder évoluer dans notre monde avec les handicapes tel que le deuil. Et puis c’est intéressant d’apprendre que Stephen King a failli crever renversé par une camionnette et que depuis ses héros ont la fâcheuse tendance à être cassé de partout. Pour Blaze, c’est pareil. La vie ne lui a pas fait de cadeau (pas plus qu’à de nombreuses autres personnes) et comme il a un groupe, un peu de talent et un micro, il exorcise ses démons à coups d’albums. Promise and Terror, vous l’aurez compris, c’est le volume 10 de la thérapie de M. Cooke. Et vue la noirceur du propos, c’est bon de le savoir.Pour bien tout comprendre.
Très honnêtement, c’est un bon album. On rencontre plus médiocre que ça, plus souvent. Mais plutôt que de faire une chronique en "track by track", je vais être direct avec vous : les quatre derniers morceaux portent le tout. Et font de cet opus de heavy, somme toute assez classique, un GRAND album. Parce qu’à travers ces titres, Blaze se met à nu et utilise la musique, supporté par un line up franchement en place, pour se vider et se guérir. J’aurais tendance à dire que ces quatre titres justifient à eux seuls l’achat. Sans temps mort, les minutes passent et, sans qu’une mélodie directrice ne serve de fil conducteur, les temps forts se succèdent : de la montée mélancolique en harmonies typées …And Justice for All sur "Surrounded by Sadness", en passant à la colère et la faim de vengeance sur "The Trace of Things That Have no Words", puis par le pont épique et violent de "Letting Go of the World" pour finir sur une note d’espoir teinté de tristesse pendant "Comfortable in Darkness", on a le droit à la totale.
Et qu’on soit bien d’accord : je ne vous parle pas d’un mal de vie digéré et exploité à la Jon Davis, mais bien d’un homme à fleur de peau qui crache tout ce qu’il a en lui. Le plus surprenant restant les progrès du bonhomme sur le maintien de ses notes hautes, et son débit parfois assez hallucinant. Il est possible de ne pas aimer le personnage, ni sa voix, mais force est de reconnaître ses capacités bluffantes, loin de ses travaux avec Wolfsbane ou Maiden durant les 90’s. Les sept autres morceaux ne sont pas en reste. "Watching The Night Sky" et "Madness And Sorrow" sont deux brûlots de heavy à tendance trashisante pas dégueulasses pour un sous, tout comme "Faceless" et "Time To Dare", morceaux speeds et rythmés. "1633" et "City of Bones" sont deux pièces sombres et agressives, assez classiques dans le style, mais développant des ambiances lourdes (toutes proportions gardées hein, ça n’est pas un album de doom quand même). "God of Speed", quand à elle, devient vite pénible à cause d’une structure mid tempo assez lourdingue et d’un refrain peu inspiré.
Larry Paterson tabasse ses fûts comme un enragé, formant avec David Bermudez une section rythmique efficace, clinquante et violente. Les deux gratteux sont bons, aussi bien en rythmique qu’en mélodie pure (quel boulot sur les riffs !). Ca tricote un peu dans tous les sens, ça beugle, ça crie et ça cogne. Tous les morceaux sont teintés de cette volonté d’assombrir le propos et d’alourdir la charge, sans perdre de vue la cohérence du tout. Loin de révolutionner le genre, puis qu’avec du recul on se rend compte que les ingrédients donne une soupe heavy à tendance speed mainte fois réchauffée, le Blaze Bayley Band balance des chansons formant un tout transpirant de franchise et le père Cooke, à défaut de ramener ses morts à la vie, leur offre un hommage poignant et touchant. Reste que si ses gimmicks vocaux vous gonflaient déjà, la pilule ne passera pas et l’écoute de ce Promise and Terror restera un moment pénible et bruyant.
Il crève pas, l’enfoiré. Et mieux : il s’accroche. Blaze Bayley n’accèdera probablement jamais à la reconnaissance, parce que l’Histoire n’est pas tendre avec les "Anciens de…", et aussi parce que la musique qu’il propose, aussi honnête et bien faite qu’elle soit, manque de ce petit quelque chose de fondamentalement bluffant. Pour autant, si le groupe affine sa formule sur les bases de la cuvée 2010, nul doute que la qualité et le succès seront au rendez-vous. Et c’est possible parce que ce type là, il n’est pas près d’abandonner.