Dans le paysage du heavy metal, l’Allemagne est un pays qui tient une place tout à fait particulière. Car il y le Wacken, oui. Son ambiance, ses coutumes ou autres sont tout ce qu’il y a de plus respectable et respecté. Non, rien à redire à ce niveau-là. Et il y a leurs goûts musicaux. Sur ce point, la Science s’affaire à trouver des propriétés ou des raisons qui expliquent comment ce pays arrive à ériger en héros des groupes que le commun des mortels ne comprendra jamais. Parmi ceux-ci, il y a par exemple Sabaton. Et Paragon.
Voilà le topo : Paragon, c’est un groupe de heavy metal allemand. Vous en voulez plus ? Vous voulez dire par là que, par cette première phrase, tout n’a pas encore été dit ? Comme vous voudrez… Bref, depuis maintenant 19 ans, les teutons enchainent album moyen sur album moyen avec la régularité de la double pédale de Jörg Michael. Partant de ce postulat, trois catégories de personnes se divisent déjà. La première, qui désigne ceux qui fuient à l’idée même de heavy metal traditionnel, devrait faire mieux que passer son chemin : elle devrait fuir. Vite. La deuxième, ce sont les trve. Ces fans de heavy indécrottables qui continuent à prêcher la bonne parole à travers le monde. Les Warriors of the World (United) en quelque sorte. On pourra la confondre avec la dernière, celle des fans de heavy allemands. Ces deux là peuvent continuer la lecture. Et mine de rien, ça fait déjà beaucoup de monde en moins. Mais maintenant qu’on est entre nous. Nous disions donc : une voix entre Udo Dirkschneider et Chris Boltendahl, pas de clavier, du heavy traditionnel allemand. Cessez donc de baver au fond.
Un premier mystère se dessine déjà. Après maintes écoutes, votre serviteur n’a toujours pas réussi à comprendre comment, en vociférant des paroles sans aucune intention de faire des notes justes (ou alors, c’est quand même assez largement raté), on arrive à faire des chœurs qui sonnent correctement. Mais passons. Enfin, passons, oui ! Mais pas trop vite, sinon on aurait vite fait de n’avoir plus rien à dire. Ha si, il y a la chanson titre, up-tempo avec quelques growls qui passent bien, un refrain fédérateur, des soli bien épiques et… pas de double ? Ou si peu. Tenez-vous bien, car c’est peut-être là la seule surprise de l’album. Oui, il existe encore des batteurs allemands qui savent se tenir à ce niveau-là. Rassurons tout de suite les quelques indignés du fond : point de break funky, de lever de charleston fourbe ou autres subtilités dans ce goût-là. Sinon, bah sans casser trois pattes à un canard (monsieur de La Palice me pardonne cette phrase alors que l’on parle de heavy metal allemand), il faut reconnaitre que c’est quand même bigrement efficace tout ça.
D’autant que, si l’on y regarde de plus près, les titres offrent tout de même une variété salvatrice permettant de s’enfiler l’album d’une traite sans saigner des tympans. Même si l’ambiance est, de manière générale, plutôt sombre, le mid-tempo "Bloodfeast" nous emmène au fin fond des enfers avec ses guitares très lentes, presque lancinantes, qui rappelleraient presque le Sab’, la finesse en moins. Mais là encore, seul le false pourra arguer que ce titre est mauvais. Les soli, en revanche, sont un peu brouillons et rappellent parfois les vieux Slayer, notamment à cause d’un son qui n’est pas ce que l’on peut qualifier de très moderne. Cela dit, cette production donne à Screenslaves un cachet eighties pas dégueulasse, qui colle à la perfection avec le style pratiqué. Toujours au niveau de la variété, Paragon nous offre également quelques breaks surprenants, notamment ces arpèges dans le titre d’ouverture, "Hellgore". Notons aussi le riff plus rock’n roll de "Death Next Door" qui ne dépareillerait pas sur un album de Motörhead.
Et le constat s’impose finalement : impossible de dégager un titre réellement mauvais de ce Screenslaves. Bon, certes, impossible de dégager un chef-d’œuvre non plus. Mais mine de rien, rares sont les groupes qui arrivent à encore pondre de bons albums de heavy traditionnel en 2009. La performance mérite donc d’être signalée. Bon, ils sont Allemands, donc ils partent avec une longueur d’avance… ou de retard, c’est selon.