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CHRONIQUE PAR ...

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Cosmic Camel Clash
Cette chronique a été importée depuis metal-immortel
Sa note : 18.5/20

LINE UP

-Matthieu "MiLKa" Miegeville
(chant+claviers)

-Julien Cassarino
(chant+guitare)

-Yannick Tournier
(guitare)

-Paul Verdale
(basse)

-Brice Sansonnetto
(batterie)

TRACKLIST

1)To Be(tray...)
2)...Or Not To Be
3)Libido
4)La peur du vide
5)Teacher
6)Martin x
7)Martin x pt. 2
8)Insipid
9)L'autruche
10)Time & Space
11)Rebirth & Recession

DISCOGRAPHIE


Psykup - Le Temps de la Réflexion



Membres fondateurs du collectif toulousain Antistatic avec Sidilarsen, les doux dingues virtuoses de Psykup ont provoqué un des plus gros buzz de la scène française de ces dernières années avec ce premier album de folie. Le succès récent de Manimal n'a fait qu'attirer encore plus l'attention sur cette formation tour à tour thrash, néo, hardcore, prog ou jazz sans se disperser, affichant un niveau de jeu égal à celui des plus grands groupes internationaux, liant à une démarche très ambitieuse un sens constant de la dérision. Le Temps de la Réflexion est un album hallucinant, un de ceux qui marquent à vie. Bienvenue dans l'univers de Psykup, l'arme de destruction massive...

L'intro mélodique "To Be(tray)" hypnotise et rappellerait presque celle de "At The Heart Of Winter" d'Immortal dans son côté glacial et contemplatif. Ca monte, ça se développe, c'est juste assez trop long pour que l'impatience et le désir s'installe... puis tout nous explose à la figure avec "Or Not To Be" dont le hardcore thrashisant colle de grosses baffes de plomb à l'auditeur désemparé. En quelques secondes certaines vérités s'imposent brutalement : le son est absolument énorme, les riffs décalquent les gencives et le double chant hurlé aigu (très core) est bluffant de violence et de mise en place. Et à peine a-t-on eu le temps de s'habituer qu'un break pop/rock vient tout chambouler et que le chant clair des deux bonhommes nous impose sa classe. « Mais qu'est-ce que c'est que ce truc? » se demande-t-on, car tout de suite derrière arrive un riff bruitiste dissonant, un passage start-stop monstrueux, puis le tout repart dans ce hardcore survitaminé et ultraviolent, puis dans ces breaks mélodiques, puis l'intro revient... on est à la fois perdu et ravi, et ça ne fait que commencer.

Ju et MiLKa enchaînent comme des brutes dans leurs registres proches mais pas identiques : le premier a un hurlement plus hardcore/death tirant vers l'aigu alors que le second peut amener son growlcore dans les graves pour un résultat thrash massif et brut. Les deux hommes sont aussi bons l'un que l'autre en chant clair et leurs voix s'harmonisent parfaitement à une nuance près : contrairement à Serj Tankian et Daron Malakian de System Of A Down par exemple leurs deux voix en clair sont quasiment identiques donc même si les chœurs marchent au poil on ne peut pas parler de complémentarité. Ju n'utilise pas encore son screaming suraigu qui le place dans la ligue de Devin Townsend sur les albums de Manimal mais cela ne manque pas tant l'alternance growlcore/chant clair convient à la musique du groupe. Les deux hommes peuvent vraiment atteindre des sommets de violence, et vu que les autres musiciens (le fabuleux batteur Brice Sansonetto en tête) sont tous des monstres, c'est dire si le résultat dépote.

Partant d'une base hardcore ultra pêchue, Psykup n'a de cesse de la tordre, la remanier et lui ajouter le plus d'influences possibles pour créer une formule qu'il serait fort malvenu de limiter à une quelconque repompe de Zappa ou Mr Bungle. Chaque titre de cet album dégage une atmosphère unique malgré la versatilité incroyable du tout. "Libido" désarçonne par son côté très mélodique et planant avant qu'un final en apothéose ne vienne laisser l'auditeur exsangue. "La peur du vide" combine un esprit funkisant au hardcore le plus méchant et à des rythmiques en salves n'ayant rien à envier à Fear Factory, du blast beat et un passage rockabilly imprévisible et jouissif. Chaque titre est un peu plus déjanté que le précédent, et le hardcore à tendace prog du début de l'album finit par devenir une musique d'alien complètement barrée et "Teacher" vient enfoncer le clou, Poun et Jag de Black Bomb A venant ajouter leur folie vocale à celle de Ju et Milka pour un titre qui part franchement dans le parodique débile avant de faire déferler dans une ultraviolence jumpy irréisitible.

Mais s'il y a un titre qui se dégage c'est bien "L'autruche". Le groupe définit sa musique comme de l'autruchecore (« parce qu'une autruche, ça vole pas bien haut ») et ce morceau inouï de 14 minutes qui lie Watcha à Carnival In Coal en passant par Biohazard est une démonstration de génie, ni plus ni moins. Le talent de Psykup pour garder une cohésion et une dynamique dans un titre comportant plus de vingt plans différents explose, et on se surprendra à connaître chaque recoin de cette compo par coeur après seulement quelques écoutes. Pour le reste, c'est un sans-faute : quand il faut envoyer le bois on peut compter sur le thrash de "Time & Space" et "Insipid", et "Rebirth & Recession" invite à l'introspection grâce à des mélodies et des atmosphères enjôleuses qui assument tout à fait leur caractère pop pour un résultat vraiment joli... avant que le punk ne vienne tout casser.

Le Temps de la Réflexion est donc un album fondamental, un coup de bambou sur la face qui laisse des séquelles bien longtemps après que la dernière note s’est évanouie. Le seul reproche qu'on puisse lui faire est sa longueur excessive qui peut décourager ou faire saturer tant la musique est dense et chargée en idées diverses. Mais cela peut être tourné en avantage : nul besoin de s'enfiler ce cd d'une traite, il suffit de se laisser conquérir par des écoutes successives et partielles qui l'imprimeront pour toujours dans votre cerveau. La dose de branlette est incroyablement faible au vu du genre pratiqué et Psykup prouve avec ce chef-d’œuvre qu'on peut tout à fait se prendre la tête à composer des morceaux ambitieux sans prendre celle de l'auditeur, le tout en s'éclatant.


Car le plaisir de composer et de jouer est évident dans chaque seconde de chaque chanson, ce qui permet à cette bombe intemporelle de figurer au panthéon des très, très grands albums du métal. A ne surtout pas rater.


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