Dans ce nouveau numéro de Les Eternels Magazine, des tests, des jeux et des conseils. Surtout, nous répondons à cette angoissante question : « Mon mari est fan de black atmosphérique australien. Que faire ? » Madame, ne vous angoissez pas (tout de suite) et essayez d’évaluer le stade de la maladie. S’il prend son pied avec Aquilus, il y a encore pas mal d’espoir. S’il est passé au niveau Mesarthim, inquiétez-vous. En revanche, s’il en est au stade de The Crevices Below ou Midnight Odyssey, arrêtez de vous préoccuper, ça ne sert plus à rien. Votre mari est maintenant perdu, quelque part au-delà du Bien et du Mal, comme disait ce bon vieux Frédéric. Cherchez-en un autre. De nos jours, il y a plein de supers sites de rencontres.
Shards of Silver Fade, ce sont deux heures vingt-deux minutes de « cold wave vaguement black metal », pour reprendre l’expression horrifiée de Decline, qui n’a pas pu tenir plus d’un quart d’heure – et donc n’a pas pu finir le premier morceau… LOL. Si le black atmo australien se caractérise par être le fait d'individus seuls, écrivant des morceaux looooongs, très mélodiques tendance mainstream - en exagérant un peu - et trèèès atmosphériques - entendre, pas bien violents -, alors Dis Pater est encore plus australien que Pat Cash, Patrick Rafter, Lleyton Hewitt, Greg Norman et Dead Can Dance réunis. Composé de huit morceaux interminables, conçus comme autant de berceaux cosmiques, la deuxième œuvre grand (!!!!) format de Midnight Odyssey, est un long et lent voyage, loin, bien loin d’ici. Des contrées presque vides, où les mélodies, simples, ont tout le temps de se développer dans l’air cristallin de cette étrange planète sobre. La voix de Dis Pater résonne au loin – pour reprendre, cette fois, la description d’un vénérable forumeur à propos d’Aura, de Saor, « on a l’impression que le gars qui chante était dans la pièce d’à-côté au moment de l’enregistrement » – et contribue à cette atmosphère de paix sidérale, parfois émaillée de quelques accélérations et autres moments plus incisifs.
Et n’allez pas croire qu’il y a tromperie sur la marchandise : Dis Pater n'escroque personne, le début de l’album, où seul sa voix résonne, est d'entrée un écueil insurmontable pour tout ennemi du ronronnement cosmique. Ceux qui par contre, ont envie d’écouter le bruit de l’univers, restent et partent donc pour ce long périple – personnellement, j’ai mis quatre mois à le finir. Alors comme dans tout grand voyage, les paysages sont tous beaux, mais ils ne peuvent pas tous laisser un souvenir impérissable, certains titres valent plus par le murmure qu’ils suggèrent que par l'émotion qu'ils suscitent. Néanmoins, l’épopée de l’auditeur est jalonnée de plusieurs moments forts. Trois, pour être exact. Le premier : la seconde moitié de "Hunter of the Celestial Sea" et sa mélodie à la Muuuuse (Muse étiré en longueur). Le deuxième : "Asleep is the Fire", hypnotique à souhait, très semblable à ce que peut proposer Thy Catafalque, quand Tamás ralentit le rythme. Le troisième (et le meilleur du meilleur) : "Darker Skies Once Radiant" où les cloches initiales laissent bientôt place à quelque chose d’une ampleur rare, à une mélodie qui vous aide à respirer plus profondément et, quand le rythme s’accélère et que les nappes de claviers se font prenantes, le frisson garanti. Le titre éponyme clôt paisiblement cet odyssée, peut-être destinée aux Ents plutôt qu’aux humains.
- Ben il est où ?
- Il flotte…
- Comment ça « il flotte » ?
- Lève la tête…
- Ah ben ça alors… Il va pas se cogner ?
Shades of Silver Fade ou la solution à tous vos problèmes de stress. Respirez l’air glacé et écoutez vibrer le cosmos. C’est magnifique.