Le thrash, c’est comme tout, c’était mieux avant. Et il y a pas de Vektor qui tienne. Le thrash, c’était mieux avant, point. Flotsam and Jetsam ? Doomsday for the Deceiver et la première face - oui, face, du vinyle quoi - de No Place For Disgrace. Après ? Ben, comme les autres groupes des eighties, ça s’essouffle grandement – et ne parlons pas des remix désastreux comme le No Place For Disgrace 2014. Est-ce que le douzième – douzième ! – album de ces pionniers me fera changer d’avis ? Bien sûr que non.
Mais il y a « bien sûr que non » et « bien sûr que non ». Dans ce cas-là, c’est bien sûr que non. Mais avec une pointe d’hésitation dans la voix, parce qu’il faut reconnaître qu’ils ont mis du leur à essayer de me faire mentir, les bougres. J’en veux pour preuve le début tonitruant de cette œuvre éponyme. Le biblique "Seventh Seal" est une tuerie, de celle qu’on trouvait par paquets de douze lors de la glorieuse décennie : incisif, mélodique et efficace. "Life Is a Mess" n’est pas mal non plus, même si son départ façon "I Live You Die" effraye un peu, mais le moshant "Taser" - où la basse mise en avant fait merveille - et "Iron Maiden", le percutant hommage en mode « je brode sur "The Trooper" » au meilleur groupe de metal classique de tous les temps, sont deux bombes. De quoi jeter le discrédit sur mes affirmations péremptoires ? Noooon. On me la fait pas. Dès le deuxième titre, une prémonition pas forcément digne d’un sorcier, étant donnée la fréquence du phénomène, commence à poindre dans mon esprit aigri : « Tu vas voir que ça va bientôt s'essouffler ».
Et vous savez quoi ? Bingo. Ça s’essouffle. Épuisés par cet effort plus approprié aux jeunes de vingt ans qu’aux hommes « mûrs », les musicos s’enferment dans un power à la Sanctuary, en un peu plus musclé, le temps de trois chansons moins emballantes, sans être infâmes. Trois chansons et, bien entendu, le typique intermède instrumental absolument dispensable, si cher à tout groupe de thrash qui se respecte. Simplement, ce que je n’espérais pas, c’est que le groupe, au lieu de se traîner bon gré mal gré jusqu’à la fin de l’album, retrouve soudainement une certaine fougue qui, sans totalement égaler l’impressionnante performance initiale, fait que Flotsam and Jetsam soit un album d’un niveau global plus qu’acceptable. "Monkey Wrench" montre que le coup de mou est passé, mais ce sont surtout "Time to Go" et son refrain très Operation Mindcrime, et, dans une moindre mesure, "Smoking Gun", puis "Forbidden Territories", avec son entrée en matière dans le plus pur style « thrash mélodique US » que l’on retiendra. Bref, nous tenons là une œuvre à ranger dans le haut du panier du thrash/power actuel. Il est, de plus, plaisant de constater que le temps n’a que peu dégradé la qualité vocale d’Eric.
Conclusion : pas de quoi me faire changer d’avis, mais tout de même, les cousins américains de Dupond et Dupont ont réussi à concocter un album globalement très appréciable. Tranchant, mélodique, accrocheur, ce Flotsam and Jetsam fait partie des meilleures œuvres du groupe, des années quatre-vingt-dix à nous jours. Parce que, bien sûr, Doomsday… Oui c’est bon, j’arrête de radoter !