Hellfest 2018


Hellfest

UN REPORTAGE DE...




SOMMAIRE

Jour 1 : 22 juin 2018
Jour 2 : 23 juin 2018
Jour 3 : 24 juin 2018

REPORTS DU JOUR



GALLERY

Un grand merci tout particulier aux photographes qui nous ont également largement dépanné en photos:

Nidhal Marzouk pour La Grosse Radio Metal

Leonor Ananké pour Hard Force

Toute reproduction interdite sans autorisation écrite des photographes.

 


Jour 2 :23 juin 2018




Hexecutor (ALTAR - 10h30)
LA SORCIERRREEEE ! LA SORCIERRRRREEE !  (Arrêtez de rire bon sang !)  Réduire le set des Bretons d'Hexecutor simplement aux hurlements de son vocaliste Jey Deflagratör serait franchement facile. Clairement, pour ceux qui ne connaissent pas le groupe et leur excellent LP Poison, Lust and Damnation, la partie vocale a de quoi surprendre tant les aiguës et la compréhension de ce titre a de quoi faire rire (bon, certaines attendaient l'annonce de "Hélène Jégado" mais le titre ne sera pas joué). Mais reprenons le propos, les Bretons ouvrent le deuxième jour sur Altar et disposera d'un public répondant très présent pour prendre sa dose de speed et de thrash « à l'ancienne ». Le son est bon pour ce début de journée, même la batterie sonne dans le bon sens malgré un début de set difficile mais rapidement corrigé. C'est parti pour un gros quart d'heure de hurlements très sévèrement burnés par du riffing et une section rythmique monstrueuse. "Macabre Ceremony " ouvre le set et donne repère à ceux qui connaissant un peu l'album et fait figure de titre idéal pour les curieux ayant décidé de petit déjeuner thrash. Le head banging et les pogos sont à la fête dès le début de matinée. Le groupe jouera également "Soldiers of Darkness" et "Hangmen of Roazhon" de l'EP éponyme permettant de faire découvrir au public de la meilleur des façons de quoi les Rennais sont capable. Aigu (très), rapide, acéré et speed metal, le parfait point de départ de ce deuxième jour. 

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Black Bomb A (MS2 - 11h40)
Black Bomb A sur la MS2 en fin de matinée c'est une très bonne idée. Avant de se faire matraquer par un soleil éventuel et pouvant disposer encore des énergies du plus grand nombre, les Parisiens vont pouvoir jouer leur hardcore avec la lumière et les sourires visibles du public. Exit la poussière, les pogos se feront sur les pavés et les hasardeux slams finiront sur le « béton ». (bon OK pavés ça ne rimait pas). Disposant d'une réputation de groupe de scène avec une salle très énergique, on peut imaginer qu'en mode Mainstage le spectacle pourrait être d'envergure. Et bien l'impression est bonne car le combo débute son set sur probablement l'un de ses meilleurs morceaux, à savoir "Double" . Le riff d'intro avec ces violentes montées de voix font directement trembler Clisson et remue le public dès les premières mesures. En démarrant ainsi et en ne disposant que de trente minutes, on espère que le groupe va condenser la setlist uniquement des brûlots ayant jalonné sa carrière. Et c'est à raison, puisque que "Born to die" de l'EP Straight in the Vein poursuit le concert, suivi d'un "The Point of No Return" de Comfortable Hate, l'album qui signait le retour d'Arno au chant grave. Le groupe choisit alors de jouer un nouveau titre du prochain LP à sortir en Automne avant de conclure avec le triptyque "Police Stop Da Way" parfaitement exécuté, l'hymne enfumé de "Mary" et un « wall-of-deathé » (si si) "Make your choice" qui clôture la demi-heure avec brio. Le groupe ainsi que le public massé ont prit un pied fou, heureux pour les uns de jouer sur une Mainstage et pour les autres de voir ou revoir une nouvelle fois une talentueuse formation française qui poursuit sa carrière entamée il y a plus de quinze belles années. 


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Eskimo Callboy (12h50 - MS2)
Pour beaucoup, c’est l’heure de la pause déjeuner. Mais pour le public de la MS2, gratifié d’un soleil magnifique, c’est l’occasion d’assister à la prestation d’Eskimo Callboy, qui gagne d’emblée le titre de « nom de groupe le plus ridicule de la journée ». Inconnus de bon nombre de spectateurs, les Allemands vont livrer un set convaincant au service d’une musique qui pourrait ne pas l’être pour beaucoup. Ils officient en effet dans un mélange électro/metal assez caricatural, putassier en diable, mais qui entraînera de très bonnes réactions dans le public, ravi de se dandiner à la mi-journée sur du Britney Spears-metal. Les musiciens se donnent à fond, le son est plutôt bon, et la musique du groupe a, malgré tout ce qu’on pouvait craindre, son petit succès de milieu de journée. On assiste à une alliance contre nature de metalcore assez classique et de beats électro qui auraient largement leur place dans un best of d’eurodance, mais ça fonctionne, et les gens sont contents (la bière y est peut-être pour beaucoup). Quarante minutes et puis s’en vont, mais c’était plutôt sympathique.

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Demilich (ALTAR - 12h50)
Demilich au Hellfest ! DEMILICH AU HELLFEST !!! Hormis sa participation à un ancien festival en 2015 sur Paris, le groupe ne s'est jamais arrêté en métropole pour partager son guttural death metal. Autant dire que sa venue constitue un petit événement dans l’événement. L'année passée, le festival nous avait gâté avec la venue d'Autopsy (au concert finalement moyen), cette année l'anthologie du death rend honneur au Finlandais de Demilich.  Malheureusement et comme pour le groupe précité, l'affluence sera discrète pour accueillir ce petit bout d'histoire du metal. Ce dernier entre ainsi en scène et lance "Inherited Bowel Levitation - Reduced Without Any Effort" issu de Nespithe (en même temps, il n'y a qu'un album). Le son des guitare est parfois difficilement compréhensible et broie encore un peu plus les oreilles une fois que les vocaux si typiques de Boman sont gargarisés au micro. Dommage, car le célèbre LP raisonne malgré tout plutôt bien en conditions live. Le parterre est très assidu, quelques pogos et légers slams ponctuent le set et apportent un peu de mouvement au tableau finalement très statique. Les interactions sont rares et le jeu de scène demeure concentré sur la massivité du propos. En résumé, beaucoup seront satisfaits d'avoir vu et entendu Nespithe en live mais n'en feront probablement qu'une anecdote dans le long catalogue des groupes vus/pas vus. Votre serviteur, un peu déçu, garde le meilleur du set et de ce qui aura fait la réputation de l'album et du combo : des riffs lourds et lents, véhiculant une extrême violence, renforcée par des chants ultra gutturaux. (Ha en le disant ça va déjà mieux et on se met à réentendre  au loin un "When the Sun drank the Weight of Water" ou un "The Faces Right Below The Skin of The Earth") 

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In This Moment (MS1 - 13h35)
Le soleil est à son zénith lorsque s'abat l'ouragan impétueux In This Moment sur la Mainstage, entraîné par sa charismatique vocaliste aux airs de succube, Maria Brink. Le groupe californien, dont la popularité outre-Atlantique n'est plus à démontrer, est venu prêcher aujourd'hui en terres clissonnaises, à grand renforts d'artifices et de mises en scènes fantasmagoriques, pour son style si particulier, lancinant et lugubre à souhait aux accents metalcore et neo-metal indus. C'est au milieu d'un décor christique que la crinière blonde encapuchonnée et auréolée de la célèbre vocaliste fait son apparition, secondée par deux figurantes masquées reproduisant à l'unisson ses moindre faits et gestes ; dès lors, le ton est donné et c'est un show à la fois saisissant, théâtral et d'une impudente sensualité qui va se dérouler sous nos yeux pendant près d'une heure. Il faut dire que In This Moment a toujours su briller par son esthétique fièrement assumée dans un registre glauque et macabre à la frontière du mystique. C'est donc ainsi que la vocaliste survoltée, enchaîne les titres, endossant tantôt les rôles de prêtresse, sorcière, louve ou encore démone, son micro attaché au visage lui permettant de chanter tout en irradiant la scène de ses danses extatiques.
Ses deux acolytes féminins la suivent en véritables sosies, ondulant lascivement à travers les nuages de fumée blanche émanant de la scène, confondant parfois le spectateur dans un dédale inquiétant de corps et d'attributs féminins désarticulés. Heureusement, les quelques interactions hurlées avec le public sont là pour rappeler le rêveur à l'ordre, car le quintet est avant tout ici pour défendre sa tonitruante dernière œuvre : Ritual. Album dont la scénographie de certains titres n'est pas sans rappeler celle de Rammstein, notamment sur "Adrenalize", où l'on peut apercevoir l'écho nostalgique d'un "Feuer Frei" lorsque Maria s'empare d'un canon géant à fumée qu'elle pulvérise au-dessus de la foule.
Hélas, musicalement parlant, la magie n'opère pas réellement, d'autant que la qualité du son se trouve largement altérée par les bourrasques de vent qui consument la Mainstage depuis le début de l'après-midi, telle une présence démoniaque venue battre la mesure en canon sur les rythmes engourdis des musiciens, malheureusement guère à leur avantage. D'ailleurs, si la majorité des spectateurs semblent scotchés par les extravagances de la prestation, c'est essentiellement par curiosité malsaine et non par amour de la musique qu'ils resteront jusqu'au bout. En même temps, on ne peut reprocher à un public de métalleux aguerris d'être venus voir des concerts de musiciens passionnés et non une comédie musicale vampiresque digne d'un TV-show !

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Psykup (ALTAR - 14h20)
Allez c'est l'heure ! L'heure des chemises à fleurs ! Des bombes dans la piscine ! Du nawak ! De Psykup. Altar va prendre une toute autre ambiance sur les trois petits quarts d'heure à venir. Le hangar est plein et c'est déjà un signe que l'ambiance va être au rendez-vous.  Débarquent les Hawaïens de Toulouse. Le groupe et son Ctrl+alt+fuck de l'année passée est (re)venu de plus belle et balance l'opener de l'album après un amical titre des Beach Boys saupoudré de frisbees lancés dans le public. Les coups de caisse claires suffisent à déclencher un énorme bazar dans la fosse. Le metal hyperactif nawak est totalement violent & funky. Les sourires sont tant dans le public que chez le groupe qui ne loupe pas sa chance de montrer que, live, les compositions sont aussi burnées qu'en studio. C'est complexe mais parfaitement joué et chacun est parfaitement placé. "We Will Win This War" suit le set avant un "Do it Yourself" extrait de L'Ombre Et La Proie qui va définitivement faire péter les boulons dans la fosse. Les popotins headbanguent (ndrl : ??? les popotins ? c'est bien du nawak ça !) de partout jusqu'à un epic wall of death préparé et harangué par le groupe de la plus belle des manières. Entre mise en avant du dernier titre et un "Love is Dead" se rappelant au bon souvenir des plus anciens, le groupe fini le set sur un "Teacher" de Le temps de La Réflexion et laisse un public ravi d'avoir autant pris. Psykup montre qu'il maîtrise parfaitement les petites et moyennes scène et qu'il peut largement bouger les festivals. Délicieux.


Knocked Loose (WARZONE - 13h35)
Un peu de hardcore beatdown bas du front sur la Warzone ? On fonce ! Plus sérieusement, la curiosité Knocked Loose était plutôt préméditée, la formation du Kentucky ayant acquis une renommée bien établie dans le milieu après son premier et unique album, Laugh Tracks en 2016. Alors oui, on ne vient pas chercher la subtilité ici mais plutôt la bonne grosse mandale et le groove à foison. Pas de déception de ce côté-là, le groupe est en effet du genre assez survolté façon Converge. On imagine bien aisément le beau bazar que les Amerloques sont capables de balancer en salle avec des « stage diving » dans tous les sens. L'horaire est toutefois un peu critique avec le soleil toujours à son plus haut niveau, mais fort heureusement, la Warzone nouvelle configuration permet de s’asseoir tranquillement en gradins tout en contemplant les coreux faire les zouaves dans la fosse (et il y en avait des courageux !). Casquette vissée sur sa tête, le frontman harangue à n'en plus pouvoir cette fosse bien réactive, sur fond de riffs extrêmement velus et désarticulés. Au final, un sympathique vent de fraîcheur que ce metalcore moderne, avec du bon gros son live et de l'énergie à revendre : voilà de quoi amorcer l'après-midi sous les meilleurs auspices !

Dälek (VALLEY - 17h40)
L'un des électrons libres de la programmation. Il faut déjà avoir une bonne culture pour connaître le groupe. Il semble d'ailleurs qu'à la fin du set, seules les personnes de cette catégorie sont encore présentes. Associé au mouvement metal pour diverses raisons, le groupe n'en reste pas moins d'un registre assez éloigné. Malgré tout, les curieux remplissent une bonne moitié de Valley et attendent patiemment les Américains. Ainsi débarque Dälek doucement et le concert se lance. Peu d'expression et d'accroche font passer les premiers titres sans réaction notable. La suite n'améliore pas l'ambiance et  malheureusement Valley se vide, se vide , se vide, inexorablement au fur à mesure du set. La fosse finira après trois quarts d'heure à un quasi petit cinquième de ce que peu accueillir l'espace de jeu. C'est dommage, la discographie hip hop expérimentale laissait imaginer un spectacle de qualité mais ne parviendra jamais à accrocher - peut être en raison d'une setlist trop axée rap, justement et d'une interaction inexistante avec le public. Un des ratages du weekend. 


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Pleymo (MS2 - 18h00)
Ambiance nostalgie sur la Mainstage en cette fin d'après-midi brûlante ; on enfile les vieux t-shirts XXL troués et les bermudas informes, on remonte nos chaussettes de footballeurs jusqu'aux genoux et nous voilà parés pour honorer comme il se doit le grand retour de Pleymo après plus de dix ans d'absence ! Les plus motivés auront déjà eu la chance de revoir cette formation emblématique des années 2000 quelques mois auparavant à travers plusieurs dates françaises, notamment à l'Olympia, dont l'annonce avait fait l'effet d'une bombe sur les réseaux sociaux. Pour beaucoup d'autres cette résurrection des Bellifontains constitue une occasion de se remémorer avec un enthousiasme juvénile une époque où Pleymo enflammait toute une génération d'adolescents, braillant à tue-tête dans les cours de récré leurs punchlines juteuses sur fond de néo-metal hipopisant. Certes, ces ados là étaient peut-être un chouia marginaux, il n'empêche que pour un certain nombre d'entre-eux, Pleymo aura contribué à tracer la voie vers le portail enchanté menant à la galaxie luxuriante de la musique metal.
Les premières notes de l'hymne "United nowhere" retentissant, le groupe apparaît, remonté à bloc et figé dans une faille spatio-temporelle de début du millénaire, l'accoutrement tout comme les traits du visage n'ayant pas pris une ride (ou presque !). Aussitôt, toute la fosse se met à jumper en cadence sur le sol éprouvé de la Mainstage, emmenée par l’énergie hautement communicative des musiciens qui se déchaînent ; les paroles du morceau tombant d'ailleurs fort à propos : « tous ensemble pour que le sol tremble ! ».
La part-belle de la setlist est faite aux chansons les plus violentes des débuts du groupe auxquelles le public réagit particulièrement bien, et les « animations » s’enchaînent, initiées par le chanteur Marc qui, en véritable showman, réclame tantôt le « truc visuel » du « marteau » (consiste apparemment à planter un pieu dans le sol avec son front!) , tantôt le « plus gros braveheart jamais tenté », formulation un tantinet old-school du wall of death, collant ici plutôt bien à l'ambiance générale. Si les fans des derniers albums plus mélodiques de Pleymo resteront globalement sur leur faim, certains morceaux sauront néanmoins mettre tout le monde d'accord, comme le fameux "Polyester", parfaite combinaison entre chant clair lancinant, riffs puissants et hurlement entêtants. Finalement, à défaut d'avoir été l'un des temps forts du festival, c'est tout de même une belle performance que nous retiendrons de la prestation de Pleymo, exception faite de quelques cafouillages que nous mettrons sur le compte de leur manque d'assiduité à la scène cette dernière décennie et que nous leur pardonnerons volontiers !

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Bullet For My Valentine (MS1 - 18h55)
On poursuit ensuite dans le style baggys, buffalos et boutons avec un autre groupe révélé dans les cours de collège des années 2000 : Bullet For My Valentine ; ce quatuor pionnier du metalcore, dont le mythique album The Poison reste dans les mémoires des aficionados du style comme une référence, plus ou moins honteuse, mais néanmoins incontournable en la matière. Qu'est ce que l'on a pu chanter, hurler, headbanguer, user nos walkmans et effrayer nos parents au rythme de cet album titanesque et inépuisable des années durant !?
Cependant aujourd'hui, si notre amour du style demeure, les concerts, d'ailleurs prolifiques, de Bullet For My Valentine sont devenus une souffrance pour nous, fans de la première heure. Effectivement, ces dernières années, il a fallu assister à la déchéance d'un groupe parti des plus hautes sphères du metalcore pour dégringoler progressivement dans les facilités d'une pop-metal mielleuse et commerciale. Pourtant, on continue à assister aux concerts, comme attirés irrémédiablement par une puissance supérieure, on se dit que dans le pire des cas, on pourra toujours savourer la madeleine de Proust d'un "Tears Don't Fall" ou d'un "Waking The Demon" et que l'on saura trouver assez de force mentale pour faire abstraction du reste. Grossière erreur ! Car on en ressort le plus souvent consternés en se promettant qu'il s'agit bien de la dernière fois que l'on se fait avoir de la sorte... jusqu'à la prochaine (qui a parlé d'un concert au Casino de Paris en novembre ?!) !
Cette prestation du Hellfest 2018 ne dérogera donc pas à la règle, la déception étant annoncée avant même l'arrivée du groupe par les couleurs acidulées de l’étendard « Gravity » trônant sur le mur de la scène, dernier album en date (sorti quelques jours après le Hellfest). C'est d'ailleurs par deux titres de ce dernier-né que le groupe prend le parti risqué de commencer le show, installant le public qui était pourtant de bonne volonté, dans une sorte de léthargie contagieuse. Heureusement, l'intro accrocheuse de "The Betrayal" parvient à réveiller la fosse, qui se lance alors dans une série de « circle-pits» aux vertus cathartiques.
Si le line-up du groupe n'a plus grand chose à voir avec la formation d'origine, étonnamment c'est le petit jeunot au poste de bassiste/screamer qui retient l'attention par son énergie et son enthousiasme, au détriment du frontman Matt Tuck, qui fait surtout figure de diva à casquette affichant une attitude presque hautaine et désabusée. Finalement, arrive l'incontournable "Tears Don't Fall", aussitôt suivi d'une clameur hystérique de la foule ; si le morceau constitue un hymne fédérateur pour toutes les générations de « bullet-boys » (et « girls » !), pour les musiciens, à force d'avoir été joué un nombre de fois approchant le milliard, il semble plutôt être devenu une mécanique bien huilée, exécutée impassiblement comme l'ingrédient essentiel de leurs shows. Ça ne nous empêchera tout de même pas de hurler le refrain à tue-tête comme si notre vie en dépendait. L’enchaînement avec l'autre cultissime tube "Waking The Demon" nous permettra même de quitter le concert dans un état d'amertume enjouée.

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Kataklysm (ALTAR - 19h40)
Le groupe canadien enchaîne les albums et les tournées, passe régulièrement en France, a déjà garé son bus Tour à Clisson et nous revient cette année pour la promotion de son treizième opus : Meditations, sorti début juin. Pour beaucoup, le groupe ne propose plus rien de ce qui a fait sa renommé mais respecte celui-ci de part la qualité et la constance des concerts proposés au fil des années et des tournées. Un respect gagné sur scène où la réputation d'un « au pire, c'est bien » est acquise. Le combo joue en début de soirée soit à la quasi moitié du festival qui tourne donc à plein régime. Altar est comble et "Like Angels Weeping" ouvre le set permettant de fédérer un maximum son « ancien » public. Pour ensuite proposer des titres récents. Le son est raisonnable, mais parfois un peu gâché à la restitution par un mix difficile. Mauricio sait parfaitement haranguer le mosh pit qui ne demande que du blast et du gros riffs pour péter son boulon et sauter partout ou tourner violemment. Le death metal est convaincant sans pour autant dépasser les limitations. Même le furieux "As I Slither" pourtant emmenant sa tonne de slammeurs  n’étonnera pas son monde. Alors quoi ? Le groupe maîtrise son registre et sait parfaitement faire bouger la foule - beaucoup de combos rêveraient d'avoir le même niveau - mais une impression de déjà-vu s'installe. Loin d'être négatif, Kataklysm réussit son set ("Crippled & Broken " balance une pêche monstrueuse) mais laisse une petite attente non comblée comme si finalement la prestation était routinière, syndicale. Lassitude du groupe ou de votre reporter ? Peu importe, comme on le disait en préambule « au pire, c'est bien ». 

Dead Cross (VALLEY - 21h50)
« Du bruit ! Des grimaces ! Ouiiiiiii ! » Enfin arrive le concert de DeadCross, le projet (parmi tant d'autres pour ces types) regroupant : Lombardo, Patton, accompagnés de Michael Crain et Justin Pearson. L'horaire est parfait et la scène Valley reste un choix étonnant de prime abord, mais en vérité parfaitement adapté pour le groupe à venir. Mon comparse Core 'N Co aux longues oreilles que tout le monde aura reconnu ou pourra facilement identifier radote fièrement et « bièrement » qu'un concert avec Patton et quelque soit le combo « c'est de toutes façons ou génial ou complètement nul » (Arf ! Quel déconneur ce rongeur - oui je sais, le lapin n'est pas un rongeur mais restons Nawak jusqu'au bout). Et bien ce soir ce sera un soir réussi, impeccable tout du long du set, ce sera du grand, très grand Patton. Avec non seulement des titres d'une setlist parfaitement équilibrée et une prestation scénique à l'image du bonhomme : imprévisible et folle. Ça commence par une longue note larsen agaçante qui appelle "Seizure et Desist" le premier titre de leur album. Le groupe jouera d'ailleurs les trois titres suivants du LP. Le noise prend vie sous la basse lourde et le matraquage (incroyable) de Lombardo sur ces toms. Le public adhère immédiatement et la Valley se transfigure, tant la violence et la brutalité du propos sont mis en avant. Histoire ensuite de ne pas simplement régurgiter sa courte discographie, le combo nous propose quelques reprises plus ou moins réussies : "Dirt" des Stooges ou un ultra dynamité "Nazi Punks Fuck Off" de Dead Kennedys en fin de set. Sur scène et une fois la confiance et le plaisir installés entre le public et le groupe, 'Sieur Mike commence alors son show et échange comme à son habitude avec la foule pour trouver l'invité idéal à convier sur scène. Ce sera un enfant qui goûtera sa chance, la communication difficile mais pleine de joie entre le public, le chanceux du jour et le Patton à fleurs (rapport à la chemise « Magnum » du bonhomme) permettront de préparer un court instant de montée en puissance jusqu'à ce que chacun hurle / crie / growl à qui mieux mieux. L’intermède étant ponctué de quelques réglages de compte pipi/caca et dénigrement de Mister Johnny (Depp) présent durant le festival avec les Hollywood Vampires. C'est un peu n'importe quoi au final, mais agréable à vivre et entendre. La musique reste toutefois la principale source de satisfaction, dont un "Grave Slave" ou un "Gag Reflex" superbement exécutés et tellement plus énergiques qu'en version studio (« Gasp ! »). Et comme tout le monde attend quand même un clin d’œil au passé du batteur ou du chanteur (alors qu'une petite excursion dans la galaxie Fantomas nous aurait largement contentés), un violent et ultra court extrait de "Raining Blood" et "Epic" clôturent le spectacle. Applaudissements nourris et sourires visibles dans la fosse témoignent de la réussite du set. 

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Body Count (MS2 - 20h00)
Dire que Ice T et sa bande étaient attendus serait un pléonasme. Après une prestation monstrueuse en 2015 devant une Warzone déchaînée, après un Bloodlust incroyable d’énergie et de violence en 2017, les Américains se doivent de renouveler l’exploit et de tout défoncer en ce début de soirée sur la Mainstage 2 devant une foule imposante.
La sonnerie annonciatrice de "Civil War" retentit, et les motherfuckin’ hostilités débutent de manière idéale sur la reprise de Slayer "Raining Blood/Postmortem". Rien de mieux pour lancer la motherfucking baston, comme prévu. L’enchaînement avec "Bowels Of The Devil", venue du fond des âges, est parfait pour maintenir le niveau, motherfucker. Puis Ice-T présente tour à tour les membres de son crew, donc son fils Little Ice et lui-même, avec son nouveau nom Ice Motherfuckin’T Bitch ! C’est rigolo, mais on a déjà entendu tout ça en 2015. La bagarre, maintenant ! Les choses reprennent en force avec "Manslaughter", agressive à souhait. Nouvelle interruption, pour parler de racisme avant un autre gros morceau "No Lives Matter", mais qui semble manquer d’un poil de la lourdeur qui est la sienne sur album, Ice T ayant l’air un peu fatigué. Espérons que ce ne soit que passager, et que… Oh bordel, l’introduction de "Body Count", morceau indispensable du combo ! Circle pit obligatoire ! C’est bon, ça va aller maintenant, surtout que ça enchaîne avec "Necessary Evil", motherfucka. Quel pied d’entendre ces vieux morceaux qui dynamitent le public bien comme il faut. Les musiciens sont à bloc, notamment Ernie C, toujours aussi incisif sur sa six cordes. Et hop, un moshpit motherfucker sur "Drive By", et ça continue avec "Voodoo" et la culte "There Goes The Neighborhood". Les frissons sur le passage  « We’re here, we ain’t goin’ nowhere… »  avant le magnifique solo sur lequel Juan Of The Dead se déchaîne, grand moment de Hellfest. Pas le temps de souffler que débarque l’implacable "Black Hoodie". Puis petit instant famille où déboule encore un membre de la Ice Family avec sa fille, âgée de deux ans, moment un poil étonnant au vu du ton du concert. Qu’à cela ne tienne, "Talk Shit, Get Shot" et l’immanquable "Cop Killer" sur lequel le chanteur de Biohazard hurle le refrain, viennent clôturer un gros show de la part de la bande de Los Angeles. Le son perd en puissance et en intensité du fait du passage sur la Mainstage, mais le groupe en a à revendre, et c’est tant mieux.

Deftones (MS1 - 21h05)
Cruelle déception de votre serviteur d'avoir raté le dernier passage français des Deftones dans l'Hexagone (c'était à l'Olympia il y a un an et les avis étaient plutôt unanimes, en bien !) : ce Hellfest cuvée 2018 s'annonce donc comme une agréable session de rattrapage. Il faut cependant rappeler que la dernière production des Californiens, Gore, n'est pas des plus heureuses, pour ne pas dire ratée, ce qui ne joue pas forcément en faveur du groupe. Quelle plaisante surprise dès lors, de constater que Stephen Carpenter et sa bande ont décidé tout bonnement de faire l'impasse sur ce dernier album ! On peut même dire que le format de la setlist s'avère plutôt original avec des titres « regroupés par album » (même si ce n'est pas la première fois que le groupe s'y essaie). L'effet produit ? Une certaine cohérence pour cette formation caméléon, et un côté playlist nostalgie du plus bel effet. On commence ainsi d'entrée avec les tubes de Around The Fur en pleine face ("Head Up" en intro et son riff de destruction s'il-vous-plaît !), avant un "Swerve City" tout aussi énergique pour représenter Koi No Yokan. Après quoi, c'est au tour de White Pony d'adoucir le ton avec les classiques "Digital Bath" ou "Change (In the House of Flies)", avant d'énerver le tempo sur les extraits de Diamond Eyes "You've Seen the Butcher" / "Rocket Skates". Enfin, le groove, pour se quitter en beauté, avec trois titres d'Adrenaline dont l'outro "7 Words" qui fera « jumper » toute la fosse. S'il faut retenir un gros point positif de ce concert, c'est sans nul doute la performance stratosphérique de Chino Moreno, qui fait un peu la pluie et le beau temps du collectif. Survolté, bien en voix, au contact le plus intime des fans, il donne le sourire à tout le monde pendant le set entier. Les autres membres, toujours un peu en retrait, assurent bien le job. Aidés d'un mix assez satisfaisant, les Deftones signent au final un retour réussi en France !

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Avenged Sevenfold (MS1 - 23h25)
Il est 23h30 sur la Mainstage en ce samedi d'été, lorsque la foule compacte de fans, de curieux et d'indifférents rassemblés par dizaines de milliers pour assister au concert de la quelque peu controversée tête d'affiche, Avenged Sevenfold, voit soudain s'afficher sur les écrans l'annonce d'une minute de silence en l'honneur du batteur de Pantera, Vinnie Paul, dont le décès a été communiqué plus tôt dans la journée. Aussitôt, c'est une véritable mer de bras illuminés de briquets et de smartphones qui s'élèvent vers le ciel pour rendre hommage à la star du groupe de groove/thrash, dont retentissent les premières notes du mythique morceau qui a contribué à construire leur légende : "Walk". Les portraits du musicien défilent, tandis qu'aux quatre coins du festival les voix s'égosillent à l'unisson, clamant les paroles en chœur ; ah décidément rien n'est plus fédérateur en ce monde que la musique metal ! C'est sur une photo représentant le batteur au milieu des quatre jeunots d'Avenged Sevenfold, que se fait la transition avec le concert attendu (on les avait presque oubliés avec tout ça !).
Sur la ligne d'horizon de la Mainstage, apparaît alors toute la profondeur d'un ciel étoilé dont la nébuleuse parsemée d'astres et de constellations tout en nuances de bleus résonne comme l'écho de la voûte céleste au dessus de nos têtes de spectateurs éblouis [ndlr : Paul Verlaine en force, ce soir]. Les hordes de fans présents lors du passage du groupe à Bercy en mars dernier auront reconnu le décor thématique du dernier album, qui se déclinera en plusieurs tableaux interstellaires tout au long du concert. C'est donc sur les premières notes de son titre phare, "The Stage", que le concert s'ouvre et que surgit le très charismatique et bondissant chanteur, M. Shadows, arborant son look signature à base de casquette retournée sur bandana et lunettes noires d'aviateur. A lui tout seul, il occupe tout l'espace de la scène, virevoltant d'un bout à l'autre comme une étoile filante, interpellant le public et s’époumonant sur les envolées lyriques. Hélas, le pauvre diable éprouve, semble-t-il, quelques difficultés à donner de la voix à cause de l’enchaînement effréné des récitals précédents. Toutefois, la formation pallie brillamment cette petite faiblesse par sa niaque et son énergie, et le public, comprenant la douleur du vocaliste, s'en donne encore d'avantage à cœur joie pour chanter les refrains à tue-tête, ce qui nous vaut un concert particulièrement participatif où M. Shadows finit même par faire monter un fan sur scène afin que celui-ci le remplace au pied levé sur le célèbre morceau "Nightmare". Hasard ou artifice ? Nous sommes en droit de nous poser la question tant la prestation semble convaincante ! En tout cas, ce qui est certain, c'est que le bougre aura probablement vécu sur cette Mainstage l'un des moments les plus intenses de son existence !
Alors qu'on aurait pu craindre un manque de ferveur sur cette tête d'affiche dont le style heavy à tendance metalcore est bien moins populaire dans l'Hexagone que dans les pays anglo-saxons (le chanteur ne se privant d'ailleurs jamais de raconter à quel point lui et ses collègues ont été mal accueillis lors de leur première partie de Guns N' Roses en 2006), on côtoie finalement un public déchaîné composé de fans qui ne se lassent pas de démontrer leur combativité et leur dévotion tout au long du show !
Il faut dire que techniquement et musicalement parlant, Avenged nous livre du très grand spectacle, extrêmement rodé, où rien n'est laissé au hasard, avec une setlist qui, contrairement à ce que l'on aurait pu penser, ne fait pas la part belle au dernier album, mais se déguste comme un panorama équilibré de vingt années de carrière. Ainsi les tubes s’enchaînent : "Afterlife", "Hail To The King", "Goddamn", "Buried Alive"... toujours avec une parfaite maîtrise, ponctués de flammes, fumée, étincelles et autres fantaisies visuelles dignes d'une tête d'affiche hellfestienne. Le groupe nous offre également la deuxième séquence émotion de la soirée avec un hommage désormais devenu habituel à leur regretté batteur, Jimmy « The Rev » Sullivan, décédé en 2009 et auquel la ballade "So Far Away" est entièrement dédiée. Le concert repart ensuite de plus belle pour finir sur un "Unholy Confessions" en apothéose, le groupe démontrant encore une fois que le serpent à cinq têtes, bien qu'amputé de l'un de ses membres fondateurs, est plus solide et vivace que jamais, bien déterminé à continuer son ascension vers les étoiles, au milieu des plus grands noms de la scène metal.

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Neurosis (VALLEY - 00h00)
Neurosis est une entité à part dans le paysage musical métallique. Fondateurs et maîtres absolus d’un post-metal / post-hardcore / post- « monculsurlacommode » (choisissez la mention que vous trouvez la plus jolie, pour ma part Neurosis fait du Neurosis et se fout profondément des débats de genres), voilà plus de trente ans et onze albums que le groupe sillonne notre planète tel un héraut de l’Apocalypse, annonçant une fin du monde peu réjouissante. L’atmosphère de la Valley est emplie d’une tension palpable tandis que les musiciens apparaissent enfin et gagnent discrètement leurs postes respectifs. 
On ouvre le bal avec un "Given To The Rising" crépusculaire et massif, opener mur de son qui bastonne immédiatement. "End Of The Harvest" et le final en apothéose de "Through Silver in Blood" sont les deux piliers de ce set, titres emblématiques de leur deux albums phares de la fin des nineties. Impérieuse et massive, la musique de Neurosis semble intemporelle. Ils encadrent trois morceaux plus récents et posés qui avaient dévoilé, à leur époque, une facette plus lumineuse de la musique tissée par le groupe. Le dernier album, Fires Within Fires est, quant à lui, bien représenté avec "A Shadow Memory" et "Reach", deux titres lourds et envoûtants se mêlant à un "Burn" magistral.
Steve von Till et Scott Kelly hurlent ainsi leur dégoût à la gueule du public pendant une trop courte heure. Le groupe nous emmène dans les contrées désolées de leur discographie, excellente occasion de faire un rapide tour d’horizon de leur solide carrière. Alternant les titres lourds et plombés et les morceaux plus planants, Neurosis nous offre un set impeccable et démontre encore une fois de son statut culte, de formation incontournable et unique. On aurait aimé cependant que le voyage se prolonge, un set d’une heure et « seulement » six titres, c'est toujours trop court pour un groupe de cette trempe.

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Dimmu Borgir (TEMPLE - 01h05)
Que vaut Dimmu Borgir en live en 2018 ? Voici la question à laquelle les nombreux festivaliers amassés sous la Temple en cette deuxième nuit de Hellfest sont venus chercher une réponse. Forts d’un nouvel album qui a divisé, c’est peu de le dire, les Norvégiens vont tenter de faire l’unanimité ce soir.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les moyens sont là. La scène est noyée de brume. Dans le halo des lumières tamisées, le groupe entre en scène au son de "The Unveiling", issue de Eonian, le dernier-né du groupe. Shagrath occupe le centre de la scène, entouré des fidèles Galder et Silenoz. Le maître de cérémonie joue parfaitement bien son rôle, les musiciens également. Mais, rapidement, la prestation, pourtant de qualité, se heurte à la réalité du live et les bandes prennent le dessus. Pour un peu tout. Chœurs magistraux, orchestrations dantesques, tout est pré-enregistré. Et le sentiment de n’assister qu’à un « demi-concert » ne va faire que s’accentuer au fil des morceaux. Il va même devenir franchement gênant pour le fan de l’ancienne époque quand, à la place du chant grandiloquent de Vortex, il n’aura droit une nouvelle fois qu’à une bande avec des parties orchestrales et un chœur sur "The Serpentine Offering", "Gateways" ou encore "Progenies Of The Great Apocalypse". Là où les compositions auraient pu être magnifiés par un chanteur ou une chanteuse sur scène, il manque cruellement quelque chose : la puissance. La prestation offerte sur estrade ce soir reste cependant éclatante, renforcée d'effets de lumières et de pyrotechnie. Et heureusement, quelques morceaux souffrent moins des conditions du direct que d’autres ("The Chosen Legacy", "Puritania" ou le rappel ultime de "Mourning Palace"). L’ensemble du show est à ce point maîtrisé que le spectateur passe tout de même un excellent moment. Mais le regret persiste. Celui que le groupe ne s’entoure pas d’un orchestre ou au moins de chanteurs ou de chanteuses pour assurer les chœurs [ndlr: qu'il faut rémunérer...]. Ou qu’il n’adapte pas sa setlist pour limiter le « vide » relatif créé par les bandes. On n’est jamais content.


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