Upheaval of the Soul vient de rejoindre la catégorie de disques dont l'attente peut ne pas décevoir la patience des fans de hard. Mayhem en avait déçu plus d'un avec De Mysteriis... (7 ans après la sortie de Deathcrush) en raison de son aura au début des années 90, tandis que Metallica se faisait descendre après avoir produit cinq chef-d'œuvres (même si pour le Black Album, cela fut discuté par beaucoup de monde). Après avoir repoussé maintes fois la sortie de Upheaval of the Soul et en avoir profité pour tourner avec les figures montantes du black et du death metal (notamment avec Ritualization ou encore Temple of Baal), Scars et ses sbires recrutent Ardraos, responsable de l'exaction intitulée Nos Sombres Chapelles qui s'inscrivait dans le black médiéval entre Sacramentum et Peste Noire.
La structure de l'album nous laisse penser que le groupe a adopté un style un peu plus classique qu'aupravant : seulement six morceaux, chacun dépassant les dix minutes, les riffs s'inscrivent néanmoins dans la droite lignée du précédent album. Et mon dieu, qu'ils sont percutants, aidés par une production qui donne un rendu nerveux, à la limite de la psychose. En général, un premier album est une étape préliminaire pour déterminer le son d'un groupe, comme chacun le sait. Et pour cela, prière de se reporter à chronique de l'album R.I.P puisqu'il était question de Coroner, qui pensait avoir trouvé son son sur le bouillonnant et terrible Punishment for Decadence. Pour l'album qui nous occupe, même si la basse est assez difficile à discerner, batterie et guitares assurent une puissance tout aussi destructrice. Cette fois, Scars ne déclame plus, il ne fait que nous gratifier de son hurlement sinistre et brutal. Mais vraiment, ce qui fait que cet album ne peut être qu'une réussite, c'est l'entente parfaite entre Ardraos et Scars, les deux tueurs du black metal hexagonal. Entre les moments de grandeur, d'ambiances morbides, et la folie du batteur (qui assure une certaine variation de son jeu comme "Solitude with the Devil"), l'auditeur sait ainsi quoi penser de ce groupe qui semble à nouveau capable de surprendre. D'ailleurs, cela se ressent aussi dans les titres où la cadence est un peu ralentie.
Les colorations thrashy façon Bathory issues du premier album ont presque disparu, comme c'est le cas sur le redoutable et pesant "Black Knowledge" (qui comporte des accélérations de folie, et il faut remonter à Sarcofago pour en trouver des similaires au riff du milieu du titre). Désormais, le groupe envoie la purée, et n'oublie pas de poser un climat cataclysmique, pour rajouter du délire et surtout bien signifier que Scars ne rigole absolument pas, et cela se sent dès le premier morceau avec sa fin, sorte d'ordre qui se répète en boucle jusqu'à ce que l'auditeur finisse par régresser et se retrouve en train de dessiner un symbole à cinq branches et une tête d'un quelconque animal, sans avoir six grammes d'alcool dans le sang. Bref, oui : cela valait vraiment le coup d'attendre, surtout que les titres déjà présentés par Those Opposed Records étaient alléchants. Le moment fort restera "Demon's Breath" : riffs trémolos et batterie folle, puis un ralentissement thrash (une des seules traces, d'ailleurs), et toujours cette voix, hantée, bestiale et tentant de déclamer comme de se rapproche d'un cri normal, pour faire ressentir plus d'énergie. Après, le seul défaut véritable est que cette fois, tout est un peu plus réduit : la durée et le nombre de titres se sont recentrés sur les standards du black : moins d'une dizaine de titres, quarante minutes, et une brutalité permanente (même si parfois moins directe que sur l'opus précédent, cf. le second morceau).
Contrairement à certains groupes dont la formule prend de moins en moins au fil des albums, Christicide réussit de façon admirable l'exercice de la répétition (malgré une ambiance un peu trop proche de ce qui était déjà proposée sur le disque éponyme). Proposant enfin des variations, Scars a réussi sa mission de ne pas tomber dans le piège de la copie conforme, rien que la pochette nous donne des pistes allant dans ce sens. C'est simple : qui aurait pu soupçonner une telle direction après les symboles étranges qui parsemaient celle de l'opus précédent ? Même si maintenant, certains ont hâte de voir ce que des groupes comme Supplicium sont devenus (aux dernières nouvelles, il paraît que des changements de line-up sont survenus, et que l'ancien bassiste a participé aux projets de Wolok, autre formation black metal), il est rassurant de savoir que le boulot a été brillamment exécuté.