Certaines femmes n’aiment pas trop les hommes raffinés. Elles leur préfèrent les gars virils aux manières frustes, les durs à cuire quoi. En matière de musique métallique, il se passe un peu la même chose : certains metalheads sont plus émoustillés par des riffs directs et une musique brut de décoffrage que par des démonstrations de virtuosité ou des grands effets théâtraux. Une chose est sure : pour apprécier Coffins, une condition nécessaire est de ne pas être trop exigeant en matière d’innovation ou d’expérimentation musicale. Les Japonais nous servent avec March of Despair un vieux death old-school ultra basique, avec des morceaux de doom dedans, qui ne possède pas une once de raffinement. A priori, pourquoi pas. Mais au problème de nous servir quelque chose d’aussi peu original qu’une victoire de Nadal à Roland Garros, s’ajoute celui de la qualité, un peu déficiente.
A partir de la toute fin des années 80, le death metal évolue : certains groupes introduisent des blast-beats, d’autres des claviers. Coffins n’en a cure : leur truc, c’est le vieux death du tout début. Leur musique propose donc du « métal de la mort » inspiré par les premières œuvres de Celtic Frost (To Mega Therion, par exemple), Winter (le groupe, pas le chroniqueur) ou encore Entombed. Sur un rythme pépère propre à cette époque, Coffins commence le mini-album avec l’honnête "Till Dawn Of The Dooms Day" , dont le contenu très basique peut tout de même faire osciller la tête des fans pas trop exigeants d’un des groupes mentionnés ci-dessus. "Grotesque Messiah" est du même acabit, en plus court, mais, à l’écoute du premier passage doom, on pressent déjà ce qui peut arriver... "Carpet of Bones", le troisième titre, commence à peu près sur les mêmes bases avec une petite surprise : un court solo de guitare aux relents stoner. Et tout d’un coup, c’est le drame…
En plein milieu du troisième titre, les musiciens semblent vouloir rendre hommage à Sun O)))) et sortent un passage doom digne d’un groupe de drone, l’ambiance en moins. On a le droit alors à plus de deux minutes presque vides, vu que le batteur ne semble pas sentir le besoin de combler le manque… Inutile de préciser que, même si la chanson redémarre après, l’intérêt, lui, commence à chuter. Sur "In Bloody Swage", c’est encore pire, puisqu’en plus de refaire le coup de la panne, même le passage en mid-tempo présente peu d’interêt, le caractère ultra-simpliste du refrain le rendant vraiment fade. L’EP conclut sur une meilleure note, puisque les artistes ont choisi de reprendre "Corpsegrinder" de Death et par la même occasion, éduquent les nouvelles générations en leur montrant que le groupe du regretté Chuck Schuldiner n’a pas toujours fait dans le death technique, leurs démos et deux premiers albums donnant dans le death cru et bien membré.
Avec Coffins, les clichés sur le Japon en prennent un coup. Si dans l’imaginaire occidental, l’art nippon est synonyme de délicatesse et de poésie, March Of Despair nous ramène à la réalité, toujours plus complexe que les images d'Epinal, en sortant un EP de doom-death, aux passages death acceptables, mais aux épisodes doom carrément ennuyeux. Loin de la sophistication de leurs compatriotes de Sigh, Coffins revisite le début du death metal et, malheureusement, y incorpore des temps morts très malvenus. Si la musique proposée n’est pas, en soi, vraiment désagréable, elle ne présente pas beaucoup d’intérêt, tant ce qui est proposé a été déjà fait. Pour ce genre de remontées dans le temps, autant aller directement à la source et écouter les premières œuvres des fondateurs du death old-school et du doom-death, elles sont autrement plus captivantes.