CHRONIQUE PAR ...
Arroway's
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
18/20
LINE UP
-Loïc Rossetti
(chant)
-Robin Staps
(guitare)
-Jonathan Nido
(guitare)
-Louis Jucker
(basse)
-Luc Hess
(batterie)
TRACKLIST
1)Anthropocentric
2)The Grand Inquisitor I : Karamazov Baseness
3)She Was the Universe
4)For He That Wavereth…
5)The Grand Inquisitor II : Roots & Locusts
6)The Grand Inquisitor III : A Tiny Grain of Faith
7)Sewers of the Soul
8)Wille Zum Untergang
9)Heaven TV
10)The Almightiness Contradiction
DISCOGRAPHIE
En cette année 2010, The Ocean s'attelle à la lourde et difficile tâche de sortir deux albums successifs, qui plus est conceptuels, dont le premier, Heliocentric, malgré un bon potentiel ne m'avait pas totalement convaincue. Il faut dire qu'avec ce premier opus, The Ocean expérimentait pour la première fois deux choses : une formation musicale condensée, plus proche de celle d'un groupe que de celle d'un collectif comme ces précédentes années, et des compositions plus calmes qu'à l'accoutumée. Autant dire que l'on avait de bonnes raisons d'attendre The Ocean au tournant de la sortie de Anthropocentric.
Et c'est assurément lorsque l'on espère le moins que la surprise est la meilleure. Pas de doute, avec Anthropocentric, The Ocean délivre une nouvelle pièce maîtresse de sa discographie. Dès le titre d'ouverture éponyme de l'album, les hurlements rugueux de Loïc Rossetti nous accueillent d'une toute autre manière qu'avec sa voix chaude sur "Firmament". Le ton est donné : Anthropocentric est dense d'une énergie plus brute et plus rageuse que l'ensemble d'Heliocentric. À travers le chant notamment, qu'il soit hurlé ou clair : oubliez les sonorités rondes et chaudes, Rossetti balance des traits écorchés, saturés, grognés et même son chant clair est plus électrique. L'unique rappel du velours de sa voix se fera sur le très beau final "The Almightiness Contradiction". La plupart des morceaux sont d'une lourdeur incommensurable, tellurique : "The Grand Inquisitor I : Karamazov Baseness" est pratiquement un titre stoner, à la fois pesant, rocailleux, aux rythmiques circulaires, au chant écaillé. Et pourtant toujours avec cette patte hardcore, cette touche mélodique et précise de The Ocean qui lui donne sa personnalité.
L'album est étonnamment fluide malgré la succession de grands morceaux (souvent plus de cinq minutes) et malgré surtout sa tonalité sombre. The Ocean maintient l'équilibre en sabrant quelques riffs d'une raie mélodique plus claire ou d'une ligne vocale plus aérienne. Le solo de guitare sur "She Was the Universe" en est une bonne illustration, les notes métalliques se frayant tant bien que mal un chemin à travers les riffs épais et alourdis, ou encore son refrain qui s'étire en un ralenti qui a quelque chose de légèrement halluciné. L'album respire plus amplement grâce à la présence de plusieurs interludes calmes particulièrement mélodiques. On écoute les notes de guitares clean résonner légèrement sur "For He That Wawereth…", les mêmes que l'on entendra plus tard sur le plus développé "Wille Zum Untergang", qu'accompagne un chant aux mouvements quasi-émotionnels. Le morceau "The Grand Inquisitor III : A Tiny Grain of Faith" est un titre particulier qui évoque un style un peu décalé par rapport au reste de l'album. La présence d'une chanteuse invitée en est l'une des raisons. Pendant 1 mn 50, on entendra un rock atmosphérique un peu mystérieux avec des sonorités électroniques légèrement intrigantes particulièrement adéquates.
The Ocean fait subtilement se percuter les ambiances. Pas de manière abrupte et évidente comme pour montrer avec quelle aisance ils enchaînent les morceaux, mais plutôt l'air de rien histoire d'impulser une dynamique qui maintient naturellement le bon équilibre de l'album. Ainsi enfilent-ils "Sewers of the Soul" l'un des morceaux les plus nerveux d'Anthropocentric juste après "The Grand Inquisitor III : A Tiny Grain of Faith". L'impression laissée par la première écoute de l'album change peu : "Anthropocentric" est un excellent opener ; le duo "Heaven TV" / "The Almightiness Contradiction " conclut magnifiquement l'album en combinant l'énergie agressive d'un titre hardcore jusqu'au bout des ongles et une émotion contemplative orchestrée de manière plus acoustique vers une montée finale pour clôturer l'opus. Et entre les deux, une succession de très bons morceaux parmi lesquels on ne détecte aucune faille, qui oscillent entre des ambiances acoustiques typiquement postcore et des explosions violentes, inébranlables, rocailleuses.
Et ce n'est qu'après tout cela que l'on remarque la discrétion, si ce n'est la quasi-absence des orchestrations habituelles, des instruments classiques traditionnellement joués, de ces parties de piano si présentes sur Heliocentric. Pourquoi ? Parce que le groupe a clairement choisi – ils le déclarent eux-même – de concentrer leurs compositions autour du noyau central de leur formation, n'excluant toutefois pas quelques invités sur le dernier morceau de l'album. Et cela ne nous manque pas parce que les compositions telles qu'on les entend se suffisent par leur densité. The Ocean a très bien rempli sont contrat : Anthropocentric est une réussite.