Quatre ans sans mourir pour le métal, c'est affreusement long. Traumatisé par The Triumph Of Steel, agité de tremblements et de spasmes nerveux, le Manowarrior avait attendu en position foetale sa nouvelle dose de trve metal of fire... et rien n'était arrivé. Décharné, la peau parcheminée, baignant dans ses excréments, il a accueilli dans ses mains squelettiques ce nouvel album comme le Graal. Mais au moment de s'injecter sa dose de crack musique un doute horrible s'instilla dans son esprit : et si Manowar avait refait un album de merde ?
Parce que bon, la tendance des dernières années n'était pas jolie jolie. Le Manowarrior avait beau rester Loyal et Droit, ça faisait un bon bout de temps qu'il n'avait pas pris son pied of Steel sur un album de Manowar de bout en bout. Son espoir reposait sur deux faits marquants : déjà, le retour de Scott Columbus. Pas que ce dernier soit particulièrement bon (Rhino l'avait explosé dans les grandes largeurs sur l'album précédent), mais revenir à ce qu'on connaît c'est rassurant. D'où l'autre source d'espoir, à savoir la présence d'une chanson intitulée "Return of the Warlord". Car "Warlord" premier du nom était le seul titre vraiment puissant de Into Glory Ride : foin de conneries épiques immortelles de la gloire, juste de la sueur, des motos et de la bière. C'était le bon temps, et rien que d'y penser le Manowarrior en avait une légère érection. Autant dire qu'une fois le CD lancé, il manque de se noyer dans son propre sperme ! Car "Return of the Warlord" tient toutes les promesses de son titre : un riff de gratte basique mais surpuissant, la basse de DeMaio qui balance croches sur croches en un inlassable « crin crin crin crin crin », un break de moteur de Harley avant le solo (rhâââ!!)... et un Adams qui bascule totalement du côté couillu de la Force, mettant plus de grain dans son chant que jamais auparavant. Et c'est que le début.
Le Manowarrior, là, il prend très très cher. Parce que tous les titres de Louder Than Hell ou presque sont de cet acabit : un heavy brut, rugueux, dépourvu de fioritures et qui cogne là où ça fait mal. Adams aboie ses paroles et ne cherche même pas à mettre des notes la plupart du temps... sauf au moment des refrains, tous légendaires, tous faits pour que le Manowarrior pète les burnes à ses voisins False à deux heures du mat en chantant à tue-tête « Zeu Godz mède éviii-méTOL, enditz NAIIIIVEUUUUR GOOOONA DAÏÏÏÏÏÏ !! » ad lib. Car Manowar l'a compris : un refrain qui tue, ça doit être ad lib. Alors on le balance cinquante fois de suite, et on a RAISON. Comme on a RAISON de caser le mot « metal » dix-huit fois dans le texte de "Brothers of Metal Pt. 1", sans compter les répétitions. Et qu'on a RAISON de baser "Number 1" sur les mêmes accords que les deux chansons pré-citées. Pourquoi ? Mais parce que ça tue, mes chers amis ! Parce que le Manowarrior revit, que son poil est brillant, qu'il a recommencé à s'alimenter, qu'il est debout sur sa chaise de bureau le poing en l'air, et qu'il fait le Signe les larmes aux yeux en écoutant Eric (en lyrique pour l'occasion) lui dire que sa chanson de courage s'envole dans la nuit. Et la famille du Manowarrior qui avait déjà commencé à faire son deuil, n'est-elle pas heureuse ? Ne va-t-elle pas dire à qui veut l'entendre qu'il faut se battre contre le Monde, pour la Couronne et l'Anneau, pour le Roi ? Mais oui, mon bon monsieur, mais oui.
Et ces nouveautés fabuleuses, ne sont-elles pas le signe que le monde tourne rond à nouveau ? "Outlaw" introduit un NOUVEAU THEME POUR LES PAROLES (le far-west)... la dernière fois que c'était arrivé c'était en 1987 bon sang ! Et en plus c'est du heavy-thrash qui cogne, un peu comme "The Power" en moins bien. Parce que "The Power", attention. Entre le tempo super speed, le refrain screamé sur un seul mot et les choeurs de viking en rut sur le duo en tapping guitare / basse, c'est vraiment une boucherie. En parlant de solo, le Manowarrior aime bien Karl Logan. On pourrait croire que les accents de néoclassique dans ses leads seraient repoussants, mais non... Karl il va avant tout super vite (donc il est Fort), et il est capable de mettre le même plan de tapping dans tous ses soli sans exception (donc il est Tenace). Il est même capable de faire du shred pendant 1'16 et d'appeler ça "My Spirit Lives On", et ça le Manowarrior adhère à fond... parce que c'est beaucoup moins laid qu'un solo de basse de Joey. On distingue des thèmes dans le solo, c'est dire si c'est inédit ! Le Manowarrior adhère beaucoup moins sur "Today Is a Good Day To Die" par contre : une nappe de clavier inchangée pendant presque dix minutes c'est chiant... mais comme Manowar a pondu un album avec plus de huit titres cette fois, le reste compense largement. TRES largement.
Pour le Manowarrior, plus rien ne sera comme avant. Il a retrouvé SON Manowar, celui qui est bon parce qu'il est culte. Il peut désormais l'affirmer à la face du monde : aucun autre groupe ne peut dépasser ça, car aucun autre groupe ne peut sortir ça et l'assumer. Le Manowarrior se sent bien. Mieux encore : il a de nouveau envie de mourir pour le métal... c'est dire s'il a repris goût à la vie.