Chronique : Sabbat Mourning Has Broken (1991)

CHRONIQUE PAR ...

Merci foule fête
Cette chronique a été mise en ligne le 29 juin 2025

Sa note : 6/20

LINE UP

-Ritchie Desmond
(chant)

-Andy Sneap
(guitare)

-Neil Watson
(guitare)

-Wayne Banks
(basse)

-Simon Negus
(batterie)

TRACKLIST

1) The Demise of History
2) Theological Void
3) Paint the World Black
4) Dumbstruck
5) The Voice of Time
6) Dreamscape
7) Without a Trace
8) Mourning Has Broken

DISCOGRAPHIE

History of a Time to Come (1988)
Dreamweaver (1989)
Mourning Has Broken (1991)

Sabbat - Mourning Has Broken

(1991) - thrash metal - Label : Noise Records

La chute du thrash metal au début des années quatre-vingt-dix, quarante-septième épisode. En 1988, Sabbat sort un recueil dense et intrigant, avant d’affiner sa personnalité sur une suite toute aussi qualitative. Trois ans à peine se sont écoulés en tout et voilà que débarque un successeur. Une certaine vision de l’enfer.

Enfin, « vision » n’est pas le mot, le mal se répandant plutôt par les oreilles et l’illustration de la pochette étant à peu près le seul élément potable de l’œuvre. Enfin, « œuvre » n’est pas le m… OK, tout le monde l’a. Andy Sneap n’est pourtant pas devenu un mauvais guitariste et sort encore quelques motifs qui chopent l’oreille, comme le riff syncopé de "The Voice of Time". Mais l’inspiration reste à un niveau largement en deçà de ce qu’il avait démontré sur les deux précédents LP. Les séquences sans saveur s’empilent, les variations de tempos sont rares, la cohérence inexistante. Le son ? Claqué au sol. Dominé par une basse intempestive et une batterie surmixée, il laisse à peine entendre des guitares compressées. Oui, « des » guitares, car un second manieur de manche s’est ajouté à la bande, un certain Neil Watson. Fraser Craske, le bassiste originel, lui s’est fait la malle, de même que Martin Walkyer, barde maléfique dont le chant contribuait à singulariser la formation britannique. Son remplaçant est l'incarnation même de l’erreur de casting.
Dans un groupe de heavy metal épique, le dénommé Ritchie Desmond aurait été sans doute à sa place. Mais sur les patchworks cousus à plat qui font office de compositions, ses vocalises en enfilade font s’interroger sur ce qu’on lui a passé dans le casque au moment de les enregistrer. Du Manowar, sans doute. On ne saurait expliquer autrement le décalage abyssal entre ses lignes vocales pleines d’emphase qui font songer à un Dio chafouin et les tentatives techno thrash de Sneap qui ont fait fuir Walkyer, ce dernier n’ayant aucune idée de la manière dont il pouvait chanter dessus. On le comprend.
Le résultat est désastreux, certains passages flirtant avec la fausseté, sur "Paint the World Black", entre autres. Sans doute Sneap a-t-il estimé que la complexité était l’avenir du thrash, mais avec des guitares qui sonnent comme des épilateurs électriques en fin de vie, aucune chance d’aboutir à quoi que ce soit de décent. Et puis proposer un tel salmigondis, à faire passer Control and Resistance de Watchtower pour le dernier Motörhead et Deathrow pour des génies, ça frise la mauvaise blague. On est loin des deux premiers albums de Toxik, de la folie virtuose de Dances of Death de Mekong Delta, sans parler des divins Coroner, dont le quatrième long format sortira quelques mois plus tard. Même Time Does Not Heal de Dark Angel, tentative similaire de mettre du « cérébral » dans le thrash parue un mois auparavant, est meilleure. À tous points de vue, enfin, d’ouïe. Et nettement, en plus. C’est dire.

Son identité heroic fantasy partie avec son chanteur historique, Sabbat se perd dans une froideur pseudo futuriste qui lui va aussi bien que la tendresse à Cannibal Corpse. Grevé par un son déséquilibré au profit d’un chant inadéquat, Mourning has Broken est une litanie de plans sans queue ni tête, ni relief. Ceux qui estiment que State of Euphoria d’Anthrax est le summum du ratage succédant à un banger en matière de thrash metal n’ont probablement jamais écouté ce naufrage sonore. Comment leur en vouloir ?