CHRONIQUE PAR ...
Cosmic Camel Clash
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
15/20
LINE UP
-Gary Kelly
(chant+guitare)
-Steven André
(guitare)
-Sébastien de Saint-Angel
(basse)
TRACKLIST
1) Fear Is Better Business Than Love
2) Moly
3) Let's Die Together
4) Dance (addicted to the disco)
5) Sleep Leaves This Place
6) On the Other Side
7) The Apocalypse Shop
8) Only When Darkness Falls
9) Incognito
10) Mother
DISCOGRAPHIE
MolyBaron, ou le petit groupe de rock musclé qui monte qui monte. Depuis la sortie de ce premier album en mars 2017, la bande de Gary Kelly a bénéficié d'une exposition médiatique conséquente et d'une actualité scénique remarquable (l'Elysée-Montmartre pour leur deuxième concert, qui dit mieux ?). De quoi faire lever le sourcil et s'attarder sur le contenu de ce disque qui fait le grand écart entre Muse, U2, Rage Against The Machine, Metallica et bien d'autres encore. Un objet hybride et diablement intéressant.
Bien qu'étiqueté rock / pop-rock, MolyBaron ne donne globalement pas dans le popisant sucré, mais dans une frange plus rugueuse qui lorgne souvent sur le metal. Deux éléments sont principalement responsables de cette orientation : une très grosse prod où la basse et les guitares sont massives, et une batterie qui n'hésite pas à faire parler la double pédale ici et là. Les chansons sont articulées autour des riffs de guitare et non pas autour d'enchaînements d'accords, les solos de guitare couinent et sont une partie intégrante de la formule, les gros riffs syncopés de "Fear…" pourraient figurer sur un album de néo-metal, la fin de "Incognito" voit le tempo et les guitares taquiner le thrash-metal… MolyBaron sait vraiment cogner. Les ombres de Metallica et System of a Down planent très fort sur le riff purement rythmique de "Mother" et les couplets pleins d'emphase qui suivent, le tout s'enchaînant un peu comme par magie. Tel est le talent principal de MolyBaron : à l'intérieur d'une même chanson, ils peuvent varier les ambiances sans que rien ne tombe jamais à plat. A l'échelle d'un album, par contre, c'est moins évident.
"On The Other Side" est un bon exemple du paradoxe MolyBaron : le gros riff d'intro sonne comme un croisement entre RATM et du stoner, le couplet qui suit évoque U2, et ça fonctionne. Parfait. Sauf que juste avant on a eu "Sleep Leaves This Place", power ballade à la Placebo en plus musclé, portée par le chant poignant de Gary Kelly… et qui n'a pas grand-chose à voir avec la choucroute. Et juste après on a "The Apocalypse Shop", dont la ligne de basse cyclique et entêtante comme le couplet pop-rock aux sonorités synthétiques renvoient directement à Muse. Là encore : individuellement ça fonctionne à mort, mais quel rapport avec les autres titres du disque ? On retrouve évidemment des influences communes d'une track à l'autre, comme le Muse de "Assassin" dans "Moly"… sauf que cette influence Muse est totalement absente de la plupart des autres compos. De ce fait, le travail de chronique de cet album devient compliqué : à quoi donner la priorité ? Au fait que la plupart des chansons tuent, ou au manque apparent de cohérence de l'ensemble ? Puis on creuse un petit peu et…
…et on trouve un premier fil rouge : les gros riffs jumpy. Le riff MolyBaron se reconnaît en fait : il est gros, il est syncopé, il est efficace à mort et il fait secouer la tête. On le reconnaît dans "Dance", dans "Let's Die Together", dans "On the Other Side"… on le reconnaît un peu partout en fait. Ouf. D'ailleurs en y regardant mieux, n'y aurait-il pas une prédominance des couplets dépouillés ? Mais oui, ceux de l'énorme "Moly" et de "Incognito" sont en basse-batterie, ceux de "Fear…" à une seule guitare, idem pour "Dance" ! Ô joie, tout ça commence à prendre sens en fait ! Ce n'est pas encore une identité de groupe hyper marquée, mais ce n'est plus totalement décousu. Du coup, on peut se pencher sur les points culminants de l'album : la prépondérance et la classe de la basse, les guitares sèches improbables dans "Mother" ou le refrain de "Only When Darkness Falls" où Gary Kelly démontre une fois de plus qu'à défaut d'être le chanteur le plus technique du monde, il est vraiment très fort pour déclencher l'émotion. Et on en ressort content, finalement. Voire très content.
Ce premier album de MolyBaron s'apprivoise avec le temps, et évolue au fil des écoutes du statut de simple recueil de bonnes chansons au statut de vrai, bon album de rock métallisant. C'est au final une des très bonnes surprises de 2017, et vu le genre pratiqué et leur potentiel radio, il serait délicieux de les voir acquérir un succès mainstream. C'est tout le mal qu'on leur souhaite.