Amateurs de riffs variés, de mélodies accrocheuses et d’harmonies envoûtantes, passez votre chemin ! Blut Aus Nord ne sait pas ce que ces mots mis côte à côte veulent dire. Non. Il sait seulement qu’il veut plonger son auditeur dans le plus profond des désarrois au creux des abîmes de la solitude et du déchirement. Blut Aus Nord est une entité résumée à son unique tête pensante et cette tête est donc bien curieusement remplie. Sa vision de la musique est tout à fait unique et par là même, originale. Nous vivons dans un monde pourri, sachez le ! Toutes ces immondices jaillissent à notre face et celui qui les recrache se nomme Blut Aus Nord. Des riffs crasseux, une voix repoussante et un son immonde.
Voilà ce qui caractérise le groupe. Rien n’est beau, tout n’est que prétexte à la laideur. A l’écoute de cette musique, on n’entrevoit qu’une seule couleur, le noir absolu. Les méandres des enfers. La chute infinie dans le trou noir…Question musique en tout cas, Blut Aud Nord est très simple à décrire. Un riff répété à l’envi (soit 5-6 min par chanson… enfin non ils sont au pluriel quand même), un blast beat continu et sans break (à de rares exceptions près) et quelques apparitions spectrales du « chant ». Facile non ?
Ben pas tant que ça, car si on s’en tient à ça, cette musique est drôlement chiante… et bien non ! Au contraire, Blut Aus Nord captive son monde avec une atmosphère peu commune, oppressante, décadente et dégoûtante. Une atmosphère qui fait pencher le groupe dans un style que l’on nommerait bien black metal car cela colle à l’esprit du genre. Cette atmosphère est donc le résultat d’une recherche visiblement poussée sur les riffs, le son et le chant. Comme je l’ai dit plus haut, tous sont horribles. Mais travaillés d’une telle façon dans l’horreur que cela en devient génial. En plus, le groupe délivre souvent des intros en guise de bruit sourd, certes si communs, mais qui contribuent à créer cette ambiance maléfique.
Les riffs sont toujours excessivement simples (simplistes ?), mais on sent que c’est par la seule volonté de son auteur. D’ailleurs, souvent derrière ces riffs simplissimes sont crachés des sons inquiétants faits à la guitare, mais utilisée d’une telle manière qu’on ne peut plus parler de riff, ni même de musique. Juste du bruit d’ambiance. Et quelle ambiance ça donne ! Franchement, si vous recherchez dans la musique l’oppression, la terreur, alors vous serez servis. Par contre, si vous n’aimez que la diversité et les changements de rythme, vous risquez de vite fuir aidé en cela par la production destinée à calmer les ardeurs des moins téméraires.
Quoi qu’il en soit, une musique qui demeure d’une brutalité extrême et pas si répétitive qu’elle ne peut le laisser transparaître au premier abord. Ce qui est sûr, c’est que pour le néophyte, toutes les chansons seront les mêmes. Une seule ne propose pas de blast beat, la délicate "Chapter V", et les riffs restent très semblables les uns les autres. Mais des écoutes répétées vous feront reconnaître une certaine diversité (n’attendez pas non plus du Yes…) qui sauvent l’album de son équilibre instable sur cette fine ligne tendue entre la bouse et l’excellent. Il est excellent.
N’espérez rien d’autre de cette galette que de l’ambiance pure, de l’atmosphère comme rarement il en a été délivré car vous seriez automatiquement déçu. Un album qui fait tout ce qu’il ne faut pas faire en somme. Ceci n’est plus de la musique, et il le dit lui-même « this is the decadent work of another non-musical art »… Ah oui, cette horreur est française.