Shinray

Entretien avec Benjamin Dupré (chant + claviers) - le 16 janvier 2011

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Kroboy

Une interview de




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Comme le dit souvent mon petit cousin, un ado fan de rap que je tente vainement de convertir à notre noble musique, « le heavy, c'est un truc de vieux qui ont pas compris que les années 80, c'est fini ». Bon, ça m'énerve, mais dans un sens il n'a pas complètement tort. Heureusement, il existe des jeunes qui n'en veulent pour apporter un peu de fraîcheur, comme les Grenoblois de Shinray qui viennent tout juste de sortir leur premier EP (chronique ici). Voici la première partie d'un entretien téléphonique réalisé dans la plus grande décontraction.

Kroboy: Vous avez sorti le premier EP de Shinray. Apparemment, c'est une formation qui a été fondée sur les cendres d'autres groupes. Peux-tu donc nous refaire l’historique de la création du groupe ?

Benjamin: À l'origine, c'est un groupe qui avait été créé au lycée par quelques potes d'enfance qui avaient décidé de se mettre au metal. La formation était alors composée de deux guitaristes : Benoit, qui est encore là aujourd'hui, et Guillaume Mazzilli, un ancien guitariste qui composait beaucoup à l'époque et dont on a gardé une composition, "My Crying Heart". On avait également un chanteur, un batteur et un bassiste qui ont tous changé depuis. On s'est d'abord appelés Earthquake. Après s'être rendu compte que le nom était déjà pris, on s'est appelés Astron pendant un moment. Vu qu'on trouvait ça pourri (rires), on a changé pour s'appeler Shinray. Je t'épargne tous les changements de line-up, parce qu'il y en a eu un paquet, mais le line-up que l'on a aujourd'hui est en place depuis Septembre 2010, avec pour objectif d'essayer d'aller plus loin que ce que l'on a fait jusqu'à maintenant.

Kroboy: Justement, j'allais y venir. La plupart des jeunes groupes sortent des démos. Vous êtes directement passés à un EP. J'imagine qu'il y a eu un effort aussi bien financier qu'artistique, notamment au niveau de la pochette, etc. Qu'est ce qui vous a poussé à franchir ce pas ?

Benjamin: On s'est dit qu'avec les enregistrements qu'on avait, la qualité était suffisante pour ne pas appeler ça une démo, mais justement un EP, notamment, comme tu l'as dit, par l'effort qu'on avait fait pour présenter un produit correct avec un -certes petit- livret, quand même, une belle pochette, des photos, etc. Ca nous paraissait donc légitime d'appeler ça un EP et pas une simple démo, qui sont souvent des enregistrements fait de manière plutôt amateur, même si ce n'est pas toujours le cas. Aujourd'hui, c'est beaucoup plus simple d'obtenir une bonne production, même pour une démo.

Kroboy: Comment avez-vous financé cet EP ? Qu'est ce qui a motivé le groupe a faire cet effort ?

Benjamin: On s'est dit que c'était dommage de faire des concerts et de ne rien avoir à proposer au public qui nous en demandait plus, qui voudrait écouter du Shinray chez eux. Et nous, on se retrouvait comme des idiots avec rien à leur donner. C'est ce qui a motivé la production d'un CD. Après, l'effort financier que l'on a fait sur cet EP n'est pas si important que ça, puisque nous avons beaucoup fait de home studio. Évidemment, il a fallu acheter un minimum de materiel, mais aujourd'hui, avec tout ce qui est logiciel de production musicale, on peut arriver à un résultat assez proche d'une production pro sans des moyens exceptionnels, ce qui n'était pas possible il y a ne serait-ce que 10 ans. Par rapport à ça, on a fait de gros progrès. Finalement, au niveau de l'effort financier, nous avons peut-être mis plus d'argent dans la pochette et dans le coût de production des CD que dans l'achat de matos audio.

Kroboy: C'est vrai qu'il y a la pochette, mais même le CD est sérigraphié. Ce n'est pas le CD de base, dirons-nous. L'identité du groupe, connotée japonaise, je suppose, je ne suis pas expert en signes asiatiques...

Benjamin: Oui (rires)

Photo_Shinray_2011_1_438h_300w Kroboy: C'est quelque chose de commun à tous les quatre ? Qui est à l'origine de cette identité visuelle ?

Benjamin: En fait, nous sommes tous fans, dans le groupe, d'un jeu vidéo qui s'appelle Final Fantasy, notamment du compositeur, Nobuo Uematsu, qui est une de nos influences. Quand on a cherché un nom de groupe, on a pensé à Shinra, qui est un corporatisme malfaisant du jeu Final Fantasy VII. Forcément, Shinra c'était déjà pris, donc on a choisi Shinray, en référence à Gamma Ray. Comme ça, je t'épargne la question « pourquoi vous vous appelez comme ça », en passant ! (rires) L'imagerie en a donc découlé. Quand nous avons voulu faire le logo, la personne qui s'en est occupé a donc pensé à mettre un Kanji, qui est le symbole qui figure avec "Shinray" sur le logo. Avec tout ça, on a essayé de se démarquer de l'imagerie traditionnelle du heavy, à base d'épées et de dragons. Ce n'est pas le cas de tous les groupes, mais tu le sais bien, c'est une imagerie qui tourne en rond et qui est engluée dans des clichés qu'on a essayé d'éviter. Pour se démarquer, on s'est dit que c'était bien de commencer par l'imagerie.


Kroboy: Qui vous a fait l'artwork ? C'est un copain à vous, ou vous avez dû investir pour qu'un professionnel vous fasse ça ?

Benjamin: Nous avions effectivement des connaissances qui bossaient là-dedans. Et c'est un de nos potes qui nous a aiguillé vers Nicolas Vallée, l'auteur de la pochette. C'est un freelance, donc un pro, que l'on a payé pour faire ce travail-là et nous en sommes très contents. On ne regrette absolument pas l'investissement.

Kroboy: Effectivement, c'est une belle pochette. J'en viens à Nobuo Uematsu (NDLR : quelques difficultés de prononciation entrainent un sympathique foutage de gueule). Quand on lit vos influences, Maiden transparait dans la musique, Savatage aussi, notamment sur le piano. Mais ne connaissant pas le travail de Nobuo, en quoi retrouve-t-on son influence dans votre musique ?

Benjamin: À plein de niveaux. Car Nobuo a composé pour les jeux vidéos Final Fantasy, mais il a aussi fait d'autres choses. Autour des Final Fantasy, il y a eu des arrangements orchestraux dont on a pu s'inspirer. Il a aussi fait un groupe de reprise, The Black Mages, qui sont des reprises heavy metal de ses compos et dont nous sommes assez fans. On peut donc retrouver l'influence de Nobuo Uematsu dans le piano, dans des arrangements orchestraux et même dans les riffs de guitare. Dans "Drakkar", par exemple (qui est sur notre MySpace), il y a carrément des passages que l'on a empruntés à Nobuo quasiment tels quels.

Kroboy: C'est peut-être ça qui donne un sentiment léger à votre musique, qui n'est pas du heavy traditionnel avec les gros riffs, la grosse artillerie. On se retrouve avec quelque chose d'assez léger, assez aérien, finalement.

Benjamin: Tout dépend des compositions. Un titre comme "Earthquake" fait vachement heavy traditionnel, avec le gros riff, le refrain un peu "fédérateur", le passage calme, l'accélération finale, qui sont quand même des éléments classiques du genre. On a aussi des choses plus ambiancées, comme "Rest in Peace" par exemple, ou "I Don't Care". Sur "Rest in Peace", on peut retrouver des influences Nobuo sur l'intro, notamment. On retrouve donc cette influence dans le fait que ce soit ambiancé, « aérien » comme tu le dis, même si ce n'est pas forcément comme ça que je définirais notre musique.

Kroboy: Dans "Earthquake" par exemple, on n'a pas le son de guitare ou de batterie « à l'allemande » . Ça reste un peu plus léger.

Benjamin: Il faut aussi se dire que c'est à cause du manque de moyens. On ne peut pas vraiment se payer une production béton. Cela dit, si l'on en avait les finances, je ne suis pas certain que nous adopterions une production « à l'allemande » traditionnelle.

Kroboy: C'est ce que je me disais à l'écoute de votre musique. Ce n'est pas qu'une question de moyens, c'est aussi une question d'identité.

Benjamin: Tout à fait. Des groupes comme Primal Fear ou Grave Digger vont chercher à avoir un son hyper tranchant. Nous, ce n'est pas tellement notre cas, vu qu'il y a pas mal d'arrangements, d'ambiances, de changements de rythme, de synthés... Au niveau des guitares, le travail est un peu moins stéréotypé, on va dire. Donc on ne va pas chercher une production « in your face », avec grosses salves de double mixées à fond. Tu vois le genre ?

Kroboy: Je vois tout à fait oui ! (rires) Au niveau de l'EP, tu disais qu'il y avait une partie enregistrée en home studio, et une partie enregistrée en studio, à Grenoble je suppose.

Benjamin: Non, tout a été enregistré en home studio.

Kroboy: Ha ? Non parce que sur l'EP je voyais « Charles Tartari Studio ».

Benjamin: Ça c'est chez moi, en fait.

Kroboy: (rires) On retrouve donc le fameux second degré que vous utilisez. Je l'avais pas saisie, celle-là.

Benjamin: C'était pour essayer de faire figurer un truc un peu classe sur l'EP, mais c'est chez moi.

Kroboy: (NDLR : s'en suit un vieux fou-rire collectif) Déjà avec le fameux « Shinray is endorsed by nobody yet », on sent chez vous, même si l'EP est une démarche sérieuse, qu'il y a chez vous un côté humoristique.

Benjamin: C'est un truc que j'apprécie beaucoup chez certains groupes de heavy speed mélo comme Helloween ou Edguy. Ils savent ne pas se prendre trop au sérieux. Même si pour Edguy, c'est de moins en moins le cas, j'ai l'impression. (rires) C'est quand même important, surtout pour un groupe de notre calibre. Si on commence à se prendre la tête, à choper le melon alors qu'on en est que là...

Kroboy: Au niveau de l'EP, je suppose que c'est à cause de l'enregistrement en home studio que vous n'avez pas pu capter la batterie naturelle, vous avez été obligés de la programmer. Est-ce un regret pour toi ? Ou finalement, ça te permettait d'avoir un meilleur son ?

Benjamin: Ce que je voulais, dans la production de cet EP, c’était ne surtout pas sacrifier la qualité du son, quelles qu’en soient les raisons. Si on avait enregistré la batterie, on serait plutôt arrivé, justement, à un résultat de type démo en terme de qualité. Je préfère encore un enregistrement avec une batterie logicielle de bonne qualité plutôt qu’une batterie enregistrée à l’arrache juste histoire de dire que c’est un vrai batteur qui a joué.

Kroboy: La batterie programmée est de très bonne qualité. Ca change de Running Wild avec Angelo Sasso et son vieux rythme binaire. Le son est très correct. Comment a réagit le batteur du fait de ne pas jouer sur l’EP ?

Benjamin: Entre temps, le batteur a changé, mais c’est sûr que notre batteur de l’époque aurait préféré jouer. Nous avons essayé, sur une compo, de faire des prises de batterie et on s’est vite rendu compte que ça n’allait pas le faire.

Kroboy: Est-ce que vous avez des ambitions particulières ? Vivre de la musique est très difficile et en sortant cet EP, vous faites un premier pas concret. Qu’est ce que vous attendez comme développement pour Shinray ?

Benjamin: Comme je t’ai dit, nous avons un nouveau line-up depuis septembre. Ce qu’on va essayer de faire, c’est de choper un maximum de concerts cette année pour faire la promotion de notre EP. On a pas mal tourné sur Grenoble ces dernières années, même si c’est un bien grand mot. On a écumé les bars, les petites salles. Maintenant, nous allons essayer de nous exporter un petit peu.
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Kroboy: Ouais, jouer en Savoie (rires)

Benjamin: Bah ouais, on a trouvé un concert à Chambéry (rires). Non mais tu vois, essayer d’aller à droite à gauche. Parce que l’EP, c’est bien beau de le sortir, mais il faut essayer de le vendre. Ensuite, dès que nous aurons suffisamment rodé nos compositions sur scène, on a pour objectif d’enregistrer un album.

Kroboy: Donc suivre la démarche : chercher un distributeur, un label, etc.

Benjamin: C’est ça, exactement.

Kroboy: Tu disais que le line-up avait changé. Vous êtes donc de moins en moins un groupe de potes de lycée. J’imagine que vous avez cherché des gens plus compétents ?

Benjamin: Quand nous avons voulu trouver un nouveau batteur et un nouveau bassiste, on s’est effectivement un peu plus axés sur la technique que par le passé. Jusque-là, c’était resté un groupe de potes.

Kroboy: Et maintenant, il faut assumer les morceaux de l’EP, être capables de les faire sur scène, être carrés.

Benjamin: Voilà, c’est ça. L’objectif, c’était d’arriver à reproduire ce qu’on faisait en studio sur scène, et jusque-là, ce n’était pas le cas. Avec le line-up actuel, on va pouvoir aller plus loin que ce que l’on faisait jusqu’à présent.

Kroboy: Vous arrivez à garder un line-up avec des gens du même âge, a peu près ?

Benjamin: Oui, ça se joue à 3-4 ans près. De toute façon, le bassiste actuel, c’était déjà un pote. Et le batteur jouait dans un autre groupe avec qui l’on a joué aux Tremplins de l’Isère, que nous avons remporté l’année dernière à la Fête de la Musique.

Kroboy: Glorieusement, tu veux dire ?

Benjamin: (ironique) Pfff, même pas la peine de le préciser. Les lecteurs auront deviné. (rires) Donc pour le batteur, ça a été assez simple : je l’ai appelé, je lui ai demandé s’il était intéressé pour jouer dans le groupe, il était complètement partant. Donc on n’a pas eu trop de mal à former ce nouveau line-up. Et voilà, je ne me rappelle quelle était ta question, à la base. (rires)

Kroboy: Et maintenant, tout le monde s’implique un peu plus ?

Benjamin: Dans l’arrangement des compositions, il y a effectivement un travail plus important qui est fait. En général, il y a des compositions entières qui sont amenées en répétition et ensuite chacun va y mettre sa sauce. Quand il y a des propositions de faites, si ça plait à tout le monde, tant mieux, si ça ne plait à personne, tant pis. En général, c’est celui qui a composé le titre qui a le dernier mot. Mais d’un côté, un batteur sera plus à même de proposer une ligne de batterie qui ressemble à une vraie bonne ligne de batterie que moi, ou Benoit quand c’est lui qui compose.

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Kroboy: Et puis ça fait toujours du bien d’avoir des musiciens autonomes.

Benjamin: Oui, et puis quand tu n’es pas batteur, tu vas penser à une ligne de batterie qui sera peut-être plus basique et pourtant pas forcément évidente à jouer parce qu’elle sera moins instinctive. Alors qu’un batteur va te proposer une ligne de batterie avec un certain groove, un certain feeling, qui va apporter un vrai plus à ta compo auquel tu n’aurais pas forcément pensé...

Kroboy: ...Et lui va se sentir plus à l’aise.

Benjamin: Exactement. Il va appliquer son style. Même chose pour la basse. Avec les propositions de chacun, on va pouvoir façonner une compo pour en faire sa version définitive.


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