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CHRONIQUE PAR ...

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Lucificum
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note : 14/20

LINE UP

-Divers

TRACKLIST

1) Boguslaw Balcerak’s Crylord : Sonata in E minor,- Andante BWV 528
2) Robert Rodrigo (Airless) : Brandenburg Concerto No 4 G major - Andante BWV 1049

3) Patrik Carlsson : Brandenburg Concerto No 6 B-flat Major - Allegro, BMW 1051
4) Charly Sahona (Venturia): Orchestral Suite no 2 in B minor - Badinerie 2 BWV1067
5) Grönholm : Orchestral Suite no 3 D major - Air on a G sting BWV1068
6) Lord of Mushrooms : Well-Tempered Clavier, Book I: No. 2 In C minor, BWV 847
7) Boguslaw Balcerak’s Crylord : Orchestral Suite No.2 in B minor- Rondeau BWV 1067
8) Pier Gonella (Mastercastle): Toccata & Fugue D minor BWV 565
9) Lars Eric Mattsson : Oboe Concerto in D minor (Marcello) Adagio BWV 974
10) Mistheria : Toccata Dorica BWV 538 "Inferno"
11) Ashent : Cantata - Widerstehe doch der Sunde BWV 54

DISCOGRAPHIE


(2015) - heavy metal shred metal prog baroque metal, Bach metal - Label : Lion Music



Pour certain, un pot de Nutella représente une irrésistible attraction ; pour d'autre, ça sera un poster de Claude François, certains encore seront incapables de se contenir devant une écharpe du PSG. Tous, nous avons en nous une inavouable faiblesse qui, lorsque nous y sommes confronté, prend le contrôle de notre corps et agit à notre place, nous faisant sortir le porte-monnaie ou la cuillère sans réfléchir. Eh bien pour ma part, des reprises d’œuvres classique à la sauce metal, voilà qui me fait perdre instantanément mes moyens.

Alors quand Lion Music mobilise une partie de son roster pour faire un hommage à Bach, c'est plus que je ne puis en supporter stoïquement, et boum : je cède. Et pourtant, vous le savez d'expérience, l'exercice est éminemment casse-gueule. Peu d'artistes sont parvenus, à partir d'une partition classique/baroque, à produire quelque chose d'intéressant. En général, nous n'avons droit qu'à l’œuvre original avec de la double pédale pour un résultat navrant et triste. Heureusement, certains parviennent à décoller le nez de la partition et à proposer une relecture salvatrice de l’œuvre d'origine pour s'en faire une véritable réappropriation et proposer quelque chose de créatif et osé. Sans surprise, sur cette compilation, nous aurons droit aux deux : les flemmards qui font le strict minimum et les autres, qui auront décidé de jouer le jeu à fond.
Déjà, dans le choix des œuvres, là aussi, deux tendances : les œuvres vues et revues à la sauce metal, et d'autres choix plus ambitieux et moins évidents. Dans la première catégorie, il y a la "Badinerie" de la Suite en si mineur, dont l'interprétation est ici l'illustration parfaite de la grosse flemme. Charlie Sahona lit la partition, met un peu de double pédale et emballé c'est pesé pour la trois millième fois sur cette œuvre. Le résultat n'est pas honteux, mais bon sang : que ça soit dans le choix de la pièce ou dans son interprétation, c'est vraiment le minimum syndical. On pourrait grosso modo dire la même chose de Pier Gonella (guitariste de Mastercastle) et sa "Toccatta et Fugue en ré mineur", même si l’honnêteté pousse à dire que malgré un choix bateau, il s'en sort plutôt bien. Flemmard toujours avec Grönholm qui lui aussi marche sur les pas de Mamlsteen avec un "Air on a G String" évident, et d'autres morceaux plutôt transparents comme la version d'Ashent d'une cantate de Bach, bien amenée mais soporifique ou l'interprétation du "concerto pour hautbois en ré mineur" par le boss Lars Eric Mattsson qui, avec son son criard et son toucher si particulier, ruine la douceur originale du morceau.
Et puis dans la catégorie du milieu de gamme, on peut trouver quelques belles pièces élégamment reprises, sans réelle audace mais avec une motivation évidente. Boguslaw Balcerac nous fait ici un joli doublé avec son "Rondeau" relativement convenu mais bien amené et bien produit, mais surtout l'"Andante" de la Sonate en mi mineur – enfin un choix plus audacieux et moins pompier que d'habitude. L'interprétation est belle, créative et ponctuée de solo et d'interventions pertinentes. Carton plein également pour Robert Rodriguo (de Airless) qui, pour quelqu'un qui avoue ne s'être jamais prêté à l'exercice, s'en sort superbement avec de gros riffs, de belles envolées, du groove et du feeling. Quant à Lord Of Mushrooms, ils déconstruisent gentiment une pièce du clavier bien tempéré, sans grande audace mais de manière dynamique. Et puis il y a LE titre de cette compilation par l'un des maîtres du clavier metal – avec Kupij : Mistheria et sa surpuissante relecture de la méconnue "Toccata Dorica", initialement pour orgue. Seul claviériste de l'album - c'est peut être ce qui fait la différence dans l'approche – Mistheria réussit le tour de force de garder la base thématique tout en la tordant avec ses sons spatiaux et aériens ainsi que ses guitares puissantes, en faisant un morceau contrasté, majestueux, élégant et redoutable.


Sans surprise donc, résultat inégal sur ce concept. Déjà, on regrette que tout le roster Lion n'ait pas été mis à contribution – on aurait adoré entendre George Bellas, Daniele Liverani ou Joe Stump se prêter à l'exercice. Globalement, le niveau est plutôt haut et l'objectif atteint, les meilleurs interprétations faisant doucement oublier les travaux minimaux de certains musiciens. L'interprétation d'un thème baroque étant souvent une affaire d'appropriation : les meilleures reprises étant faites par ceux qui ne se contentent pas des notes écrites par Bach mais digèrent la musique avant de la rendre transmuée par leur vision personnelle de la chose - certains l'ont bien pigé, d'autre moins.



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