Tiens, tiens, tiens, John Wayne… Sur les Eternels ?! Mais c’était pas un musicos lui ! Et puis, il est pas mort depuis trente-cinq ans ? Eh bien si, et il a choisi de se réincarner dans le monde metallique. Bref, trêve de plaisanteries, comme vous l’aurez compris, il ne s’agit pas ici de la célèbre gloire américaine des années 50, mais d’un groupe de Deathcore originaire de Saõ Paulo, au Brésil. Rien à voir donc. OK, à priori, le nom attire forcément l’attention. Mais qu’en est-il de sa musique ? Eh bien elle vaut le détour également. Même si elle est loin d’être atypique, elle est aussi loin de la médiocrité. Après un EP éponyme de quatre titres en 2011, John Wayne sort son premier vrai test un an plus tard, sous le nom de Tempestade, d'une durée d’un peu plus de trente-cinq minutes.
Cette chronique est un hommage aux Brésiliens encore sous le choc de la coupe du monde 2014 sur leurs terres, afin de leur redonner un peu de baume au cœur, en ces temps difficiles.
Attention, ici il ne sera certainement pas question d’un Sepultura, d’un Soulfly ou d’un Cavalera Conspiracy en termes de genre. Le style diffère complètement puisque nos Paulistas nous livrent un Deathcore empreint de Metalcore légèrement mélodique. On ressent par moment des influences de Parkway Drive au niveau des rythmiques -core, ou d’Unearth au niveau des mélodies. Des compos assez aérées, pas mal d’harmoniques, une basse bien audible, quelques pigs squeels bien placés, des soli, une batterie assez soutenue et pas trop omniprésente, des petits breaks bien sentis : voilà en gros la recette de John Wayne. Mais pour être sincère, elle marche un temps seulement. Entre la deuxième et la huitième chanson, on s’emmerde un peu. Non pas que les chansons soient mauvaises, loin de là, mais aucune ne ressort vraiment du lot. On va dire qu’elles restent honorables, sans casser de briques. En clair, ça commence sur les chapeaux de roue avec le titre éponyme "Tempestade", avant que la tension ne retombe sèchement. Et ça finit en trombe à l’aide de trois des meilleures chansons de l’album : "Prague a Paz", "Talvez o Amanhã" et la chanson finale "Aliança". Ou l’art de savoir bien se rattraper. Bien sûr, encore une fois – et ça devient une (sale) habitude – on a le droit à une introduction, assez courte heureusement, nommée "Tormenta", et qui n’a pour autre but que de tenter, vainement, de mettre dans le contexte de l’artwork du groupe. Mais ce n’est pas tout, puisqu’on a également la chance d’avoir une piste interlude en septième position avec "Trégua", qui ne sert quant à elle strictement à rien.
Mention spéciale pour la dixième et dernière chanson de l’album : "Aliança". On peut y apprécier la présence de deux featuring en la personne de Bruno Figueiredo du groupe Waves et celle de Rodrigo Brandão du groupe Gaia. Le premier nous fait part d’une excellente voix claire qui adoucit la composition, tandis que le deuxième s’occupe d’un chant un tantinet rap mais avec une sonorité punk. Pour exemple, à 2’15, on croirait presque entendre le groupe de punk brésilien Ratos de Porão, tant au niveau du ton de voix que de la façon dont est débité le texte. En y ajoutant les voix du frontman de base de John Wayne, cela donne un mélange hybride tout à fait réjouissant qui vient mettre en contraste le reste de l’album. Vraiment pas désagréable, c’est une excellente idée même qu’ont eut nos compères puisque le refrain en voix claire vous fera accrocher directement et vous restera bien en tête ! J’en profite pour m’arrêter sur les paroles du groupe. Celles-ci traitent clairement de la religion, et du christianisme en particulier. Ceci, à mon sens, n’est pas une grande surprise quand on connaît l’origine du groupe et quand on sait que la religion chrétienne (et à fortiori catholique ici) a une place prépondérante dans cette puissance mondiale qu’est le Brésil. En témoignent des titres comme "Ascensão", "Retrato da Nossa Miséria", "Pregue a Paz" ou "Aliança". Les gars sont clairement croyants et leur musique est un moyen de véhiculer un message de paix et de tolérance. La pochette de Tempestade aurait peut-être suffit à certains pour deviner l’orientation du groupe, puisqu’on y voit une statue d’une Vierge Marie ensanglantée, dans un cimetière, une nuit de tempête.
Tiens, et si on parlait de la langue utilisée par Fabio Figuereido? Il est vrai qu’aujourd’hui, quelle que soit l’origine des groupes, ceux-ci ont tendance à écrire leur texte dans la langue internationale afin de se faire comprendre du plus grand nombre. Quelques groupes scandinaves font encore exception pour des raisons que nous n’évoquerons pas ici, le hors-sujet menaçant d'être total. Tout ça pour dire que nos gaillards ont eu l’idée et le courage de garder leur langue natale, le brésilien (légèrement différent du portugais mes amis), et grand bien leur en a pris, car le rendu est vraiment bien foutu. Sortir des sentiers battus ne fait jamais de mal. L’élocution du frontman est particulière et le fait qu’elle ne soit pas régulière et plaquée sur les instruments donne une bonne sensation. Il sait parfaitement alterner entre voix grave et voix aiguë. Cette dernière a même tendance à se rapprocher d’une voix d’un chanteur black, par son côté quelque peu éraillé. Allez vérifier vous-même sur les premiers couplets de "Talvez O Amanhã" à partir de 0’20 : « le Um grande erro cometido » est déclamé avec toutes les tripes que comportent le corps de Figuereido. Sors de ce corps Varg Vikernes ! C’est cette ferveur et cette conviction qui font plaisir à entendre. Un peu comme quand le public et les joueurs brésiliens entonnaient l’hymne national…
Au final, John Wayne et son Tempestade laissent un peu le même sentiment que l’équipe du Brésil pendant le mois de juin-juillet… Une bonne équipe avec du talent et du potentiel, mais pas exploités au maximum. Et surtout, de la suffisance pour passer les matchs à élimination directe. Alors, la dernière chanson (avec les featuring) pourra être interprétée dans deux sens : soit elle vous mettra une claque amère, du genre 7 buts à 1, ou alors vous relativiserez tout simplement en vous disant que finalement, une place au pied du podium, ce n’est pas une infamie, ni une vergogne sans nom. Personnellement, je reste plutôt sur la deuxième sensation en attendant mieux de leur part à la prochaine compétition… enfin lors de leur prochain album quoi, vous m’avez compris.