CHRONIQUE PAR ...
Droom
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
20/20
LINE UP
-Andy Marshall
(tout, sauf mentions ci-dessous)
-Nevena Krasteva
(alto sur "Farewell")
-Beth Frieden
(chant Gaelic)
-Johan Becker
(cordes)
-Austin Lunn
(batterie+bodhrán)
TRACKLIST
1) Children of the Mist
2) Aura
3) The Awakening
4) Farewell
5) Pillars of the Earth
DISCOGRAPHIE
Saor (ex-Àrsaidh) est le vecteur d'un sentiment particulier. Un sentiment de liberté absolue, entre gloire et mélancolie ; quelque part entre les grands espaces et le meilleur de soi-même. Du fin fond de l'éternelle Écosse, l'homme derrière Saor vient - peut-être sans le savoir - d'offrir au monde l'une de ses plus belle représentation. La dernière fois que quelqu'un pouvait se targuer d'en avoir fait autant, il s'agissait de Neige, à l'époque des Souvenirs d'un Autre Monde.
L’impression dominante, lors de la première écoute d'Aura, est celle d'une puissance folle, dévastatrice et élémentale. Comme le souligne l'introduction de l'album, le vent souffle fort, tandis qu'embruns et pluie se mêlent dans une tornade aux proportions inhumaines et choquantes. Je n'ai jamais autant été chamboulé par un jeu de trémolos. Jamais été autant plaqué au sol par une batterie usant de la double. Très vite, cette sensation de force inaltérable laisse place à - cohabite avec ? - la tranquillité, son revers naturel. Le retrait - défense réflexe - face à un monde en rage, reprenant sa juste place. C'est là que se trouve toute l'intelligence du projet. Dans la superposition de pistes de flûte (enjouées et mélancolique), de synthétiseurs jamais intrusifs et de chants parfois growlés (mais semblant venir de très, très loin), parfois éthérés et calmes. Entre black metal atmosphérique et musique celtique traditionnelle, Saor semble avoir trouvé sa place naturelle et rend le meilleur hommage qui soit tant à ses influences musicales qu'à sa terre natale.
C'est que l'homme - Andy Marshall, un écossais dont le nom mérite d'être cité - sait où il souhaite emmener son auditeur tout au long de ces cinq pistes d'une durée moyenne de dix minutes. La construction de chacune d'entre elle est exemplaire. Les morceaux vivent et jamais ne suscitent l'ennui. Nous avançons la tête haute, Saor à nos côtés : invincibles et l'esprit ouvert. Longues, les pistes sont pourtant identifiables très rapidement, chacune d'elle possédant une âme propre. La douce violence de "Children of the Mist" laisse place à la mélodie de guitare aérienne d'"Aura". "The Awakening" transcende le genre à l'aide de chœurs immémoriaux - magnifiques - avant que "Farewell" ne nous enchante par le calme et la mélancolie de mélodies qu'on croirait venir d'Alcest. "Pillars of the Earth", enfin, clôt un disque comme il avait commencé : entre guerre et paix, entre communion avec le monde et introspection. Différents, les morceaux sont pourtant d'une cohérence rares ; tous étant liés par un élément commun : le mariage de la puissance et de la beauté.
Ne cherchez plus le disque idéal pour partir en randonnée solitaire dans les Highlands : vous l'avez trouvé. Aura est une œuvre d'une puissance rare. Visuel, voire sensoriel, le disque se suffit à lui-même et créé un univers qui ne peut que parler à chacun d'entre nous. L'homme et la nature sont au cœur de ce beau projet, qui n'aurait même pas besoin de suite pour être mémorable. Merci, Saor.