« If you’re curious to see what a band of nerds can pull out by mixing their different musical tastes, then catch us out ». Memento, premier album digne de ce nom pour ce jeune groupe qu’est Ready Set Fall, né en 2010, et qui commence tout doucement à se faire connaître, c’est justement ça : des titres fortement influencés par des genres allant du hardcore au metal extrême, en passant par des structures plus conventionnelles. La galette présente à la fois des versions remastérisées de l’EP paru en 2011 tels "Buried Alive" ou "A.N.S.I.A", mais également de nouveaux apports, bien entendu ! Quid donc de cet opus dont la simple imagerie préfigure flammes, chaos et destruction ?
Se disant inspirés par des groupes comme In Flames, Killswitch Engage ou Spoilworks (avec lesquels ils rêveraient de partager l’affiche mais reconnaissent en même temps que les groupes sus-visés leur botteraient gracieusement l’arrière train – touchante humilité), nos gaillards, qui s’auto-proclamment alternatif metal et melodic death, n’apportent peut-être rien de neuf au(x) genre(s), mais on se doit de reconnaitre qu’ils envoient la machine directement dans le sphère du, pour être trivial, « démolis-moi les sens avec violence, j’aime ça ». On retrouve tous les éléments de base : une énergie à couper le souffle qui ne s’affaisse à aucun moment de l’écoute, les bons growls qui déchirent les cordes vocales, les riffs, certes très classiques, mais toujours efficaces, et une batterie qui menace de crever ses caisses sous les assauts de l’artiste. Normal me direz-vous, c’est un peu ce que l’on attend d’eux. Ajouter à cela que la composition est d’une grande homogénéité, ce qui en soi n’est jamais un luxe, peut-être même risquerons nous de dire qu’elle est un poil trop lisse et qu’il faudra un certain nombre d’écoutes pour véritablement apprécier pleinement la chose.
Rien de neuf donc, mais pourtant, il y a un petit truc très simple qui fait que l’on ne s’ennuie pas : ce groupe a du talent, à n’en point douter. Tout particulièrement, notre bonhomme Volpi, qui passe aussi aisément du chant growl, merveilleusement rageur dans les couplets, au chant clair, poignant à souhait, dans les refrains. Sa parfaite maîtrise de son organe vocal a d’emblée tout pour séduire et ce dès le premier titre "Deceiving Lights", qui s’imprime d’emblée dans nos esprits secoués. Et inutile d’attendre 10 secondes pour être embarqués dans un flot bouillonnant. Tout l’album n’est justement qu’un concentré pur de rage, de désir de rébellion totalement avorté, de désillusions et d’espoir qui file. On peut se prêter au jeu de visionner les clips associés à "Buried Alive", ou "Labyrinth" où l’on observe à loisir le groupe qui nous délivre toute son énergie et en arrière-fond, illustrés simplement par le biais d'une imagerie très épurée, l’incapacité d’agir, l’enfermement, la peur et la fatalité ; "Skycrapers" encore, à la mise en scène plus élaborée et qui met l’accent cette fois sur la honte, le rejet, le sentiment d’inutilité et d’injustice, conduisant à l’explosion et au meurtre, ici, simplement suggéré.
Aucun morceau ne fait exception à cette rage pure qui est distillée dans nos veines, le groupe exulte pour nous. Quelques touches mélodiques simplement viendrons apporter quelques secondes de répits, comme dans "Tidal Wave Could Save The World" ; une légère éclaircie encore dans les quelques secondes d’introduction de "Is This A Happy Ending", mais toujours pour mieux nous embarquer dans cette tourmente. "Temple is Me" se jouera quelque part de nos émotions, alternant quelques touches d’instrumentation presque joviales, pour sombrer ensuite dans cette même agressivité et cette profonde désespérance, savamment alternées, « No words to express my feelings », voici une phrase qui résume finalement assez l’état d’esprit dans lequel nous plonge ce morceau. A noter que les paroles de ce titre sont particulièrement saisissantes, je vous invite à vous y plonger et à les méditer, de même que celles de "A.N.S.I.A" (dont on appréciera d'ailleurs la petite échappée instrumentale finale), car pour ne rien gâcher à la fête, mêmes les textes sont fort bien soignés.
« La violence sucrée de l’imaginaire console tant bien que mal de la violence amère du réel » pour faire dans les jolies citations. Cet album n’a rien d’original, il s’écoutera simplement pour le plaisir de se vider les sens, mais en cela, il est d’une grande efficacité, répondant parfaitement aux attentes du genre. Sur cette impression, l’on ne peut que souhaiter à nos gaillards de poursuivre leur route et qui sait, de se targuer d’apporter dès leur prochaine composition, le petit plus en sus de l’énergie fulgurante qu’ils savent déjà déployer et qui saura les démarquer véritablement et les pousser un peu plus haut.