CHRONIQUE PAR ...
Droom
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
18/20
LINE UP
-Matti
(chant)
-Jani Kekarainen
(guitare)
-Eero Pöyry
(claviers)
-Lasse Pelkonen
(batterie)
TRACKLIST
1) Sign of a Storm
2) Pouring
3) By Silent Wings
4) The Rising of the Flames
5) The Gallant Crow
6) The Everdarkgreen
DISCOGRAPHIE
Certains voient des « tâches de couleurs » sur l'artwork de ce Stormcrowfleet ; j'y observe plutôt un... dinosaure... alien... quelque chose (rien que ça). Certains se plaignent du « bruit » (les plus polis), d'autres s'étonnent de cette « daube » (les plus poltrons) ; j'y découvre plutôt une musique étrange, quasi-mystique. Lorsqu'il est question de Skepticism (et de funeral doom en général, mouvement dont le groupe figure parmi les pionniers), toute appréciation semble fondre derrière le ressenti de chacun. Ce qui m'arrange bien et me décharge de toute déception liée à une écoute post-chronique. Elle a bon dos la subjectivité tiens.
Je vous épargne la genèse du genre et l'étude des multiples formes de doom metal pour resituer brièvement la situation. En 1994, Thergothon, groupe finlandais, sort son unique album, Stream From The Heavens, le premier album de funeral doom jamais écrit. Le groupe se sépare en 1992. Oui, deux ans avant la sortie de l'album. On est comme ça chez les doomsters. Retour en 1995, toujours en Finlande. Cette fois, c'est au tour de Skepticism de sortir son premier longue-durée. Inutile de le nommer, vous aurez reconnu Stormcrowfleet. Descendant direct de Thergothon (influencé par ou inventeur simultané, je ne saurais le dire), Skepticism est le second pilier du funeral doom. La musique est lente, très lente, la production est sale, cotonneuse, vaporeuse, le chant est grave, beaucoup trop pour être compréhensible. Bref, dans ses codes, Skepticism est extrême. Et lorsqu'on imagine qu'en cette même année 1994 cartonnaient le Burn My Eyes de Machine Head ou le Youthanasia de MegaDave, on prend conscience du pied-de-nez énorme que jetait Skepticism à la face du monde. Ou... ou peut-être bien qu'ils se fichaient du monde - qui le leur rendait bien - et préféraient jouer ce dont ils avaient envie.
Donc voilà. Les éléments caractéristiques de la musique de Skepticism ont déjà été mis en avant au-dessus : lenteur et brume. Fort bien. Mais ce n'est pas tout : Stormcrowfleet, tout fondateur de l'un des genres musicaux les plus austère qu'il soit (encore que ce point prête à discussions si vous me demandez), n'est pas noir. Stormcrowfleet ne cherche pas à vous abattre. Loin de là. Car au milieu de cette lenteur tellement marquée qu'elle en devient lénifiante, aliénante, un clavier pose ses nappes sereines. Et c'est LA bonne idée du groupe. Celle qui fait la différence. Ce clavier, qui accentue encore un peu l'aspect shoegazeux et brouillé du propos, donne au disque la teinte que je leur préfère, celle qui fait surement une grande partie du charme de ce premier essai : le clair-obscur. Pas de noir ébène (pour ça, cf. Farmakon, du même groupe), jamais, car bien au contraire, Skepticism illumine ses compositions d'un enrobage céleste, quasi-mystique je disais. Autre paradoxe du groupe donc, qui est tellement extrême qu'il perd son agressivité potentielle.
Il serait bien dommage de s'arrêter net face à une production déjà terriblement vieille pour l'année 1994 et ne s'étant nullement arrangée avec le temps. Cet élément pouvant sembler repoussant est, en fait, ce qui fait une bonne partie de l’intérêt de Stormcrowfleet et de sa musique qui s'étire, qui s'étale en nappes, qui contemple et prend son temps. Pour illustrer et clore le propos en paroles, un extrait de "Pouring" : « Light was weakening / Grey was the curtain / Wide were the shores / Of the grey and green seas / It was final. » - Reposant. Comme l'est ce monument du doom.