CHRONIQUE PAR ...
TheDecline01
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
16/20
LINE UP
Smohalla
-Slo
(chant+guitare+batterie+claviers)
-Camille
(basse)
Omega Centauri
-Svograth
(chant)
-Tom Vallely
(guitare+basse+batterie+claviers)
TRACKLIST
Smohalla
1) Sa voix transperce nos fronts
2) La main d'Abel
3) Ô déluge
4) Les passagers du vent
Omega Centauri
5) Naissance
6) Submission
7) Desuetude
DISCOGRAPHIE
Un split, voilà un exercice auquel nous n'assistons plus trop, en dehors de l'underground. Ici, il s'agira également d'underground puisque aucun des 2 groupes ici présents ne dispose franchement d'une grande popularité. Pourtant d'underground nous ne traiterons pas spécialement vu que le propos est ici à ce qui est qualifié d'avant garde black metal, en même temps que d'enregistrements plus qu'honorables. Attendez, avant-garde black metal ? Ohlala, va-t-il falloir citer Arcturus alors ?
Ce sera l'impensable suspense de cette chronique et les débats sont ouverts par Smohalla, formation française qui nous fait dire que décidément, notre beau pays est un terreau fertile pour le black metal sous toutes ses formes. Car Smohalla est typiquement en plein dans la veine avant-garde avec des claviers omniprésents et spatiaux. Les riffs sont à l'avenant, complexes, recherchés et souvent météoriques. Le chant pour sa part se rapproche fortement de Drautran, tout comme la musique d'ailleurs dans ses passages les plus énervés. Claviers et riffs raffinés ont envie de nous faire dire le mot qu'on ne devrait pas, mais soit : Arcturus. Oui oui, nous entendons du Arcturus version La Masquerade Infernale, mais pas totalement là où on l'attendait. Il s'agit plus du son global que des compositions car Smohalla est incontestablement plus rapide que les Norvégiens en ne ménageant pas ses humeurs blastées. Bien sûr, le blast demeure minoritaire mais le ton est donné. Qui plus est, les riffs ont une connotation death marquée pour certains même si la tendance globale du son est à la clarté et donc portée sur les aigus. Le chant marque une différence également puisqu'il se fait rarement clair, privilégiant plutôt le raclé black. Et surtout, Smohalla est plus intrépide que son illustre aïeul, ses compositions étant incontestablement plus avant-garde que ce qu'a pu proposer Arcturus. Le groupe pousse ainsi le vice jusqu'à proposer une piste basée sur les claviers uniquement, mariage de trip-hop, Burzum et electro des années 80. La réalisation globale est magnifiquement exécutée et c'est trop rapidement que nous en voyons la fin. 4 chansons au format compact qui donnent indubitablement envie d'en entendre plus.
C'est alors au tour de Omega Centauri (qui comme vous le lirez partout est bien un amas globulaire de notre Galaxie) de débarquer sous des atours surprenants au premier abord. Car de nos attentes avant-gardistes, l'éclat vole. En effet on se retrouve face à un riff et une production crade typiques black metal. Mais que se passe-t-il ? Mais que se passe-t-il ? Mais qu'est-ce qui se passe ? Rien de grave docteur, le groupe anglo-suédois cale bien vite un break sans rapport avec le black metal et étale sa chanson sur de nombreuses minutes enveloppées d'une atmosphère lourde et stratosphérique, tutoyant les étoiles. Bien plus linéaires que celles de Smohalla en apparence, les compositions de Omega Centauri se développent dans le temps en le prenant largement. Sans s'écraser sous son propre poids technique, le groupe multinational parvient à créer des ambiances riches et complexes en ignorant les détours et retours d'un genre qui aime manier (et peut même se complaire dans) la richesse instrumentale. Ici, si bien évidemment nous ne versons pas dans le black metal primaire, la richesse vient réellement d'ambiances puissantes et prenantes. Plus brutalement black metal par moment que Smohalla, Omega Centauri, en se faisant plus discrètement avant-gardiste, est peut-être finalement plus aventureux dans son approche de la modernité. Rien n'est foncièrement évident dans cette musique qui s'étale sans jamais détaler et qui ressasse sans rassasier. Des écueils ? Oui bien sûr, à trop prendre son temps Epitome peut ennuyer, mais il faut saluer cette démarche jusqu'au-boutiste qui a le mérite de porter ses idées à leur terme. Cela ne plaira pas à tout le monde, mais il est à parier que ceux qui flashent le feront totalement. A noter le fantastique riff à la guitare sèche de "Desuetude" sous fond de pluie qui tombe, totalement désenchanté qui rappelle le groupe de rock indé Slint.
Ce split est une merveilleuse et fantastique occasion de découvrir 2 groupes qui montrent 2 facettes bien différentes de ce que peut être l'avant-gardisme dans le black metal. Spatial et torturé d'un côté, lancinant et subtil de l'autre, on aboutit à un album certes dual mais bien complémentaire. On a envie d'entendre chacun de ces groupes sur des albums longue durée bien à eux, mais on prend un sacré pied à les entendre réunis.