CHRONIQUE PAR ...
Droom
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
14.5/20
LINE UP
-Nico Faglia
(guitare+basse+claviers)
-Andrea Freschi
(batterie+claviers)
-Matteo Risi
(guitare)
-Mauro Berchi
(chant+claviers+guitare+basse)
TRACKLIST
1) Calma
2) .
3) Onore
4) .
5) Noia
6) .
7) Terrore
8) .
9) Ragione
10) .
11) Oblio
12) .
13) .
14) .
15) Lascivia
16) .
17) Umiltà
18) .
19) Concupiscenza
20) .
21) Esitazione
DISCOGRAPHIE
Classiquement, le rôle de l'introduction est de poser les termes du problème. Elle doit permettre d'arriver dans le cœur du sujet. Pour certains, cette étape est une véritable purge tandis que, pour d'autres, elle est le plus fin des plaisirs. Il faut dire que l'album concerné joue pour beaucoup et provoque chez le pauvre chroniqueur plus ou moins d'inspiration. Pour Contro.Luce, sixième album des Italiens de Canaan, autant dire que l'introduction ne va guère être compliquée. Pour informer autant que pour captiver, il n'y à qu'à citer les noms qu'évoque l'écoute de cette heure de musique : Novembre, Sigur Ros, Esoteric, Tangerine Dream, Tenhi... Là, les termes du problèmes sont posés.
La musique de Canaan est difficile à cerner. Pour faire large, Contro.Luce propose un (dark) ambient à l'Italienne, creuset dans lequel se fondent les groupes sus-cités, sorte de synthèse entre le spleen d'un vieux Katatonia (mais musicalement assez éloigné, attention !) et le gothique. Jouant tant avec les synthétiseurs en toile de fond qu'avec les rythmes et percussions tribales, Canaan, doté d'une très forte identité méditerranéenne, délivre avec Contro.Luce un produit fait de mélancolie et de classe. Finalement, l'italien, quant il n'est pas braillé à tout va ni parlé avec les mains selon une gestuelle approximative, est une bien belle langue. Et c'est encore meilleur quand la superposition des couches sonores, à l'instar de ce que fait un Esoteric, est tellement cristalline que rien n'est perdu au passage.
La forme de l'album elle-même est étonnante, jugez-plutôt : 21 pistes pour 11 interludes sobrement intitulées "." et 10 morceaux au sens traditionnel. Long de plus d'une heure, l'album reste pourtant digeste grâce à un sens de la mélodie à mi-chemin entre le post-rock et le doom. Pour autant, certains interludes auraient pu être évités afin de raccourcir le résultat final. Mais voilà bien du détail face à la qualité générale de l'objet. Les morceaux, clairs et mélodiques, sont doux et blessent autant qu'ils apaisent. Avec Canaan, l'impression de clair-obscur est permanente. Étrange sensation que l'écoute de cet album à la fois positif et négatif. Aussi étrange que l'aspect mystique développé par le groupe. Aussi étrange que le final d'"Umiltà", joué par un quasi-accordéon épileptique.
Contro.Luce est un album cohérent et pourtant varié. "Calma" donne le ton et impose une douce noirceur dès le départ. Les pistes se succèdent dans un enchaînement parfaitement fluide. Parfois, certaines mélodies plus touchantes que la moyenne sont mise en avant. C'est le cas sur "Oblio", très bon condensé de l'album. C'est que les variations ne se trouvent guère dans le style pratiqué mais au sein des morceaux eux-mêmes, qui se suivent sans se plagier. La fin de l'album, notamment, surprend par une coloration plus sombre, comme si le mauvais coté du groupe demandait à s'exprimer ("Lascivia", clair-obscur comme sait l'être Tenhi ; "Esitazione" et son chant quasi-growlé...). Que le propos soit apaisé ou tourmenté, la musique de Canaan prend tout l'espace, se ressent et se respire à la manière d'une fragrance.
A l'écoute de Contro.Luce, on se dit que quelque chose cloche. Comment ces Italiens ont-ils pu se débrouiller pour rester aussi confidentiels après tant d'années au service d'une musique aussi originale que réussie ? Fort éloignée des sphères metal mais se nourrissant des mêmes approches (le blast-beat en moins, évidemment), l'oeuvre de Canaan devrait parvenir à convaincre les oreilles les plus réceptives aux sonorités ambiantes et sombres.