CHRONIQUE PAR ...
Droom
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
15/20
LINE UP
-Kalevi Uibo
(chant + guitare + claviers + cythare)
-Ilmar Uibo
(batterie + percussions + chant)
-Etienne Testart
(guitare + chant + e-bow)
-Stefan Thanneur
(basse + chant)
TRACKLIST
1) Rise
2) Interzone I
3) The Innermost Depths of Knowledge
4) Interzone II
5) Black Mantra
6) Weather The Storm
DISCOGRAPHIE
Marre de cette bête routine? Marre de prendre ce bête métro chaque matin, entouré d'une bête foule qui se rend à de toutes aussi bêtes activités que les votres? Il est surement temps de décrocher un peu. Plusieurs options sont alors envisageables: Tone of Things To Come, premier album des Français de Chaos Echoes, groupe né des cendres du défunt Bloody Sign, est l'une de ces possibilités. Par forcément la plus facile d'accès, ceci-dit. C'est que le doom-death-black-mystico-zarbi du groupe ne fait pas vraiment dans la dentelle vous voyez ? Au contraire, il est particulièrement chargé.
La première écoute de cet OMNI fût extrêmement troublante. Les compositions de Tone of Things to Come donnent en effet l'impression d'avoir été découvertes par les musiciens au moment même de leur enregistrement. La scène s'imagine aisément : quatre potes un peu désœuvrés qui décident, un mauvais soir, de faire quelque chose de leurs dix doigts. Un metal protéiforme, mélange d'influences extrêmes allant du black au death en passant picorer ça et là au passage semble, ce soir-là, leur convenir. Allons donc, c'est parti pour tout mettre sur la table. Les gars se lancent, jamment, lâchent leurs tripes sur le sol et enregistrent le tout. Car les 6 compositions de l'album n'en sont pas réellement. Une composition est un acte réfléchi, un travail de précision. Ici, les pistes sont plutôt des projections : l'expression directe, brutale et franche de chaque musicien. L'improvisation semble avoir été de mise. De même que les psychotropes.
Le résultat de l'expression de ces braves gens est une onde de choc sonore. Ne cherchez point de structures, vous n'en trouverez pas. Et si tout s’enchaîne parfaitement, Tone Of Things To Come n'en est pas moins une œuvre de chaos. Maîtrisé mais chaotique, c'est un peu le paradoxe de cet album. Une dose de tremolo black par ci (plus que ça en fait, cette technique étant la charpente de l’œuvre), un riff doom par là ("Weather The Storm"), une pincée de voix démoniaque ("Black Mantra", "The Innermost Depths of Knowlmedge") et le tour est joué. Tout est question d'alchimie. Une alchimie dérangeante qui évoque aussi bien Dragged Into Sunlight pour son coté sale qu'Esoteric pour son aspect imprévisible ou encore Krallice lorsqu'il s'agit de cette fameuse maîtrise du chaos et de ce sentiment de mysticisme exacerbé ressenti à l'issue de l'écoute. Que des joyeux lascars, donc.
Dès le départ, "Rise" nous plonge dans sa noire sanie. Tout s’accélère, tout tourne. Les riffs sont obsédants. La batterie écrase l'esprit. La voix le déchire. Puis le calme "Interzone I" fait douter de cette expérience encore fraîche. Mais la rechute est brutale tant la troisième piste confirme l'impression qu'a l'auditeur de perdre pied. Les clochettes et autres bruissements aléatoires d'"Interzone II" lèvent définitivement le voile et nous ouvrent la voie vers la perdition totale. Cette perdition, c'est d'abord "Black Mantra", enfumée, bouillonnante, menée par les riffs circulaires et autres soli improbables des guitares. Enfin, le chaos persévère et s'achève avec la dernière et longue pièce de l'opus (12 minutes 42), "Weather The Storm" sur laquelle les fûts seront martelés d'une façon proprement inhumaine.
Tone of Things To Come, avec ses riffs tournoyants, son batteur fou exécutant sa tâche selon des rythmes connus de lui seul et ses effluves permanentes d'encens noir, parvient à vider l'auditeur de sa substance. Sûrement pour mieux ouvrir son troisième œil. Pour mieux l’entraîner dans une autre dimension. Chaos Echoes, au patronyme parfaitement opportun, signe donc ici une excellente réussite avec un premier album habité et intelligent. Largement influencé par le black, mais dépassant ce strict genre, il est évident que ce premier essai devrait savoir trouver son public. En tout cas, moi, j'adhère. D'ailleurs, si quelqu'un peut venir me sortir de là, ce serait gentil. C'était bien aussi, le monde normal.