Alors qu'elle ne semblait plus vraiment donner signe de vie avec son projet principal et que son dernier brûlot In Your Blood n'était pas très bon, Cadaveria revient après un changement de label sur le devant de la scène avec Horror Metal, dont le nom, les photos et la pochette font croire à une mauvaise blague. Et pourtant, ce n'est pas une farce mais une très bonne surprise !
De toute évidence, dame Cadaveria n'est pas là pour nous offrir une galette qui sera spécialement appréciée par le commun des mortels, ni même pas l'ensemble de la communauté metal, tant, derrière cet artwork cliché et ces photos promos ridicules, il se cache pourtant un résultat beaucoup plus mûr et mature que tout ce que l'on pourrait imaginer, que la complexité est une arme très souvent employée par l'Italienne et ses acolytes pour faire la musique qui compose Horror Metal, et que la mixture, très souvent froide, sombre et ésotérique, n'aura pas le goût que bon nombre de palais apprécient. Elle est, à l'instar du dernier Dylath-Leen, de ces mets qui ont du mal à être reconnus par beaucoup, mais qui, pourtant, sont fort délicieux et sentent le travail bien fait, les saveurs justement dosées et, surtout, une maîtrise intelligente des proportions.
Cadaveria est une chanteuse ayant fait ses preuves dans le milieu du black metal, et on retrouvera bien évidemment des réminiscences de cette époque, celle où elle menait de main de maître Opera IX. L'ambiance, notamment, est ce qui fait le plus penser à cela : si la rythmique est un peu différente, on se retrouve néanmoins plongés dans un univers malsain, où la frontwoman navigue avec une aisance déconcertante, de sa voix extrêmement polyvalente, qui sait à peu près tout faire dans ce qui lui est demandé. La dame des ténèbres nous apporte ainsi des prestations de chant extrême convaincantes, et un chant clair mystérieux, sinistre, qui est chargé d'émotion et pourtant de la plus grande simplicité. Un titre de grande qualité comme "Flowers in Fire" nous plonge tout de suite dans le bain : Cadaveria va nous transporter dans son univers glauque.
La musique est aussi variée et inventive que dame Cadaveria versatile. De riffs lorgnant vers le doom à une accélération black, voir thrash, structures changeantes et déconcertantes, on se retrouve perdus pour mieux se retrouver aux quelques fils conducteurs qui nous permettent de ne pas se perdre lors de la traversée. Assez ardu d'extraire des morceaux au-dessus des autres car le tout forme, malgré sa discontinuité, un ensemble tout à fait cohérent, qui nous prouve tout le talent du combo n'ayant aucun mal à faire passer son art. Cependant, trois sont meilleurs : "Flowers in Fire", théâtral, nous dévoile tout le potentiel du groupe, et nous promet du bon par la suite. "Assassin" est, sans mauvais jeu de mot, une petite tuerie et "Death Vision", glaçante, très aboutie et aux ambiances très marquées. Peut-être le meilleur de l'opus.
Une influence étrange mais parfois ressentie, c'est celle de Black Sabbath, qui de temps en temps surgit dans les riffs, notamment la piste "Apocalypse". Cette parenthèse refermée, Cadaveria est très loin de proposer un plagiat de ce qui est déjà montré dans le genre. Au contraire, le groupe pousse encore ses limites et se créent une personnalité qui leur est propre, un son qui leur est personnel, identité forgée qui permet au groupe se faire fière allure sur la scène. Au moins, ils auront le mérite de pouvoir briller à la fois par leur talent, mais aussi grâce à leur inventivité. Tout n'est pas parfait, car deux titres sont en dessous du lot ("Whispers of Sin" et "Hypnotic Psychosis", même si la seconde est agréable), mais à part cela, difficile de ne pas être emballé, si l'on apprécie ce type d'albums bien sûr, par la musique de Cadaveria.
Album de la maturité pour le groupe, Horror Metal est un excellent cru qui permet enfin de concrétiser tout le potentiel et les espoirs que l'on pouvait placer en la demoiselle et sa bande alors que ses ex-compagnons d'Opera IX sont en plein déclin. Néanmoins, l'opus aura peut-être, en dépit de sa grande qualité, des difficultés à trouver un public.