Down -
Diary of a Mad Band (DVD)
Voir Down en Live, c'est quand même quelque chose. L'immense charisme d'Anselmo (sa mégalo aussi), la chape de riffs du duo Keenan/Windstein et le groove trainant, délicieusement sudiste de la section rythmique, on n'est pas bien loin de l'orgasme musical. Mais cette espèce d'alchimie, cette immense jouissance collective que tous ceux qui ont assisté un jour à un concert de Down ont ressentie, serait-elle transposable sur galette de plastique? Allons-y sans ambages : la réponse est oui.
Enfin presque... Rien ne remplacera jamais le fracas des amplis, l'odeur de la sueur des frères-du-métal, les relents de bière et la main calleuse du frère-du-métal qui s'abat sur ton épaule quand, galvanisé par l'ambiance tu vaincs ta timidité et tu proposes une bière à sa moitié... Bref, aucun média ne remplacera jamais un concert. Malgré cela, en ces temps d'home-cinema à l'écran plus ou moins géant et au son plus ou moins spatial, un DVD live peut faire un bon succédané au concert que l'on a raté. « Faute de grive, on mange des merles », dit le proverbe. Encore faut-il que le merle soit digeste ! Il l'est. Au traditionnel « One Night », la maison de disques a préféré le non moins traditionnel « on grapille dans la tournée » (et on multiplie les achats « j'y étais » par autant...). À ce propos, le parti pris « une chanson, une date » n'est pas vraiment respecté car le montage insère des images d'autres shows à l'intérieur d'un même morceau (ou alors Anselmo se change vachement vite!) : mouais... On a parfois l'impression d'assister à un immense clip et ca gâche un peu la sauce.
Ce Diary of a Mad Band se veut construit comme un Rockumentary (comme on dit) et les morceaux sont entrecoupés d'extraits « backstage » (les barbus qui disent des gros mots, les barbus aux chiottes, Phil Anselmo allongé qui philosophe, Jimmy Bower sans son dentier, des balances) qui n'ont d'autre intérêt que de montrer à quel point les tournées sont quand même loin d'être aussi glamour qu'on le dit... Pour ceux à qui les extraits ont plu, un chapitre intitulé « Tyrades & Shenanigans » d'une treizaine de minutes continue la blague. Les autres peuvent passer leur tour, c'est quand même d'un intérêt plus que limité. On est quand même là pour la musique ! Et quelle musique ! La tracklist longue comme un jour sans pain contient tous les gros pavés du groupe, avec des vraies pépites de NOLA dedans (la quasi-entièreté de l'album à vrai dire) et les bons morceaux d'A Bustle In Your Hedgerow... Et en plus Anselmo se paye le luxe d'être bon sur quasiment tous les morceaux! Incroyable!
Bon, la barque penche parfois, mais jamais elle ne coule... Et c'est tant mieux parce que derrière ca assure à mort ! Keenan a la classe intégrale, du début à la fin, Windstein - sous ses airs de lutin débonnaire - débite mine de rien du gros riff qui bave à tour de bras tatoué et Jimmy Bower (merci les excellentes prises de vue de la batterie) n'est visiblement pas là pour beurrer les sandwiches... Quant à Rex... Ben c'est Rex quoi... Quelle alchimie entre les musiciens, quel plaisir dans leurs yeux quand ils jouent (même s'il faut parfois chercher loin dans le regard d'Anselmo) et quelle démonstration des deux riffeurs du groupe ! Ils sont partout où on les attend! Le riff de "Lifer" est un régal sous les doigts de Keenan (le break aussi), le duo fonctionne à mort sur la jouissive "Mistake" et l'intro d'"Eyes of the South" est parfaite. "Rehab" envoie le bois, "Temptations Wings" fout les poils, et "Hail the Leaf" fout les chocottes. Et si tout ce petit monde n'est pas millimétré, la quantité de pains reste tout à fait honnête tout au long du flim.
Et puis, à la rigueur, s'ils chient un peu deux-trois morceaux c'est pas bien grave, voire Rock n Roll, tant qu'ils passent "Stone the Crow" et "Bury Me in Smoke"! La première est correcte (mais sans plus), la deuxième est démente, Donington oblige. Et pourtant deux regrets : le son, l'ambiance. Le son est gros et tout, mais manque du côté club des prestations précédentes et l'ambiance enfumée, glauque du morceau est un peu gâchée par le plein air et le ciel bleu. Pour l'avoir vécu dans une petite salle enfumée et sombre, je peux vous dire que ça colle le frisson! Est-il précisé quelque part dans cette chronique que Pepper Keenan assure comme pas permis ? Si non voilà l'injustice réparée. Parlons maintenant du son, voulez-vous ? Et bien il est très bien, très « comme si on y était » et rend parfaitement justice aux qualités des musiciens. De plus Anselmo est légèrement sous-mixé, évitant ainsi que les « faux pas » du bonhomme nous sautent aux yeux de façon trop violente.
Vous l'aurez compris, ce DVD live est brut de décoffrage, à l'image de ses protagonistes, avec tout ce que ça sous-entend : c'est pas toujours super propre, mais c'est authentique ! Et si vous n'avez jamais eu la chance de voir Down en concert voilà un excellent moyen de s'approcher de l'expérience. Maintenant, si vous ne connaissez pas le groupe, sachez que ce n'est pas le meilleur moyen de s'y mettre. En mot comme en cent : si vous êtes fan du groupe rajoutez deux points à la note, si vous ne connaissez pas, n'hésitez pas à virer deux-trois points et jetez vous plutôt sur l'excellent NOLA. Reste à espérer que le concert londonien fourni avec le DVD soit de la même qualité!