Venus du milieu hip-hop sous le nom de Medeline, collaborant avec des noms comme Booba, Rohff ou Fonky Family, les membres de As The Stars Fall, inspirés par le cinéma et la photographie, décident de composer une musique évoquant la vision d'un monde grisé de désillusion parfois teinté de notes d'espoir, associée à un travail graphique conséquent. Un virement musical qui s'avère dans les grandes lignes plus qu'intéressant. Ou comment est né le post-rock instrumental du ghetto.
Avec un tel background et des influences assumées comme Sigur Rós, Explosions In The Sky, God Is An Astronaut d'un côté ou encore Portishead, Clint Mansell, Daren Aronofsky et encore Portishead, essayer d'imaginer ce à quoi ressemble la musique d'As The Stars Fall peut s'avérer périlleux, même si l'on dispose d'un cadre vaguement précis. De manière concrète, la formation aligne des lignes de guitares mélodiques sur des beats résolument urbains, tandis que synthés éthérés et samples vocaux ou bruitistes viennent enrober le tout. Qu'il s'agisse de la guitare électrique de "No Good Deed Goes Unpunished" (qui renvoie clairement à un univers post-rock à la God Is An Astronaut) à l'acoustique de "The Road", le trio parvient à créer très rapidement une atmosphère et un climat certain.
Tempus Fugit s'avère donc être un enchaînement de tableaux variés, dont les variations viennent aussi bien des thèmes et cycles développés que des orchestrations différentes. Ainsi, un morceau comme "A Dead Leaf Dance" se voit doté d'une rythmique à base de samples organiques et d'éléments électroniques, tandis que "Some Tears Can Never Dry" assoit ses guitares sur une batterie acoustique, avant de briser le climat par un final à mi-chemin entre trip-hop crasseux et chœurs grandiloquents. Un morceau comme "Revolt" offre quant à lui de purs moments d'electro avec ses synthés vintage qui finissent martelés par les coups d'un beat binaire et direct comme il se doit. Avec "I Gave You a Choice", le groupe arrive à créer du malsain en mariant mélodie enfantine et samples de violence domestique.
La perfection n'est cependant pas atteinte, tout d'abord par la lassitude et la répétitivité de certaines idées, à commencer par les lignes de piano qui, si elles arrivent à poser un cadre cinématographique, ne font pas preuve d'une grande originalité ("Frozen Rivers"). De même, les parties de cordes programmées ne convainquent pas lorsqu'elles sont en staccato, car sonnant presque banales ("Some Tears Can Never Dry"), voire à côté de la plaque ("A Dead Leaf Dance"). Qui plus est, certains synthés renvoient à des groupes comme God Is An Astronaut (encore eux), de par leur utilisation en lead mélodique tout d'abord, mais surtout par leur sonorité identique à celle du groupe cité ! As The Stars Fall possède effectivement nombre de sources d'inspiration, mais semble au final peiner à s'en détacher pleinement.
Cela n'empêchera en rien l'amateur de climats suggérés, tantôt aériens, tantôt tourmentés d'apprécier ce Tempus Fugit. Outre sa musique, le trio développe aussi son art sur le plan graphique. L'association de ces deux sources artistiques parviendra probablement à convaincre certains, de même que compléter les imperfections, sinon faiblesses, de la personnalité musicale que cultive As The Stars Fall. Plaisant, mais pas impérissable.