Oh, mais je vous vois venir, vous, là, avec vos objections toutes prêtes, votre sourire narquois sur le point d’être dégainé et vos idées reçues aussi massives et inamovibles que du roc. Dans quelques lignes, vous allez lire que Lightning Swords Of Death fait du black métal traditionnel, de bonne qualité, avec une production et une ambiance glacée, et vous allez être d’accord avec moi. Et puis vous allez lire que le groupe vient de Floride et là vous allez vous insurger en disant que oh, mais non, stop, je suis désolé, mais un groupe de black métal qui vient de plages pleines de bimbos siliconées et de palmiers ne peut pas, par définition, être sérieux. Sans blague, quoi.
Et pourtant… désolé, mais Lightning Swords Of Death fait du black métal traditionnel avec une production et une ambiance glacée… et le fait plutôt bien. C’est simple, si cela peut vous aider, oubliez que le groupe vient du sud de la Floride, et si ça vous fait du bien, imaginez de vastes forets glacées, une nature sauvage et magnifique, et histoire d’aller au bout de la chose, ajoutez-y une ruine mystérieuse dans laquelle s’ébattent des types super ivôl portant des torches et du maquillage. Loin de moi l’idée de vous contrarier. Si maintenant vous êtes prêt, que vos petites certitudes et idées préconçues ont finalement eu raison de la cruelle réalité, alors jetez une oreille sur The Extra Dimensional Wound. Vous y découvrirez d’abord une production sacrément efficace, toute en puissance, en agression et avec bien évidemment cette petite touche de saleté si typique du milieu black métal norvégien. Le fait que l’album ait été mixé par Sverker “Necro” Widgren au Necromorbus Studios à Stockholm, en Suède, y est certainement pour quelque chose. Naturellement attiré vers sa mère-patrie spirituelle, l’album de Lightning Swords Of Death en a donc pris les atours, et pour le meilleur : la basse ressort bien, les guitares sont bien graves et baveuses, et le chant d’Autarch évoque tout à la fois Dark Funeral, Immortal et Emperor : difficile de tourner le dos aux maitres incontestés du genre.
Mais la musique est elle aussi intelligemment écrite. Le tempo varie, quoique majoritairement situé dans une dynamique plus lourde qu’hystérique, le blast étant une chose relativement rare parmi les quarante-cinq minutes que dure cet album. On retrouve parsemées ici et là des influences métalliques diverses, comme du death ou du heavy métal, mais ce qui ressort de tout cela est un black métal que l’on pourrait qualifier sans trop prendre de risque de « traditionnel », avec une production ancrée dans les années 2000 et non sur un quelconque retour aux sources d’un black raw souvent cache-misère. Pour autant, une fois que l’on s’est remis de la production ultra-efficace et calibrée au millimètre près, et que la musique prend le pas sur le son, on reste parfois un peu déçu du côté basique de certaines compositions ou de certains riffs. Il y a par exemple le moyen "Vorticating Into Scars", dont les riffs ne décollent vraiment jamais…mais nous retiendrons plutôt l’excellent "Venter of the Black Beast" et son tempo lourd, son ambiance poisseuse et malsaine, ou encore les deux titres d’ouverture et le très bon "Damnation Pentastrike", quintessences de l’esprit black qui régnait à la fin des années 90. Et puis l’album finit sur l’imposant "Paths to Chaos", qui s’étale sur près de douze trompeuses minutes, car avec ses breaks, l’auditeur a plus l’impression d’entendre deux titres mis bout à bout et entrecoupés de bruits d’ambiance. Malgré tout, le final très mélodique est parfaitement réussi, toujours emmené par les hurlements malsains d’Autarch, décidément l’un des points forts du groupe.
-Trouver un nom de groupe de black qui tabasse : failed.
-Dessiner un logo lisible et percutant : failed.
-Venir d’un pays en adéquation avec l’esprit de ma musique : epic failed.
-Trouver un label d’envergure : win.
-Proposer un bon album de black traditionnel : win.