CHRONIQUE PAR ...
Wotan
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
14/20
LINE UP
-Ewchymlaen
(chant+guitare)
-Aort
(guitare+basse+batterie)
TRACKLIST
1)Full Moon Possession
2)Seethe My Darkness
3)Raging Winds
4)1584
5)Serpent Procreation
6)Dawn Divides the Darkness
7)Our Hallowed Bones
8)Hiraeth
DISCOGRAPHIE
Sortir un album de true [insérez ici votre style préféré] est un long chemin rempli d’embûches. Le risque de mauvaise parodie, celui de sonner comme une copie sans signature personnelle (et sans talents), sont bien entendu les plus évidents. Alors quand arrive un album de true black metal sur le bureau de votre serviteur (oui nous avons un bureau, une secrétaire aussi), pour lequel la DeLorean DMC-12 est bloqué sur 1993, voire avant, le scepticisme de base est de rigueur. C’est ce qu’on appelle la mauvaise foi du chroniqueur.
Blutvial est profondément attaché à ses racines musicales. Le duo anglais aime le vieux black metal des années 90, plus dans la veine de Mayhem et de Darkthrone que d’Emperor, mais aussi le thrash metal aux accents punk de Venom et bien entendu, Black Sabbath. Il déclamera son amour de tout ce qui est ancien et malsain durant les cinquante minutes que durent I Speak Of The Devil, un album qui sent bon l'église brûlée dans la brise matinale de Scandinavie. Ce disque peut donc être considéré comme un hommage au bon vieux temps, fait par des musiciens aguerris et vraiment amoureux de cette période. Rien que le titre d’introduction est un hommage vibrant à Darkthrone, dans tout ce qui fait la force du duo: des riffs simples mais percutants, une ambiance malsaine au possible distillée par la violence émanant de chaque blast, de chaque accord dissonant et du chant particulièrement haineux.
Les compositions oscilleront tout du long entre la force brute et crue d’un thrash metal punk ou la lourdeur du doom, sans jamais lâcher la haine qui anime Blutvial. Cette haine se transmet via le chant de Ewchymlaen, qui possède un timbre sale et rauque. En revanche, le mix ne le met pas en valeur, il est plutôt dans le fond et largement en retrait des guitares et de la batterie (la basse est totalement inaudible). Même quand le disque ralentit le tempo, l'atmosphère malsaine est toujours présente, voire même est renforcée par des nappes de bruits et une texture de guitares dissonnante et répétitive ("1584" et "Hiraeth"). Ce sont les guitares qui font le plus gros du travail sur ce disque, qui n’arrêtent jamais, que ce soit au gré de riffs bruts de décoffrage ("Dawn Divides the Darkness", brûlot thrash intense) ou encore des nappes mentionnées ci dessus. L'écueil de la répétition n’est pas évité, surtout sur les titres les plus black metal. Le riff de "Our Hallowed Bones" semble être une variation de celui de "Full Moon Possession".
L’aspect nostalgique de l’album est appréciable, il ne sombre pas dans la parodie ou le manque d'originalité et le groupe imprime une certaine marque personnelle et identifiable. Le son, qui est évidemment sale (mais bien produit, studio Finnvox oblige), se démarque grâce à divers effets techniques pour donner un rendu étouffant ou bien plus tranchant, selon les situations. Il est d’ailleurs à noter que c’est quand le groupe change son propos qu’il devient le plus intéressant. Les chansons purement black metal sont trop classiques (cependant l'efficacité de "Full Moon Possession" est redoutable) pour ne pas être en dessous du reste. Il faut reconnaître que le groupe n’invente pas le fil à couper le beurre. Ce n’est certes pas son propos, et Blutvial nous propose un album qui oscille vers le bon. Il est facile de regretter cependant un manque de prises de risque, d’aventure, d'où la note.
C’est dans les vielles marmites qu’on fait les meilleures soupes. Cet adage se révèle particulièrement pertinent dans le cas de Blutvial. Certaines chansons sont parfois trop classiques, mais le groupe fait un effort de personnalisation sur une bonne partie du disque pour ne pas sonner comme une pâle copie. À ranger dans l’endroit sombre et malodorant où vous gardez vos exemplaires de Black Metal, A Blaze In The Northern Sky et l'éponyme de Black Sabbath.