CHRONIQUE PAR ...
Cosmic Camel Clash
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
12/20
LINE UP
-Bertrand Drécourt
(chant+guitare)
-Thomas Jaëglé
(basse+chant)
-Olivier Stefanelli
(batterie)
TRACKLIST
1)One Way
2)Land of Compromise
3)Hate Song
4)Ce mal en toi
5)Father
6)End of the Dream
7)Le vide
8)Finding the Trigger
9)I See It Coming
10)Next
11)Equilibrium
DISCOGRAPHIE
« Le troisième oeil scrute le terrain, la tactique à appliquer pour balayer l'ennemi statique... » ah pardon, sur un webzine métal on ne fait pas de citation d'IAM, c'est vrai. J'oubliais. Il aurait mieux valu partir sur le versant manga : avez-vous lu 3x3 Eyes, histoire-fleuve traitant des aventures d'un humain emporté dans le monde des esprits ? Savez-vous que la présence d'un troisième oeil sur le front est généralement synonyme de nature démoniaque dans le folklore japonais ? Et savez-vous que pour des raisons graphiques il faut absolument qu'une intro de chro soit de la taille de l'avatar chez les Eternels ?
Third Eye pratique un rock-métal fortement teinté de fusion et de néo, soit relativement peu violent mais très groovy et syncopé. Le son se révèle d'ailleurs parfait pour le style : les guitares sont suffisamment musclées, l'indispensable basse est fort audible et la batterie sèche fait bien rebondir le tout. La manière dont la caisse claire sonne acoustique alors que la grosse caisse est clairement triggée montre bien la dichotomie du groupe qui navigue sans cesse entre mélodie, syncope et moments plus agressifs. On peut dire en règle générale que l'instrumentation penche tout de même plus du côté burné de la Force : des compos comme "Land of Compromise" ou "Father" se placent clairement dans une approche métal , et "Finding the Trigger" est un titre de pur néo rappelant l'ère de la Team Nowhere et doté de plus d'un très bon refrain orienté métal mélodique. Cette approche est compensée par des refrains clairement pop généralement réussis et qu'on retient très vite : ceux de "Land of Compromise" ou "One Way" en particulier risquent de vous trotter dans la tête un bon moment avant que vous ne puissiez vous en débarrasser.
Face à cet ensemble instrumental liant puissance et mélodie, le côté fusion est incarné principalement par le chant. Et c'est là que les problèmes commencent : si le vocaliste est doté d'un timbre agréable à première écoute, très maniéré, pro, avec un vibrato sympathique... il s'avère rapidement extrêmement linéaire et répétitif. Il ne module plus ou moins jamais, ses lignes mélodiques comme ses attaques se ressemblent énormément d'un titre à l'autre et il finit rapidement par porter sur les nerfs. Il faut dire que le chant en anglais présent sur la plupart des compos le dessert énormément car son accent est parfois atroce. Dans le domaine des grands ratages le refrain de "Hate Song" fait fort : «ol zi heilltrède inn ze oueurld», non. Juste non. Le pont de "Father" est encore pire : crier «HOW !» dans un pré-refrain en le prononçant systématiquement «HO !» ça fait tout de même un peu pitié. Malheureusement pour Third Eye les textes des titres en français sont loin d'avoir un niveau suffisant pour tenir la route, et on imagine facilement le dilemme auquel le groupe a dû faire face.
La musique de Third Eye est loin d'être dépourvue de qualités cela dit : les couplet punk speedés de "Father" sont assez jouissifs et le groupe sait parfois surprendre agréablement, comme quand il ajoute un côté dub orientalisant à sa formule dans "Equilibrium". L'apport d'un deuxième chant plus agressif (mais moins maîtrisé) contrebalance la monotonie du chant principal et aère des compos, faisant de "I See It Coming" une vraie bonne surprise. Mais on trouve tout de même de bons gros blocs de facilité qui font peine : les emprunts évident que sont l'intro de "Father" ("Message in a Bottle" de Police) et la reprise telle quelle de la célébrissime montée guitare-basse de "Killing In The Name" de RATM dans "End of the Dream" passent tout de même assez mal. On regrette aussi que la basse ne se lâche pas plus souvent comme dans l'intro de "One Way" ou les couplets de "Ce mal en toi"... compo qui part d'ailleurs dans une digression funk assez affreuse qui permet de comprendre pourquoi le groupe préfère jouer sur la puissance et la syncope en général. Malheureusement sans parvenir à se détacher d'une certaine platitude.
Land Of Compromise est un peu l'archétype de l'album moyen-plus. Sur le papier le nombre de qualités est assez conséquent, mais le produit final est plombé par trop de défauts récurrents pour qu'on puisse réellement adhérer. Espérons que l'expérience aidera le groupe français à faire le tri entre ce qui fonctionne ou pas, car leur capital sympathie est bien réel... mais ne suffit pas.