CHRONIQUE PAR ...
Sebrouxx
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
14/20
LINE UP
-David Gilmour
(guitare+chant)
-Phil Manzanera
(guitare+chant)
-Richard Wright
(claviers+chant)
-Guy Pratt
(basse+chant)
-Jon Carin
(claviers+chant)
-Steve DiStanislao
(batterie+chant)
TRACKLIST
1)Speak to Me
2)Breathe
3)Time
4)Breathe (reprise)
5)Castellorizon
6)On an Island
7)The Blue
8)Red Sky at Night
9)This Heaven
10)Then I Close My Eyes
11)Smile
12)Take a Breath
13)A Pocketful of Stones
14)Where We Start
15)Shine On You Crazy Diamond
16)Astronomy Domine
17)Fat Old Sun
18)High Hopes
19)Echoes
20)Wish You Were Here
21)A Great Day for Freedom
22)Comfortably Numb
DISCOGRAPHIE
Aussi bon guitariste que financier, David Gilmour revient hanter nos lecteurs CD et DVD pour un nouveau Live tiré de sa tournée mondiale On An Island. Plutôt gonflé après avoir déjà sorti, l’année dernière, Remember That Night, vidéo filmée lors de son passage londonien à l’occasion ce même world tour ! Scandaleuse au premier abord et au regard de la baisse du pouvoir d’achat qui peut même toucher les fans du Maître et du Floyd, cette initiative permet de revoir une dernière fois Richard Wright derrière ses claviers. Mais pas seulement…
Fin calculateur, le père David avait fait du 22 septembre dernier la Saint Gilmour. Son Live In Gdansk sortait quasiment dans le monde entier et, ce, sous cinq formats différents (on y reviendra plus tard). Ses deux modèles de guitares Fender Signature devaient débarquer en magasins (pour les modiques sommes de 3000 et 4000 euros). Et enfin la seconde édition de l’ouvrage consacré à sa fameuse Black Strat devait arriver chez tous les bons libraires. L’argent allait couler à flot. Et ce fut probablement le cas. Seulement le lundi précédent, un autre membre du Floyd lui vole la vedette, malgré lui. Richard Wright succombe en effet à un cancer foudroyant… faisant du Live In Gdansk le « dernier opus de David Gilmour sur lequel joue Richard Wright ».
Monté, rédigé et usiné bien avant la disparition du claviériste, ni le DVD, ni le booklet conséquent ne rendent hommage à ce musicien sous-estimé. Néanmoins une certaine nostalgie entoure chacun des plans le montrant, chacune des pistes où sa voix et ses instruments se font entendre. L’apport de Wright est indéniable. Indéniable quant à ses réarrangements effectués sur l’ensemble des morceaux d’On An Island, joué en quasi intégralité à l’occasion de cette tournée et de leur passage en Pologne. Et indiscutable sur la plupart des reprises du Floyd interprétées en seconde partie de ce concert ("Comfortably Numb" et son premier couplet chanté par Wright en demeurent la parfaite illustration, ex aequo avec… "Echoes").
Mais avant de devenir la dernière apparition de Richard Wright sur DVD, ce Live In Gdansk devait surtout être la première fois que Gilmour faisait appel à un orchestre philharmonique pour accompagner son groupe. Un apport attendu depuis des lustres par la fanbase du guitariste et de Pink Floyd. Mais pas seulement : il s’agissait aussi du sous-titre vendeur permettant de légitimer la sortie d’un second Live pour cette tournée On An Island. Alors autant relativiser de suite cet argument, aussi musical que mercantile : le Baltic Philharmonic Symphony Orchestra n’est pas présent sur l’ensemble des morceaux offerts ce soir-là. S’il enrichit la totalité des titres tirés d’On An Island, sa participation se réduit à la portion congrue sur la plupart des morceaux du Floyd (et notamment sur "Echoes", "Shine On You Crazy Diamond" et surtout "Wish You Were Here"). Pour le coup, cette fois, il y a effectivement de quoi hurler au scandale. Tout d’abord cette absence est regrettable tant les trois morceaux suscités et leurs ambiances respectives se prêtaient largement à l’exercice (notamment "Shine On", ici juste copié-collé de la précédente version londonienne). Et histoire d’enfoncer le clou, la plus-value philharmonique est manifeste sur "High Hopes" (on s’en doutait) et surtout sur "Comfortably Numb" (là, c’était loin d’être évident, "Comfortably" étant avant tout un morceau et un solo de guitare qui se sont toujours suffi à eux-mêmes).
Pour faire passer la pilule, et éviter la redite trop appuyée de Remember That Night, Gilmour sans son orchestre reprend quelques vieux morceaux, pour faire plaisir à son ami Lech Walesa, présent puisque responsable de la venue du guitariste en terre polonaise. "Astronomy Domine", malgré le poids des années, fait toujours autant mouche. Idem pour "A Great Day for Freedom", dont les paroles libertaires constituent l’hommage d’un soir à Solidarnosc. Joli mélange des genres et choc des cultures, entre un milliardaire de la six-cordes, une icône de la politique locale, un son et lumières grandiose et un environnement portant toujours les stigmates de l’Union Soviétique ! Dommage que le DVD, toujours filmé et monté par Gavin Elder, ne contienne pas l’intégralité de cette soirée surtout que ses bonus se réduisent à un simple reportage montrant la préparation de cette petite sauterie, ainsi que le repas bien arrosé partagé par Gilmour, son épouse et Walesa.
Alors pourquoi cinq éditions ? Parce que si Gilmour vendait du dentifrice, il les refourguerait par lots. Certes le concert est disponible, dans sa forme la plus rudimentaire, en double CD pour apprécier la totalité des morceaux joués ce 26 août 2006. Et fait donc l’impasse sur le suscité DVD au piqué admirable. Mieux vaut donc se rabattre sur la promotion 2CD + 1 DVD. Les fanatiques se sont, eux, battus pour posséder leur exemplaire du Deluxe Set, offrant un recueil de photos prises par Mme Gilmour (photo-journaliste de formation), un médiator, une version en 5.1 de On An Island et surtout une compilation des meilleurs titres joués lors de cette tournée (dont l’excellentissime "Dominoes" donné à Paris, et un "On the Turning Away" improvisé à Venise sur lequel Wright se plante magistralement). Sans oublier une reproduction du ticket de Gdansk, un faux pass All Access et une affiche. Fait seulement défaut le verre de vodka dédicacé.
Preuve que musique et commerce font souvent bon ménage quand on a quelques années de carrière. Tant que la qualité est au rendez-vous, ce qui est la cas en l’espèce malgré quelques grosses frustrations, il n’y a rien à redire. Ce Live In Gdansk complète en fait le précédent Remember That Night. Même si au final l’addition est salée, votre serviteur connaît un groupe de Metal(lica ?) qui a osé refourguer 130 euros un album pas encore sorti, juste pour que ses quelques fans financièrement très à l’aise puissent le télécharger la veille du jour J et bénéficier d’un accès sécurisé à un contenu sur le Web…