Chronique : Frail Body Artificial Bouquet (2024)

CHRONIQUE PAR ...

Wotan
Cette chronique a été mise en ligne le 30 janvier 2025

Sa note : 16/20

LINE UP

-Lowell Shaffer
(chant+guitare)

-Nic Kuczynski
(basse)

-Nicholas Clemenson
(batterie)

TRACKLIST

1) Scaffolding
2) Berth
3) Critique Programme
4) Devotion
5) Monolith
6) Refrain
7) No Resolution
8) Runaway
9) Horizon Line
10) Another Year Removed
11) A Capsule in the Sediment

DISCOGRAPHIE

Artificial Bouquet (2024)

Frail Body - Artificial Bouquet

(2024) - hardcore black metal - Label : Deathwish Records

La musique du vingt-et-unième siècle voit clairement les genres s’effriter, et fusionner pour créer de nouveaux cocktails. L'originalité passe par le mélange de genres que les fondateurs n’auraient jamais considérés il y a quelques décennies. La capacité d’exploration et d'expérimentation du black metal semble sans fin. Après le prog, le punk, l'électro, le shoegaze, le post rock, voici venir le black metal fusionné avec du screamo.

Issu de l’Illinois, Frail Body avait créé la sensation en 2019 avec un premier album très prometteur : In Memoriam. Long de vingt-et-une minutes seulement, le disque est un bombardement de chansons intenses et à fleur de peau, explorant la perte d’un être cher. Début 2024 le groupe revient pour leur second essai, plus long mais tout aussi intense. Dès le titre d’ouverture, “Scaffolding”, l’influence blackgaze est évidente. Frail Body a écouté Deafheaven et Sadness durant ces cinq dernières années. Que l’on soit clair : Artificial Bouquet est un album de screamo, sans le moindre doute. Lowell Shaffer met ses tripes sur la table, son chant est cru et direct, riche en émotion, sans le moindre répit aussi bien pour lui-même que pour l’auditeur. Tout le disque transpire la violence et les émotions, tendues comme un nerf de bœuf. Certaines performances rappellent Jacob Bannon (la voix de Converge et l’auteur de l'illustration de la pochette, par ailleurs). Son chant n’est jamais décalé et accompagne la musique à l'unisson, pour un ensemble d’une brutalité assourdissante par moments. Mais au delà de ce chant d’écorché vif, nous trouvons un mélange fluide d’énergie hardcore et de mélancolie blackgaze.
Chaque chanson est unique dans sa structure et son style. Les guitares enchaînent les riffs punchy (“Berth”, “Monolith”) ou au contraire nous entraînent vers les abysses du désespoir. Tout comme In Memoriam, l’album parle de la mort et du deuil. Le disque suinte la tristesse et la rage qui peuvent accompagner ce passage. “Devotion”, par exemple, explore le lien entre religion et deuil, questionnant l’absence de Dieu dans un moment où on en a le plus besoin. “No Resolution” ralentit le rythme et démontre bien la gamme large du groupe pour composer des titres qui vont du punk au DSBM. Regrettable cependant que certaines influences ne soient pas toujours bien assimilées, quelques passages de ci de là font automatiquement penser à certains groupes, manquent un peu d'identité. Le mixage est l'œuvre de Jack Shirley, qui collabore aussi avec Deafhaven. Grâce à son excellent travail, chaque instrument est audible, chaque note cristalline. Que ce soit lors d'un passage ultra dense ou au contraire dépouillé, chaque instrument se démarque. Avec une basse particulièrement puissante, Nic Kuczynski soutient le groupe et se permet même plusieurs solos.

Grosse sensation screamo de 2024, Artificial Bouquet est du metal moderne et intègre rapidement le top des meilleurs disques de screamo. Une œuvre riche, dense et émotionnelle qui se permet de fusionner avec le black metal. Une carrière à suivre.