CHRONIQUE PAR ...
TheDecline01
Cette chronique a été mise en ligne le 12 septembre 2023
Sa note :
13/20
LINE UP
-Willem "IX" Niemarkt
(chant+guitare+claviers)
-Jim "VRDRBR" Dokter
(batterie)
TRACKLIST
1) Vom Gesicht und Rätsel
2) Der freiwillige Bettler
3) Das Kind mit dem Spiegel
4) Der Mensch, die kleine Narrenwelt
5) Ein leeres Zauberspiel
6) Der hässlichste Mensch
7) Der Zauberer
DISCOGRAPHIE
Urfaust… Un nom étrange dans le milieu du black metal. Déjà car il est relativement peu connu malgré une certaine notoriété. Encombré d’une opaque réputation, le duo néerlandais officie (-ciait) dans une lignée unique. Délaissant les rivages essorés du black metal pur et dur, il s’abandonne à des exercices de style difficilement qualifiables. Mais pour sûr il s’abandonne. Et c’est en cela qu’il attire les attentions.
Der freiwillige Bettler (Le mendiant volontaire, rien que ça) impose à nos oreilles une légère remise en question. Impossible d’aborder une telle œuvre tête baissée. Il faut partir prévenu. À moins qu’il ne faille prévenir parti. Qu’importe votre choix, secouez nos neurones, ne les laissez pas reposer et embarquez. Dans un black metal, ou une musique, abrasif tout autant que lancinant, atmosphérique. Urfaust n’est pas client des immédiatetés de ce monde, à raison. Quel intérêt de balancer du blast sur fond de mélodies ? Capter sans captiver son auditoire bien sûr, mais c’est trop évident. Bâtir un monde personnel s’affiche comme une tâche bien plus ardue et intrigante. Et donc fascinante. À laquelle s’attèlent les Hollandais en répliquant par une absence de riff. Les guitares se meuvent en serpent laconiques sur un tapis rythmique mid tempo au mieux. Les notes susurrent aux oreilles tandis que le chant déclame, lointain et possédé.
Vraiment une sortie à la frange. Le pas de côté qui ne passe pas inaperçu tout autant qu’il peut laisser (sur le côté). C’est tout à l’honneur du groupe de se lancer dans une telle aventure. Ce n’est pas l’assurance de la réussite pour autant car l’exercice est évidemment éminemment casse-gueule. Il faut non seulement savoir composer une atmosphère happant l’auditeur, mais également compter sur sa complicité pour plonger dans la sauce. C’est peu souvent dès lors que Der freiwillige Bettler donne l’occasion d’apprécier un tempo pour son caractère entraînant. Cela arrive néanmoins sur "Ein leeres Zauberspiel" et, sans parler de soulagement, il s’agit d’une éclaircie de simplicité fort bienvenue. Cela valide en quelque sorte les vagues incessantes de metal noir, froid, fou, fracassé qui se sont abattues sur vos tympans. Des chansons qui donnent peu de prises sur lesquelles poser ses certitudes musicales.
On se dira que ce n’est pas plus mal tant il est savoureux de se faire bousculer de temps à autre. Urfaust est de cette trempe, celle des bousculeurs. Et qui n’en ont globalement rien à foutre, le pire. Grâce à cette nonchalance de façade, ils peuvent réellement produire de la musique différente. Différente tout en restant à portée des canons de la metallicité. Car si on peut dire de cette sortie qu’elle se démarque du reste de la création musicale, elle n’en demeure pas moins fermement rattachée au genre dans son ensemble. Les touches extra black metal offusquent notre perception de pointes de doom ("Der hässlichste Mensch") ou de heavy, pourtant elles ne s’égarent jamais sur des territoires tout à fait autres (on pense aux expérimentations jazz, electro, folk dont le metal est friand). C’est une seconde performance à ajouter au duo. Car parvenir à sonner à part sans s’émanciper dans le total mélange, cela impose des idées et des convictions fortes.
Ai-je utilisé des laudatifs dans cette chronique ? Il semblerait bien que non lorsqu’on se penche sur l’aspect qualitatif pur. A dessein. Der freiwillige Bettler est une curiosité, un monstre difficile à appréhender, parfaitement unique en son genre. Difficilement abordable également et pour tout dire, dédié à un public à la pointe. Il faut louer cet esprit téméraire, par contre il faut savoir se montrer en tant qu’auditeur à la hauteur de la proposition. Ce n’est pas une mince affaire.