Holodogor. Voilà encore un bon nom de groupe tiré par les cheveux. Quel dialecte ? Quelle signification ? Mystère. Mais cela se rapproche tout de même très fort du mot ukrainien « holodomor » signifiant « extermination par la faim » et faisant référence à la grande famine ayant touché l’ancien pays d’URSS en 1932. Et au vu de la pochette, et du titre, le lien ne parait pas incongru.
Car trouver des données et renseignements sur la formation russe relève du tour de force. Même le KGB époque soviétique se serait cassé la mâchoire dessus. Alors oui, ça n’est pas le néant total, on sait qu'il s'agit en fait d'un one-man band fondé par Pavel Zheltikov, aka Harkilar originaire de Novomovkovsk, située à 200 km au sud de Moscou. L’homme évolue également dans le groupe de black atmo/melodeath Gartraada, en tant que guitariste. Son âge ? Enigme. Concernant Holodogor, on sait uniquement que c’est sa seule et unique production, et qu’elle est parue en 2018. Quand est née l’entité ? Secret. Quant au label sur lequel est paru Frozen Desolate, on sait qu’il s’agit de Dark East Productions, et qu’il produit majoritairement des groupes de black metal russes. Voilà pour le tour d’horizon le plus large possible sur le nébuleux projet.
Et tel un artiste de black ténébreux qui se respecte, Harkilar a décidé de faire dans l’ascèse en nommant les quatre pistes de son premier opus en accolant les chiffres romains I, II, III et IV au titre "Frozen Desolate". Et grâce à cette fabuleuse absence de paroles dont nous disposons, nous voilà bien avancés dans la compréhension du concept de l’album. Qu’à cela ne tienne, faisons avec le reste rudimentaire à notre disposition. La pochette, la musique et ces deux mots qui reviennent froidement et inlassablement. Et c’est avec une moyenne de huit minutes par chanson, qu’Holodogor nous déverse son idéologie musicale. Un thème central basé sur la répétition et la saturation des riffs, que des artistes comme Burzum ont eu l’habitude de nous servir, mais avec une batterie légèrement plus présente et réelle.
Le paradoxe de cet album, c’est que les titres sont construits sur le même – simple – schéma, mais sans se ressembler pour autant. A vrai dire, instrumentalement, l’artiste qui s’en rapproche le plus, serait Psychonaut 4. Sur presque chaque riff principal, hormis "Frozen Desolate III" qui se veut plus lent, à la limite du doom, on croit percevoir une mélodie que les Géorgiens maîtrisent à la perfection, se voulant mélancolique et pourtant lourde à la fois, comme à 1’38 sur "Frozen Desolate II". Mais voilà bien le seul trait commun des deux formations, la voix étant ici déclamée de manière si posée et peu puissante qu’on la croirait parlée, gardant néanmoins un timbre particulier. L’atmosphère quant à elle, se fait pesante durant tout l’album et ne connait que de rares accélérations rythmiques pour le moins négligeables, pouvant se ranger dans la case "faiblesse" de cette œuvre.
Ce Frozen Desolate appartient plus à la catégorie black atmosphérique qu'à celle du post-black ou black dépressif. Album agréable à écouter, il reste néanmoins trop court pour pouvoir pénétrer nos esprits de façon durable et profonde, et n’octroie pas à Holodogor d’identité particulière. Pour le moment, on l’espère.