CHRONIQUE PAR ...
Djentleman
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
16.5/20
LINE UP
-Valentin Miéville
(chant)
-Marc Chevalley
(guitare)
-Xavier Ruppen
(guitare)
-Nathan Botelho
(basse)
-Joan Liechti
(batterie)
TRACKLIST
1) Erratic
2) Nominatus Padre
3) Skyline
4) Valar Morghulis
5) I Awareness
6) II Knowledge
7) III Imagination
8) Elusion
9) Bright Side (feat. Courtney LaPlante)
10) Between
DISCOGRAPHIE
Voilà nos pâtissiers Suisses de retour. Deux ans se sont écoulés depuis la sortie de leur première gourmandise Olson, qui avait laissé un agréable goût en bouche et une saveur particulière. Bien qu’un peu courte, elle avait su émoustiller nos papilles sans pour autant les combler totalement. Nous attendions une petite touche en plus, peut-être au niveau de la consistance. Un changement de dimension atteint dans ce Bright Side ? Mettez votre tablier.
C’est peut-être un peu exagéré certes, puisque le passage d’une dimension à une autre se fait difficilement en deux albums. Mais une orientation précise peut tout de même se faire ressentir en ce laps de temps restreint, quitte à passer du tout au tout, ce qui est parfois déstabilisant pour les fans. Sans aller aussi loin, c’est tout de même ce qu’on avait pu ressentir un tant soit peu à la fin d’Olson. Depuis leur premier EP, on avait déjà pu remarquer que Make Me A Donut empruntait un certain chemin et voulait se démarquer de son style de prédilection, à savoir un genre marqué clairement par le -core, qu’il soit death- ou metal-. Le titre éponyme du précédent disque avait donc un double rôle : en premier lieu, celui de conclure la première œuvre bien évidemment, et en second lieu, annoncer la deuxième. Sans le savoir, nous venions de goûter au repas qui allait suivre. En clair, cette piste aurait pu également figurer ici en ouverture.
Malgré tout, on sent assez rapidement que les Suisses ont opéré des changements. Dès "Erratic", nous apparaît un son moins lourd et massif, mais plus clair et précis. Le nom de l’album et son artwork ne sont pas anodins car le côté clair est très marquant. Bright Side se veut en réalité moins sombre que son prédécesseur dont la pochette représentait en effet une forêt destinée à figurer sur des albums d’un tout autre style (black notamment). Il est plus « doux », tirant dorénavant beaucoup plus vers le progressif que le deathcore. Le credo est celui du progressif et non plus celui du core. On ne recense que très peu de passages agressifs, le batteur ne cédant pas à l’appel de l’hyperactivité violente et restant maître d’un tempo qui ne s’emballe pas, mais qui reste suffisamment entrainant pour nous donner envie de nous trémousser, sans pour autant sauter au plafond. Seul le chant deathcore est resté, et celui-ci est plus incisif et percutant, semblant être mieux maîtrisé par Valentin Miéville, venu remplacer Isaïe Massy, partit après la sortie d’Olson.
Preuve d’une certaine homogénéité, aucune des dix chansons n’est véritablement en deçà du niveau affiché durant ces quarante-six minutes. Il y a bien ce "Valar Morghulis" qui ne ressort pas réellement, mais l’ensemble se tient et on a tout de même droit à certaines perles progressives comme "Erratic", "Nominatus Padre" et son magnifique passage en voix claire, et l’instrumentale "I Awareness" dans lequel le rythme et la puissance montent crescendo, avant que les deux sept-cordes ne partent en polyrythmie. L’apport d’éléments et sonorités jazz, parfois sortis de nulle part (dans "II Knowledge", l’autre piste instrumentale "III Imagination" et "Between") est important à noter dans la progression musicale et les influences du groupe, ce qui montre que ce dernier a acquis une certaine maturité et ouverture d’esprit. En revanche, il reste quelques défauts mineurs à gommer dont le plus choquant ici : le passage à 2’35 sur "Skyline" où sont mêlés partie rythmique, solo et voix, ce qui donne la désagréable sensation de deux pistes superposées. Les guitaristes vont tout de même se rattraper sur les autres soli de l’album ("Valar Morghulis", "II Knowledge" et "Bright Side").
Néanmoins, ce qui est fort avec ce nouveau skeud, c’est que la formation est parvenue à faire une allégorie autour de son nom. Le beignet étant devenu une belle métaphore pour leur musique. Explication : du son et des trous. Des trous qui font partie de la musique. Des silences prenant part aux sonorités. Les séquences sont découpées et composées de tellement de pauses ou de temps morts, qu’on pourrait les comparer au trou au milieu de la pâtisserie fétiche du groupe. Volontaires ou non, en tout cas, ce sont des excellents moments, pendant lesquels on peut observer le magnifique jeu de Nathan Botelho, encore plus présent que sur Olson, et le jeu parfois alambiqué de Joan Liechti, ainsi que les samples remplissant l’atmosphère. D’ailleurs, c’est ce dont il s’agira principalement sur la dernière piste "Between" qui dure près de quatorze minutes. Enfin, en réalité, elle ne dure qu’un peu plus de trois minutes et demi, le reste étant un silence de plus dix minutes avant un roulement de batterie et un blasphème, qui ne sera répété en ce lieu saint.
Bright Side est donc la deuxième pierre d’un édifice solidement bâti par Make Me A Donut et qui commence à prendre une sacrée forme. Ayant réitérer leur confiance envers Tenacity Music et Vladimir Cochet, ils nous livrent donc une prestation plus que convaincante. S’ils continuent sur cette voie, on peut logiquement s’attendre à un troisième album référence qui nous tiendra en haleine du début à la fin. MAKE ME A DELIGHT.