Aux dernières nouvelles, Dopethrone ne serait plus ce qu’il était. Les trois camarades se seraient reconvertis… Certains affirment les avoir vu sur scène en Taïwan avec Kim Kardashian en jouant du black mainstream post-oriental doom. D’autres encore disent qu’ils ont quittés le Québec pour la Hollande où ils ont montés une association de prévention contre le cannabis… Je sais que je ne suis pas drôle mais vous pouvez rire pour me faire plaisir s’il vous plait ?
Sans déconner… On ne présente pas Dopethrone, ce sale trio de Montréal au nom directement inspiré d’un album de vous-savez-qui. Les gars, depuis 2009 avec leur premier LP très réussi Demonsmoke, nous habitue à du gros sludge/doom enfumé jusqu’à la moelle, plus jouissif tu meurs. Trois ans après un III qui envoyait des bourgeons collants et incandescents dans nos faces, Dopethrone revient avec Hochelaga et la recette n’a pas changé et c’est vraiment tant mieux. Nos junkies sont toujours aussi fans de vieux films d’horreur poussiéreux (dont ils utilisent les passages clés pour introduire certains de leurs sons) et de weed en tout genre, en commençant par l’Amnesia jusqu’à la Zimbabwe Purple Kush. La seule évolution à vrai dire est la production, Dopethrone a trouvé SON son, profond, goudronneux, gras, huileux, suintant, opaque et écrasant… Tout les adjectifs sont bons, le son des grattes est juste délicieux, si épais qu’on peut le palper (lavage des mains obligatoire après), la basse ronfle et soutient toute cette crasse et énorme big-up à la batterie qui claque comme toute bonne batterie dans le sludge se doit de le faire, l’impact de chaque frappe couplé aux riffs est juste surpuissant.
La recette du trio c’est quoi ? Vous prenez un riff parfait, ce genre de riff groovy, bluesy, rampant et catchy as fuck, celui qui va squatter votre crâne pendant des années et augmenter votre défonce à chaque douille tirée sur le bong, vous l’avez ? Ok, répétez ce riff éternellement histoire de bien imprégner la cervelle et casez un bon gros break bien massif en milieu de morceau qui fera l’effet d’une latte de champion sur un pétard surchargé. La batterie se doit d’accompagner l’auditeur dans ce voyage verdâtre et gluant en frappant puissamment sur les fûts et avec le plus de groove possible bien évidemment. A toute cette bouillie odorante et liquoreuse, ajoutez un topping vocal de choix : Vincent Houde ou le mec qui gueule vicieusement en éructant 50cl de goudron à chaque couplet, le genre de voix que la ganja et l’alcool ont sculptés pour en faire une arme rouillée et potentiellement mortelle. Simple non ? A l’image de formations comme Electric Wizard, Weedeater et 99% des groupes dont le nom comprend le mot « Bong », ce genre de groupe ne brille pas par leur inventivité ou par leur talent de ninja pour nous surprendre à chaque sortie. Dopethrone repose sur ses acquis et ne se préoccupe plus de l’innovation, il préfère fignoler son travail déjà abouti, partir à l’aventure à la recherche du riff qui vous fera planer sans produit illicite.
Hochelaga nous inspire, nous délivre 1001 scénarios en tête, tous plus sympa les uns que les autres. Imaginez la sortie de l’album : le bon gros stoner aux yeux rouges-violets passe dans les rayons de son disquaire, la démarche pachydermique et flemmarde, en bouffant comme un porc des Doritos au fromage pour faire passer la faim due à la fumette ; il s’empare du dernier Dopethrone, souris et rentre chez lui sans une once d’enthousiasme, se pose sur la terrasse, met le disque dans la fente (et une bonne partie de la garniture des chips se retrouvent sur ce disque d’ailleurs) et se roule une grosse batte… Une journée comme une autre, il se sent bien, pas de stress, il est en terrain connu, les riffs le bercent et le font sourire et il s’y attendait, il est heureux. Malgré toute cette joyeuse crasse, on peut déceler quelques grammes de mélancolie sur la galette, on pense de suite au morceau "Vagabong" qui s’ouvre sur un riff à vous donner des frissons, Wizardien (comme celui de "Chameleon Witch", on sent bien l'influence du trio anglais), nostalgique et tout simplement beau, sans doute un des riffs les plus grandioses du genre, on peut sentir toute l’attention et tout l’amour de la musique et de l’herbe des trois copains dans ce seul riff, il vous donnera le sourire aux lèvres à coup sûr… Allez lâchez-la cette larme, tout le monde est retourné.
Trois ans après III, Dopethrone revient plus fort que jamais, plus enfumé que jamais et plus puissant que jamais. Hochelaga est le condensé de la pensée du trio, le réceptacle de leurs émotions les plus profondes et de leurs délires les plus fous. Si vous êtes déçu par le dernier Electric Wizard, si vous êtes nostalgique de l’époque Come My Fanatics… et de son grand frère, ou si vous voulez tout simplement vous sentir lourd et gras pendant votre bédave quotidienne. Vous savez ce qu’il vous reste à faire…