Trepalium

Entretien avec Groupe au complet - le 05 décembre 2014

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Iokanaan

Une interview de




Trepalium_20141205

Complètement niqué... Hors du temps mécanique... L’alchimie d’une montre qui opère son retour en arrière, clic, clic, clic, sur un rythme ternaire. Une radio brouillée à côté qui se détend la chaîne tandis qu’une brume épaisse vient détrôner la nuit. C’est une cabane au milieu d’un bois de Louisiane, ou ailleurs, de ces endroits où les marais salent et les saules pleurent, où l’insecte pullule... Je vous jure (ou pas) que Trepalium habite ici, qu’ils y dissèquent leurs instruments sur une table d’opération et qu’ils jouent au poker chaque soir de lune pleine dans le sang de leur propre musique.

J’étais assis à une table, faisant office de début d’une histoire, à attendre l’appel d’un concert... Et sur ma foi, j’attendais plutôt bien... Juste avant que je devienne le tableau d’une pièce de Marguerite Duras, ma curiosité de l’instant prêta son attention à la tablée voisine. Un groupe de mâles y étaient installés, taillant un bout de gras à propos des meilleurs designs T-Shirts du groupe qui allait conclure la soirée : Trepalium. Puis la discutaille a dérivé sur un projet de création visant à rendre internationale la pratique de coups de pieds dans les parties, pour ne pas dire les couilles. Je réalise rapidement qu’il s’agit d’un des groupes de la soirée, et sans réellement savoir lequel je m’approche et me permet la question. Les gars me répondent qu’ils sont (les fameux) Trepalium, et moi je me marre, parce que je sais qu’ils se font passer pour Trepalium et disent des conneries à voix haute pour que ça retombe sur le groupe sus-nommé.

Sauf que je me marre tout seul. Et à l’instantané, je réalise que comme un couillon, après avoir chroniqué le dernier album de ces messieurs, je n’ai simplement pas été foutu de les reconnaître. Alors je me suis excusé et je leur ai demandé une interview à l’improviste, pour pouvoir les reconnaître la prochaine fois qu’on se croiserait. Les gars, voici mon Mea Culpa.

« On a commencé en 2000 en jouant du Brutal Death. »

Trepalium, c’est un genre de conte de fées. Un conte de fées qui a l’avantage de passer rapidement au Nanar esthétique (ça pisse la globine, mais on dirait que ça été peint par Renoir ou Blake...). Une histoire où les rencontres sont belles parce qu’elles se font pousser le hasard au bout du bouc. Au départ elles mènent à la création de la démo Psychic Storm : l’aventure s’officialise bien, le soucis c’est que personne ne se voit vraiment chanter plus que ça. Et c’est lors d’un concert, où le groupe demande au public de venir chanter/hurler/cracher/vomir/etc. librement dans le micro, qu’un mec se pointe et hurle des conneries avec assez de classe pour que Trepalium le garde en contact et que ce dernier devienne KK, l’actuel cracheur de mots de la formation.

Iokanaan : « On fait un rapide tour de table, histoire de présenter et préciser qui fait quoi ? »
Sylvain : Je suis à la batterie !
Harun : À la guitare !
Nico : Guitare aussi !
KK : Je suis le black du groupe...
Ludo : Et moi à la basse.

On est en 2002, la pensée commune du groupe s’établit rapidement à cet instant : faire du Death pour du death, aussi brutal qu’il soit, c’est gonflant. Il faudrait un truc en plus, rajouter une marque esthétique qui serait plus propre à Trepalium. Les potes sont tous autodidactes, du bout du manche jusqu’à la grosse caisse, et décident en leur âme et conscience d’autodidacte qu’il serait intelligent de mixer un genre musical dur à tenir (appelons-le death-metal) avec un genre musical chiant à caler (appelons-le jazz). Et on ferait comme si c’était facile. Mais d’où vient l’idée, et par où l’influence elle vous sort ? Lequel d’entre vous a passé ces jeunes années à emballer des gonzesses sur du Benny Goodman plutôt que sur du Maiden ?

Iokanaan : « Quelles sont vos influences métal ?  »
Trepalium
: Bin, Pantera, Meshuggah, Machine Head, Cannibal Corpse......

Iokanaan : « Niquel... Et quelles sont vos influences groovyjazzyswingy ? »
Trepalium : Bin, Pantera, Meshuggah, Machine Head, Cannibal Corpse.......


« On est de la génération Youtube ! »

« À chaque fois, les gens nous demandent quel album ou quel artiste de jazz nous influence en particulier. On en a pas, on a juste tapé "jazz des années 30" et "swing New Orleans" sur Youtube. Après ça, on en a ressorti ce qu’on voulait bien en prendre ! »  Parce que chez Trepalium, il y a un truc aussi clair que de l’eau de roche qui serait limpide :


« Ce qui fait Trepalium, c’est pas la musique des autres ! »

Aujourd’hui, sans compter les démos, Trepalium en est à son cinquième délit musical. Ce dernier s’appelle Voodoo Moonshine (chronique élogieuse disponible sur le site, ici) et est déjà considéré comme l’un des meilleurs produits bio français de l’année. Son régime strict de six titres, qui réussit le défi de faire passer un EP pour un album, a permis de consacrer un temps plus important aux arrangements studio. Un approfondissement précieux du groupe qui put laisser libre cours à pas mal d’expérimentations nouvelles. Habitué aux albums concepts depuis leur dernière trilogie (Alchemik Clockwork of Disorder, XIII et H.N.P), Trepalium se booste la gueule au spirituel et s’informe sur l’univers Vaudou. Parti d’un délire sur le sujet pendant la tournée Klonoshpere de 2012, l’idée se précise et un nouveau virage est entamé, aussi bien dans le rapport à la musique que dans le design extérieur.


« J’apporte les compos, KK s’occupe des textes. »

Mais il faut partir sur une base précise, un combo gagnant, qui évolue toujours tout en gardant la ligne. Ici, c’est le cas du duo Harun/KK. Depuis la création du groupe, Harun a toujours amené l’essentiel de la composition : « Bien évidemment, si un autre membre apporte une bonne idée, j’essaye de l’inclure. Mais en général ça part de moi, je me charge du concept musical. » Pour Voodoo Moonshine, le monsieur a composé les six titres de l’opus à l’aide d’une boîte à rythme pendant l’été 2013. Certains thèmes ont été retravaillés pendant les répétition,s mais l’ensemble du travail en commun s’est principalement posé sur les arrangements. KK arrive après pour placer ses textes dans le bouillon, la maquette est mise à température ambiante, on laisse reposer...


« Bin je lis des livres quoi...»

Pour ce qui est de la source littéraire, KK aime s’approvisionner en information sur le thème qu’il compte aborder. Ses sujets de prédilection tournant autour de l’occulte et des vices de l’humain, l’idée du vaudou allait déjà mettre un bon pas dans son sens. En plus de ça, le chanteur/hurleur du groupe a potassé quelques auteurs/propagateurs du genre, comme l’écrivain Philippe Pissier (traducteur français de l’oeuvre d’Aleister Crowley), la réalisatrice Maya Deren ou encore le philosophe Georges Lapassade. Pendant que les autres membres répètent les compos, KK écoute sagement, gribouille et peaufine ses textes avant de finalement les enregistrer.

Sur un six titres comme Voodoo Moonshine, l’énergie déployée est surprenante. D’autant qu’elle est partagée puisque Trepalium se fait monter le plaisir en invitant sur l’opus plusieurs têtes pas coupées de la veille. À commencer par l’arrangeur Rémi Dumoulin, dont le CV accueille notamment un passage chez Magma ou encore l’ONJ (Orchestre National de Jazz), qui viendra s’occuper de la section cuivre. Puis vient Matthieu Metzger (Klone, ONJ) qui se fait sonner le saxophone dans les sphères métallisées depuis un certain temps déjà. Quant au dernier, le plus connu et ici le plus discret, il s’agit de Joe Duplantier de Gojira qui intervient sur "Damballa’s Voodoo Doll" alors qu’il est au même moment en tournée quelque part dans le monde (il enverra quelques pistes indirectement au groupe qui seront triées puis mixées en studio).


« Un gros travail d’équipe en somme. »

Ce nouveau chemin emprunté par Trepalium s’effectue également par d’autres moyens que celui de la musique. À commencer par le design de l’album. L’image du buste de cette femme se tripotant l’âme à travers l’aiguille et le venin raconte et exprime à elle seule la fureur et la folie qui se dégage de l’album. C’est une idée de Hicham Haddaji (Strychneenstudio) : (Harun) « Ce qu'il a proposé pour H.N.P nous avait vraiment plu, nous avons donc voulu réitérer l'expérience. A la base nous voulions partir sur une photo avec divers photographes pour retravailler ensuite l'image avec lui. Aucune de ces idées ne nous ayant convaincues, nous lui avons demandé de nous proposer des visus à partir de nos envies. Il a su répondre à nos attentes une fois de plus ! »

Enfin le look du groupe se précise. Et si la musique doit bêler son écho jusque dans les années 30, il faut que les fringues représentent au mieux ce même écho. Chemises, bretelles, noeuds pap’, chapeaux, tout l’arsenal de la neutralité d’un musicien donnant le ton à un chanteur maquillé d’une tête mortuaire, canne à la main. Et ce jusque sur scène où Trepalium étale son univers sur les murs des salles de concert. (Harun) «Nous avions déjà nos costumes. Il ne restait plus qu'à réunir les idées de chacun concernant le décor, le tout supervisé par notre ingé-lumière lors de la résidence de préparation de la tournée. Nous avons ainsi demandé à deux amies de travailler sur des poupées vaudous faciles à mettre en place. Le résultat est là ! »


2015 : année de tournée

Du moins, c’est ce qui a l’air de se présenter. (Harun) « Trepalium jouera pas mal de dates en France en tête d’affiche. Bordeaux, Toulouse, Lyon, Manosque, Rennes... Mais aussi des dates à l’étranger. » En effet, cela fait quelques temps que le groupe commence à foutre des coups de tatanes dans les frontières françaises afin de se faire reconnaître à l’étranger.... La tournée 2012 avec Gojira et Klone leur avait permis de jouer à travers une partie de l’Europe (Norvège, Suède, Belgique, Suisse, Danemark...) Aujourd’hui la chose se précise de plus en plus : « L’album sort en février en Angleterre, nous devrions y aller le même mois pour une série de dates. »


Épi du logue

Iokanaan : Pour y conclure tranquillement l'Interview, est-ce que toi, Harun, ou Trepalium dans son ensemble, a un mot à faire passer aux Francophones et/ou au Monde? Une remarque, anecdote, un Album ou autre à conseiller, un truc qui rend heureux, une chose qui donne envie de se flinguer, une vidéo d'un bassiste qui se vautre sur scène ou un flyer du championnat du monde de coup de pieds dans les couilles, tout parle !


Harun : Haha, il y aurait tellement de choses à raconter oui, mais contentons-nous de remercier toutes ces personnes qui nous soutiennent depuis le début ainsi que tout ceux qui viennent s'éclater avec nous sur cette tournée loin d'être finie !

Si vous ne l’avez pas saisi, je vous lâche un morceau qui fait plaisir : Trepalium est très loin d’être prise de tête. Ils sont pros, ils sont bosseurs, ils font dans la recherche, donc dans le nouveau, font péter les watts intelligemment, ont la déconne facile, toujours pure, et la modestie calme. Trepalium est le nom d’un instrument de torture (déformation du latin tripalium). L’ironie dans l’étymologie, c’est que le mot Trepalium a donné travail en français. Je leur demanderai la prochaine fois que je les croiserai si c’était voulu de leur part. Enfin... si je les reconnais...


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