Smohalla

Entretien avec Slo - le 24 juillet 2013

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TheDecline01

Une interview de




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Bardé d'un split avec Omega Centauri qui a soulevé l'enthousiasme (chronique ici), Smohalla a bien naturellement éveillé notre curiosité, d'autant plus que le groupe est plutôt underground et français. C'est donc fort logiquement que l'interview arrive pour éclairer les zones d'ombres qui entourent ce groupe mal connu de la scène black metal avant-gardiste. Au cours d'un entretien franc et parfois cynique, Slo se découvre et nous fait explorer son groupe. Appréciez.

TheDecline01 : Vos influences sont très spatiales : Arcturus, The Kovenant ou épiques : Drautran, que recherchez-vous dans la musique et que voulez-vous exprimer ?

Slo : Chaque union de notes et de sons peut procurer un sentiment ou une évocation différente, qui elle-même pourra varier selon qui l'entendra et l'interprétera. Par exemple notre dernier split pourra évoquer à certains une vision de l'espace mais pour moi c'est plus la terre, l'introspection et l'isolement vers la matière noire et le vide de nos esprits que m'évoque cette dernière salve de titres, comme le repli en fœtus dans une souche d'arbre géante et une renaissance. Je m'imagine plus un amas de corps nus allongés face contre terre dans une forêt que des planètes lointaines quand j'écoute ces titres, mais chacun a sa propre vision des choses. D'une manière plus générale, il y a juste des expressions qui demandent à sortir de toi, et inconsciemment tant qu'elles ne sont pas exprimées de manière satisfaisante pour ton esprit, sous formes de vibrations pour ma part, je continue d'explorer.

TheDecline01 : Le concept de l'Espace tient-il une place spéciale dans Smohalla ? Que vous inspire cet élément de la Nature ?

Slo : L'Espace c'est l'inconnu, l'abstraction. Pour beaucoup d'individus, que ça soit a travers une religion, la science, la magie, l'astrologie, ou d'autres croyances diverses et variées, c'est le vaste symbole pour d'hypothétiques formes d'espace-temps différentes où pourraient se développer d'autres formes de vie. Plus éthérées, ou spirituelles que sur terre. Des perceptions différentes, une infinité de nouvelles possibilités. Et Dieu, quelque soit la vision que vous pouvez avoir de lui, une entité consciente, le grand Hasard, est une idée du voyage ultime, du mystère absolu. Donc tout ça est si vaste qu'on peut difficilement parler d'influence à part entière mais oui, Smohalla est un concept entièrement construit sur la recherche et l’expérimentation de domaines qui ne peuvent ni se voir, ni se toucher, et j'ai toujours instinctivement trouvé cette satisfaction créatrice uniquement quand nos ambiances ont su donner quelque chose d'un peu éloigné et différents du concret, de l'uniformisé. Ouvrir sur de nouvelles perceptions au lieu de faire des boucles remodelées avec le passé, les influences et le folklore.

1_378h_300w TheDecline01 : Votre musique est riche, complexe dans ses rythmiques, est-ce important de proposer une musique pas forcément accessible au premier abord ? Qu'attendez-vous des auditeurs ?

Slo : On n'a évidement pas la volonté de créer une musique volontairement inaccessible. Pour moi, elle est loin d'être si hermétique que ça, au contraire, je la trouve plutôt accessible, assimilable dès la première écoute suivant vos oreilles, mais non sans surprises. Le seul souci c'est que les gens sont formatés à tous les niveaux, pour l'art, pour leurs relations, pour tout. Et les personnes qui font un effort pour s'émanciper de ça, ou qui sont naturellement exclues par leur nature même de ces chemins, sont finalement très rares. Tu as beau écouter le style le plus underground de l'univers, si tu chies sur tout ce qui ne respectera pas ses codes initiales, alors tu seras quand même un mouton (d'un petit troupeau). Du coup les gens qui vont écouter un projet à part, personnel, ne retrouvent pas leurs codes habituels et sont perdus. C'est comme un chat domestiqué qui au bout d'un moment ne peut plus bouffer que la même marque de croquettes, alors que dans sa nature initiale il aime pratiquement tout. Les gens sont conditionnés de la même manière, si tu leur donnes de la merde tous les jours, ils te supplieront pour avoir leurs grosses assiettes de caca, et rien d'autre. Mais sinon, dans notre forme, on n'est pas si différents de milliers d'autres groupes. On se creuse juste un peu plus la tête pour proposer quelque chose de plus personnel, juste parce que c'est dans notre nature de tout compliquer peut-être, parce que ça nous correspond plus. Ça plaît, ou pas, c'est comme ça. Et ce que j'attends des auditeurs, pour en revenir à ta question, c'est qu'ils s'autoenculent, vomissent de l'or 24 carats et deviennent tous pasteurs de leur propre religion après écoute de nos titres. (ndTheDecline01 : tout le monde a bien pris note)


TheDecline01 : Vous ratissez large dans les courants musicaux qui agrémentent votre black metal, notamment dans l'electro ou le trip-hop, avez-vous des groupes de référence ? Que ressentez-vous à l'idée de mixer black metal et genres a priori honnis des blackeux intégristes ?

Slo : Je ne ressens rien de particulier, j’expérimente juste ce qui me plaît et ce que j'ai en tête, même si au final le résultat est toujours très différent de mes idées de base. Les expérimentations et le mix des styles font partie du black metal depuis ses balbutiements, je veux dire, ses vrais balbutiements en Scandinavie et dans toute l’Europe au début des années 90. Beherit, Abruptum, Arcturus qui a sorti son premier 2 titres assez prématurément finalement, Ulver, Burzum, et j'en passe... Même dans la première vague de groupe plus tôt, le black metal n'etait au final qu'un style bâtard qui mélangeait allègrement thrash, death, heavy, speed, punk etc... Comme toujours, les vrais créateurs sont un peu plus en retrait, face aux vulgarisateurs et au popularisateurs mais c'est comme ça que le monde tourne, spécialement quand il est question de musique. Pour l'electro, et l'IDM, j'en écoute énormément, des pionniers aux groupes d'aujourd'hui comme Principle of Geometry, Kap Bambino, Chateau Marmont, Fever Ray ou Grimes. J'ai un projet depuis l'année dernière qui s'appelle Fixions, plusieurs titres sont en écoute sur soundcloud, mais c'est vrai que dès nos débuts on a intégré des éléments de musique électronique à nos sons, parce que dès les débuts il était question de ne s'imposer aucune frontière. Il y a beaucoup d'autres éléments extérieurs au black qui sont discernables moins facilement, comme le vieux prog, l'ambient, la musique classique etc...

TheDecline01 : L'originalité est-elle un fil conducteur dans vos compositions ou est-elle simplement une résultante de ce qui sort de vos esprits ?

Slo : Comme je le dis souvent, j'essaie juste de faire la musique que j'aimerais entendre. Évidemment je ne serai jamais satisfait du résultat à 100%, mais je donne tout pour être le plus satisfait de ce que je fais.

TheDecline01 : Si vous aviez tous les moyens dont vous rêvez à disposition, que feriez-vous comme musique ?

Slo : Très bonne question ! Je me sens très limité par mes moyens, comme pour tous les domaines, la création dépend malheureusement des moyens disponibles, de l'argent que tu as pour investir dans tel ou tel équipement. Même si avec juste une guitare acoustique et du chant tu peux partir très loin, il est indéniable qu'avec un gros paquet de fric il est plus facile de développer des univers riches, complexes et originaux. J'aimerais beaucoup avoir un orchestre à disposition, en y intégrant des chants, des chœurs et des instruments de toutes les régions du monde, et de tous les styles et de toutes les époques. Ce qu'a fait le Geinoh Yamashirogumi, avec ma vision des choses, plus d’expérimentations électroniques, et le tout enregistré avec un équipement moderne. Rien de metal pour le coup.

TheDecline01 : L'imaginaire est-il important pour toi ? Composez-vous en fonction de sensations ressenties sur le moment et la musique doit-elle être un voyage ?

Slo : L'imaginaire est a peu prêt tout ce que j'ai jamais eu. Les projections imaginaires sont pour moi plus concrètes et intéressantes que beaucoup de choses matérielles. Je ne prône pas le repli sur soi car on peut très bien faire ça à deux, en groupe, entre autre par la parole, et en retirer énormément de bénéfices. 
Mais oui, un voyage, voire plutôt des voyages, c'est exactement ça, je considère vraiment la conception d'un titre comme un trip au cœur de mon infinité intérieure, cette vaste matière abstraite qui nous compose tous au fond finalement, qui est une des rares choses qui nous réunit tous d'ailleurs, mais que peu de personnes arrivent à ne pas fuir. Elle est tellement vaste puisque infinie en terme de temps et d'espace, tellement difficile à canaliser et contenir... Il y a des éons en nous, des particules vieilles de plusieurs milliards d'années et qui étaient présentes lors de la naissance de notre Univers actuel. Au-delà des simples conceptions de conscience / inconscience, de bien et de mal, libre à nous d' explorer cette facette-là, par n'importe quelle forme de création qu'il s'agisse de musique, de sexe, d’écriture, de partage etc... La plupart du temps, je suis dans l'erreur et je fuis tout ça aussi d'ailleurs, je fuis Dieu, je m'abreuve de fictions, je bois, je fume etc... Heureusement qu'il y a la musique et les sons pour m'y rapporter, d'ailleurs je ne me vois que comme un chef d'orchestre qui modifie, assemble et décompose des sons, je n'ai pas inventé la guitare et le son qu'elle produit, je n'ai pas inventé le fait de taper sur une batterie pour produire un rythme, etc...


TheDecline01 : Vois-tu le groupe évoluer vers plus de complexité ? Et après tes autres déclarations, Smohalla a-t-il vocation à demeurer un groupe de black metal en parallèle à ton second projet ou pourra-t-il évoluer dans une musique totalement différente ?

Slo : Je n'ai jamais vraiment considéré Smohalla comme un groupe de black metal, et je ne peux vraiment pas dire à quoi ressemblera notre prochaine réalisation. Une chose est sure, je ne conçois pas une carrière à la Ulver et abandonner les instruments acoustiques car j'aime encore trop la densité et la puissance procurées par l'association des instruments de rock de base, guitare, basse et batterie. Et de toute façon vu qu'avec Fixions j'ai déjà un projet de musiques électroniques pures, ça serait dommage. On verra bien.

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TheDecline01 : Tu parles de chier de l'or, Smohalla peut-il devenir grand et jusqu'où penses-tu que le groupe puisse aller ? T'imagines-tu vivant de Smohalla et que penserais-tu si cette situation arrivait ?

Slo : Pour qu'un groupe devienne grand, on va être honnête, il faut passer ses journées à le promouvoir. Qu'on parle de heavy, de rap ou de black metal, tous les groupes qui ont un minimum de popularité, je ne parle pas de nous mais des formations qui sont largement au-dessus de ce niveau-là, ont atteint ce stade à cause d'un gros travail de promo, effectué dans 90% des cas par eux-mêmes, et pour les 10% restant par un label, ou les deux. En gros il faudrait passer plusieurs jours par semaine à sucer les touches de mon clavier pour expliquer au monde entier à quel point mon groupe est le plus cool du monde, à payer des pubs dans TROUDUCUL magazine, à faire des sessions photos professionnelles 14 fois par an en train de poser dans les branches de lavandes... Hors, je considère ça comme une perte de temps, et surtout, il faut bien travailler pour payer son loyer, tout le monde n'a pas la chance d'être assez entretenus par son entourage pour avoir tout son temps libre à claquer en autopromotion. A la sortie d'un cd je l'accompagne un peu, mais le côté business, à jouer un rôle de captain badass et passer ma vie dans la promo de mon groupe, comme Shining et son leader cupide, à traiter les auditeurs de fils de putes parce qu'ils téléchargent au lieu d'acheter... Et essayer de les culpabiliser, leur faire croire que la qualité de la scène dépend des sous qu'ils arriveront à gratter à papa et maman pour acheter leur dernier CD pourri ou ses t-shirts de pucelle... J'en ai vraiment marre des discours de type  « t' achète pas de cds tu tues la scène », alors que les seules personnes qui en profitent financièrement sont des dirigeants de labels qui roulent en Porsche alors qu'aucun de leurs groupes n'arrivent à vivre de leur musique, mis à part quelques groupes très connus qui font de la grosse merde. Il n'y a jamais eu autant de groupes intéressants que depuis les année 70, il faut juste fouiller. Donc il est clair que je ne vivrai jamais de Smohalla, de toute façon qui achète encore des cds ?? Quelque chose comme 2% de nos auditeurs, grand maximum. Même les plus gros groupes de Metal français ne vivent pas de leur musique. Quand je pense que dans le tas, que tu aimes leur musique ou pas, il y en a qui font ça de manière passionnée depuis 15 ou 20 ans, qui ont des milliers de fans mais qui ne touchent toujours que quelques dizaines de centimes sur leurs ventes de cds et passent leur vie en tournée... Je préfère encore largement garder mon statut de groupe indépendant, changer de label à chaque release, et m'arranger pour avoir des cds à vendre pour mon propre compte, quitte à ce qu'on reste des illustres inconnus toute notre carrière, ça ne me pose absolument pas de problème. Je télécharge pratiquement tout ce que j'écoute, j'achète parfois des vinyles mais jamais de cds, le monde change, et je préfère largement maintenant qu'avant. D'ailleurs même quand j'avais 13 ans, la majeure partie de mes K7 étaient volées dans des supermarchés ou piratées. Bien sûr je respecte aussi les gens qui achètent des cds, mais si quelqu'un lit ça et pense que je contribue à ruiner la scène, c'est qu'il a un point de vue extrêmement naïf, réducteur, et surtout manipulé et faussé.

TheDecline01 : (ndTheDecline01 : attention, séquence solitude, ne demandez pas d'où vient ce gros vautrage) Enfin, la Savoie est-elle propice au black metal avec ses sommets enneigés ? Je me souviens de la Rumeur des chaînes qui venait du coin, y'a-t-il une "confrérie" black avant-gardiste en Savoie ?

Slo : La Savoie est une des rares régions de France où je n'ai encore jamais mis les pieds. Je vis à Aix-en-Provence, je ne pourrai pas vivre dans un endroit sans un maximum de soleil toute l'année. Il y a beaucoup plus de lumières que de ténèbres dans nos sons, je considère vraiment Smohalla comme un groupe de metal solaire, à l'opposé de la froideur des groupes de BM plus traditionnels. D'ailleurs pour ceux qui liront ça, je conseille vraiment à tout le monde de passer du temps au soleil le plus souvent possible. Le soleil est la maison de toutes nos âmes, le fuir, c'est se fuir soi-même. L'accepter c'est à coup sûr développer sa conscience, son mental et son harmonie. La lune est une pute ingrate qu'il faut fuir à tout prix par contre, elle est la reine du mensonge. Du coup je ne sais pas où tu as lu qu'on venait de Savoie, notre bassiste vient d' Évreux, j'ai toujours vécu en Méditerranée et je suis loin de ressembler à un viking (ndTheDecline01 : Alcool ? Drogues ? Bêtise ? Qui sait).


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